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dimanche 5 mars 2023

Netanyahou maintient son projet judiciaire


NETANYAHOU MAINTIENT SON PROJET JUDICIAIRE

 

Par Jacques BENILLOUCHE

Copyright © Temps et Contretemps

Des parents défilent avec leurs enfants à Tel-Aviv pour protester contre la réforme judiciaire

        Le premier ministre ne semble pas ébranlé dans sa détermination de mener son projet judiciaire jusqu’au bout malgré les manifestations, la mise en garde de plusieurs anciens chefs de la sécurité qui craignent ouvertement une guerre civile et celle de dirigeants d’entreprises qui s’inquiètent des conséquences économiques. Sans compter sur l’appel à la retenue de plusieurs hauts dirigeants américains de tous bords. Les manifestations s’amplifient depuis plus de deux semaines sans que la situation politique ne semble évoluer face à la détermination du ministre de la Justice, Yariv Levin qui a mis sa participation au gouvernement en jeu.


Ben Gvir avec un jerrican d'essence


Les députés de la coalition, incluant les orthodoxes ultrareligieux, confirment leur volonté de modifier un système qui donne, selon eux, aux tribunaux et aux conseillers juridiques un poids trop important sur les décisions de la Knesset. Le vote définitif, qui interviendra certainement après trois lectures, supprimera tout contrepoids face à une Knesset et à un gouvernement omnipuissants. La détermination de la coalition est forte. Devant le tollé général, le président Itzhak Herzog est sorti de sa neutralité pour tenter de trouver un compromis avec l’opposition qui refuse de discuter tant que le projet n’est pas totalement gelé.

Eynat Guez présidente de la startup Papaya


Les grands dirigeants de la hightech mettent en garde contre un affaiblissement du système judiciaire. Les chefs d’entreprise veulent être libres d’agir à leur gré, sans aucun frein venant d’un quelconque gouvernement qui pourrait créer des lois pour freiner leur expansion. Selon eux, ces nouvelles lois font fuir les investisseurs étrangers. Ils veulent continuer à gagner de l’argent sans être bloqués par des directives nouvelles. Ils craignent qu’on leur impose un contrôle des changes, des impôts nouveaux exceptionnels sur leurs dividendes, des interdictions d’investir à l’étranger, bref qu’on leur installe un carcan financier face à une Cour suprême faible.  Quatre milliards de dollars sont déjà sortis d'Israël par crainte d'une réforme judiciaire après les avertissements des mastodontes financiers mondiaux JP Morgan et HSBC. La majeure partie de l'argent est allée à des banques aux États-Unis et en Europe. Cela a été le cas de la startup Papaya qui a transféré tous ceux actifs à l'étranger.



Les manifestations hebdomadaires s’amplifient avec plus de 100.000 manifestants pacifiques puisque les enfants participent aux marches avec les parents. Certains manifestants osent tout. Un groupe de vétérans de l'armée sont allés jusqu’à «emprunter» un char déclassé sur un site de mémorial de guerre pour le draper de la déclaration d'indépendance d'Israël.

Les États-Unis ont été contraints de réagir en envoyant des avertissements à leur allié. L'ambassadeur américain Tom Nides a déclaré dans un podcast qu'Israël devrait «freiner» la législation et rechercher un consensus sur une réforme qui protégerait les institutions israéliennes. La réaction israélienne a été forte, presque insolente, de la part des alliés de Netanyahou. Le député Amichai Chikli a répondu à Nides : «Je dis à l'ambassadeur américain, freinez vous-même et occupez-vous de vos affaires»À noter cependant que les Arabes israéliens sont restés totalement à l’écart des manifestations alors qu’ils sont concernés par un gouvernement plus fort non freiné par une Cour suprême affaiblie.

Le nouveau système de sélection des juges favorise le gouvernement et la majorité à la Knesset en éliminant les deux représentants du Conseil de l’Ordre des avocats pour les remplacer par des députés aux ordres. La réforme donnerait aux députés de la coalition le contrôle des nominations avec le risque que les juges soient nommés en fonction de leur loyauté envers le gouvernement ou le Premier ministre. Selon Yaniv Roznai, co-directeur du Centre Rubinstein pour les défis constitutionnels à l'Université Reichman de Tel-Aviv : «C'est dramatique. Si vous prenez le contrôle du terrain, alors tout est fini. Vous pouvez faire n'importe quel changement que vous voulez».



Le nouveau projet permettrait le vote de nouvelles Lois fondamentales faisant fonction de Constitution sans qu’il y ait aucun contrôle judiciaire sur une législation controversée. La Knesset aurait le droit d’annuler les décisions de la Cour suprême et de contrôler la nomination des conseillers juridiques du gouvernement qui sont actuellement des fonctionnaires professionnels. La politique entrerait ainsi dans tous les ministères. Mais le plus grave reste la situation économique avec la fuite des capitaux pour commencer, qui sera suivi immédiatement par une fuite des cerveaux vers des cieux plus cléments et plus attractifs. L’accroissement du taux de l’euro, passé de 3,40 à 3,80 shekels, est un signe que les devises en euros et en dollars sont en baisse dans les caisses de la Banque d’Israël. L’Allemagne, qui voit son taux de natalité s’effondrer de 1,7 à 1,54, a besoin de compenser la baisse dramatique de sa population et offre donc tous les avantages matériels aux jeunes ingénieurs israéliens qui s’installent dans le pays. Par ailleurs le taux de chômage a augmenté en janvier 2023 à 4,3%. L'augmentation des taux de crédit à 4,25% découragera les investisseurs privés immobiliers et risque de mettre en difficulté quelques petits promoteurs.

L’entêtement politique n’est pas le signe d’une bonne gouvernance. On ne comprend pas ce qui urge à ce point pour modifier le système judiciaire alors que la guerre entre la Russie et l’Ukraine s’éternise avec des conséquences dans la région, que l’Iran fait tourner ses industries et ses centrifugeuses à plein régime, que les startups commencent à souffrir de la situation économique avec des licenciements quotidiens, que le coût de la vie ne cesse de pénaliser les populations défavorisées, que le bâtiment voit son horizon bouché et enfin que la division s’installe dans le pays. Il n’est pas question de positionnement politique de droite ou de gauche mais de réalisme et d’urgence politique. 

5 commentaires:

bliahphilippe a dit…

Le diable dit-on se cache dans les détails que l'on préfère occulter, notamment dans cet article partisan très orienté à gauche  en écho aux manifestations bruyantes de rues.
En premier lieu il serait bon de préciser que la volonté d'opérer cette juste réforme faisait partie du "package" électoral.Pourquoi ne pas le souligner?
Les élections ont été gagnées à une majorité incontestable...et les partis de gauche opposés à cette réforme  ont été laminés.
Au nom de quelle démocratie faut-il se plier ? Celle du peuple exprimée par les urnes ou bien celle revendiquée par les perdants qui soutiennent au nom de leur conception de la démocratie  une poignée de juges non élus appartenant à une même caste s'arrogeant le droit d'annuler sans aucun contre pouvoir des décisions du pouvoir exécutif qui ne sont pas de nature à remettre en cause la notion de démocratie elle même?
En second lieu où est le scandale démocratique d'introduire quelques juges hors du sérail de ceux qui se cooptent entre eux ?
Aux Etats Unis et certainement pas que dans ce pays l'exécutif va plus loin en nommant avec le congrès ou le Sénat leurs plus hauts magistrats de la Cour Suprême.
En France les contre pouvoirs judiciaires face à l'exécutif sont multiples, pas en Israël : Cour de Cassation, Conseil d'Etat et Conseil Constitutionnel dans le cadre desquels sauf erreur l'exécutif a un droit de regard sur une partie de ces institutions. Or en Israël la Cour Suprême cumule à elle seule toutes ces fonctions. Qui d'honnête s'offusquerait du changement désiré au point de le juger "antidémocratique"?
En troisième lieu, l'article omet de rappeler deux faits d'importance  notable :- Les sondages très majoritaires  témoignant de la baisse de confiance sensible de la population envers la  Cour Suprême.- les raisons de cette chute de popularité, exprimées même confusément sont en relation avec le malaise de la" révolution judiciaire" opérée dans les années 80 par le juge Aharon Barak donnant l'impression -mais cela nécessite d'autres longs débats -d'une orientation différente , plus européenne ,disons plus  soucieuse de la notion élargie de démocratie de l'Etat de "tous les citoyens" que de celle de l'équilibre précédent entre Etat Juif et démocratique.
De nombreux arrêts de cette Cour  témoignent de cette (r)évolution dont certains se réjouissent (la minorité) et que d'autres dénoncent (la majorité) .A titre d'exemple, le lecteur qui souhaite mieux s'informer hors propagande se reportera  ci-dessous sur l'analyse de décisions  contestées  donnant une idée de la nature du malaise devenu à présent un sujet d'actualité brûlante .Le lecteur comprendra mieux ce que signifie selon la Cour Suprême dans un état tel que celui d'Israël les notions de démocratie"et de droit élargi  des minorités...au point de mettre en danger l'Etat Juif  et tout au moins de susciter en réaction ledit projet de réforme judiciaire.
 En conclusion, il est impératif que cette réforme aille de gré ou de force jusqu'à son terme malgré les oppositions de gauche ou d'extrême gauche ou de celles du" mur de l'argent" en rappel d'une autre époque. Celle en France à l'époque d'un gouvernement honnête, populaire, de gauche non malsaine  qui n'avait pas cédé! Les anti démocrates d'aujourd'hui ne sont pas du côté que vise la bien pensance et leurs médias !!


https://www.menora.info/la-cour-supreme-face-au-nationalisme-palestinien-en-israel-un-cas-historique-exemplaire-le-cas-azmi-bishara/

Le Rabouilleur a dit…

Dans la vie des affaires, la sécurité juridique est fondamentale, sinon c'est la loi de la jungle.

Georges Kabi a dit…

Cette "reforme" judiciaire n'est pas une rforme, elle est un coup d'Etat destine a innocenter tous les hommes (et femmes) politiques de droite trainant drriere eux (elles) des casseroles.
Mais il y a plus grave, car le Premier Ministre en exercice a signer des accords gouvernementaux qui donnent aux ultra-orthodoxes a peu pres tout ce qu'ils demandaient depuis l'etablissement de l'Etat.
Les resultats de ces manigances son deja la: devaluation rampante de la monnaie nationale, augmentation vertigineuse des prix, ce qui se traduira par une inflation probablement incontrolable car il n'y aura plus d'entrees fiscales avec la fuite de la high-tech, et probablement aussi d'autres activites economiques.
Enfin, cette reforme remet en cause les droits individuels et des citoyens juifs et encore plus des citoyens arabes.
Et tout cela, pour que Bibi soit reconnu lanc comme neige!

Yaakov NEEMAN a dit…

@bliahphilippe
@ Bravo pour votre réponse bien écrite, bien structurée et bien argumentée.
1)Les opposants à la réforme judiciaire n'ont pas compris que la redéfinition des compétences de la Cour Suprême n'a pas pour but de priver les entreprises de leurs profits mais d'empêcher qu'à l'avenir ses décision en matière pénale ne mettre plus en danger la sécurité d'Israël.
2)Papaya va planter ses racines ailleurs ? Très bien.
On va suivre avec attention la cotation de Papaya là où elle va s'installer. Son départ me rappelle une histoire arrivée en Israël à un important investisseur russe, il y a quelques années : persuadé qu'une attaque imminente allait réduire notre p'tit pays en cendres, il effectua aussitôt un transfert de tout ses avoirs vers la City, à Londres, où il s'installa. Un mois plus tard, j'ai lu dans Globes qu'il avait subi une décotte de près de 30%. Moralité ? Quand on déracine un arbre et qu'on le plante ailleurs, il ne faut pas s'attendre à ce qu'il produise la même quantité de fruits.
3) Sans ça, la modération de B.Nétanyahou et sa gestion de la crise sont exemplaires. Quand la tempête gronde, il faut garder son calme et le cap.

Georges Kabi a dit…

Je suis surpris de l'incomprehension totale de ce qui arrive ces jours-ci en Israel.
Toutes les declarations lenifientes de la droite au pouvoir ne sont que des crachats sur ses opposants. Le fake-news est utilise sans vergogne, et on nous prend pour des imbeciles.
Le shekel a ete deprecie de 15% en 3 jours. Cela est bien, on pourra mieux exporter (sic).
Et les retraites, les salaries, les petits fonctionnaires seront les premiers touche. Ce matin, j'ai fait mes courses u supermarche: tous les prix sont a la hausse.
Et je voudrais ici rrappeler que l'inflation est une specialite du Likoud et il fallut a sa direction de faire appel a un homme de gauche pour redresser la situation.
Enfin, trop d'entreprises de la high tech s'en vont ces jours-ci, sans rien dire, a pas feutres. Deja 4 milliard de dollars sont partis sous des cieux plus clements. Bravo, dit Bibi, cela pousse l'economie vers...l'abime. (ca il ne le dit pas, il le sait dans son for interieur. Mais cela n'a aucune importance. Des le moment ou il passe devanxt les tribunaux, que ses casseroles font de plus en plus de bruit, la solution parfaite est d'eliminer les juges.