Netanyahou - Ben Gvir |
La vision apocalyptique d’un État d’Israël devenant jumeau de l’État ayatollesque iranien, s’estompait sensiblement devant la débâcle rapidement provoquée par le nouveau gouvernement. Débâcle dont la soudaineté et l’amplitude n’avait d’égale que la vitesse et la profondeur de la transformation mise en œuvre du régime démocratique en régime théocratique. Ce timide soulagement conduisait Jonathan à éplucher les différents ingrédients de cette angoissant «happenhing» pour tenter de le comprendre et pour en tirer quelques enseignements.
Bibi et ses amis |
Comprendre, pour commencer. Question première : quelle
profondeur abyssale peut atteindre l’angoisse d’un homme devant le risque de se
retrouver un jour proche en prison, doublée d’une addiction devenue mortifère
au pouvoir ? Au point de sacrifier son pays, le peuple auquel il
appartient, en offrant son âme aux diables : un cocktail incontrôlable de
repris de justice, d’ennemis illuminés de la justice, de religieux extrêmes se réclamant
d’un dieu de la violence, du fascisme et de la mort.
Autre questionnement fondamental. Comment le rouleau compresseur du
pouvoir législatif d’une majorité élue, peut poursuivre son parcours, sans que
l’opposition ouverte, affirmée, d’une majorité du peuple, des corps
professionnels toutes activités confondues, juridiques, sociaux, sanitaires,
économiques, sécuritaires, éducatifs, culturel, technologiques, soit dans
l’impossibilité de le stopper ?
Comprendre aussi, plus largement, le mouvement de l’iceberg
sociétal dont Israël n’est que la pointe visible immergée. Pourquoi la
conjonction d’un renouveau de la religiosité, dans ses formes ou souterraines
ou ouvertement violentes, avec l’ambition de domination d’une classe riche, dirigeante,
idéologiquement conservatrice et nationaliste, submerge-t-elle lentement mais
surement les démocraties occidentales ? À tel point que cette dérive du
continent politique que constitue l’Occident dans le monde, favorise l’émergence
et la consolidation de régimes alternatifs, tels celui de la Chine, de l’Inde,
de pays en développement.
Manifestation |
Interpréter ensuite. Avec toute la modestie nécessaire. Mais, se
dit Jonathan, il faut bien se jeter à l’eau pour tenter de surnager dans le
bousculement de la réalité. Sur le plan le plus général, une évidence sembla
s’imposer. Aveuglante. L’extraordinaire rapidité de changement du monde qui
provoque une espèce de rupture sociétale de la formule d’Einstein, «E = MC2»,
revisitée. La transformation du Monde, sous l’effet de sa mondialisation et de
sa modernisation, dans une vitesse en constante accélération, submerge sa
capacité d’adaptation. Le modèle occidental, jusque-là dominant, se fissure, se
voit contesté. Des régimes passéistes et conservateurs s’opposent au
changement, restreignent et parfois combattent le champ de la démocratie.
D’autres modèles se lèvent pour répondre au monde nouveau. Mettant
au défi la démocratie «à l’occidentale» de se renouveler. Par exemple, en
gagnant plus de souplesse, de réactivité, d’acceptation, par la subsidiarité
généralisée. En réinventant l’univers politique ringardisé, professionnalisé,
devenu hors sol. Le réintégrant dans la vie réelle, pratique, responsable. En
faisant de la fraternité, le lien entre la liberté et l’égalité. En se libérant
de l’histoire castratrice et des idéologies réductrices……
La Knesset |
Sur le plan local, la situation dramatique israélienne apparaît
alors, en fait, comme un appendice de cette remise en cause fondamentale générale.
A la vision généreuse, enthousiaste, d’une société nouvelle pour un pays neuf
offert aux Juifs du monde, a succédé une normalisation. Facilitée par une
extraordinaire vitalité de la société civile israélienne. De moins en moins
soucieuse, du fait de ses victoires militaires, de sa force, de son dynamisme,
de ses déficits de défense de ses minorités, devant le conflit de plus en plus
profond avec les Palestiniens, devant la progression d’une radicalisme
religieux interne.
Un endormissement des consciences qui a ouvert la voie à la
tentation théocratique et liberticide, à un climat de prévarication. Ici aussi,
derrière le soulèvement salutaire en cours, apparait la nécessité de réinventer
une société israélienne plus égalitaire, plus équilibrée dans le partage des
pouvoirs, plus attentive aux minorités, plus créative et audacieuse dans son
rapport du fort au faible, plus exigeant face au politique, plus engagée dans
les grands défis du monde, climatique, sociétaux.
Rien n’est jamais gagné, rien n’est jamais perdu se souvint
Jonathan. Mais comme tout va plus vite, il se souvint aussi que l’enfant est le
père de l’homme. Et même de la femme, maintenant. Et comme, il voyait, autour
de lui, agir, inventer, oser, des générations nouvelles, plus libres, plus
ouvertes, imaginatives, il se dit que, finalement, subsiste pour sa génération,
bien vivant, l’espoir.
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