L’EXTRÊME-DROITE DANS LA TOURMENTE EN ISRAËL
Par Jacques BENILLOUCHE
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L’extrême-droite est dans la
tourmente avec le risque pour certaines formations, qui se présentent seules,
de ne pas dépasser le seuil électoral de 3,25%. Les exclusives vont bon train
tandis que certains leaders ne craignent pas le suicide politique. À droite,
les décisions ne tendent pas vers une consolidation d’une majorité stable.
Netanyahou refuse d’inscrire Ayelet Shaked sur la liste des candidats du Likoud
parce qu’il ne lui pardonne de l’avoir quitté pour créer une structure
concurrente qui n’a pas réussi à servir d’appoint à la coalition. Par ailleurs,
il ne semble pas que les leaders du Likoud veuillent un élément moteur qui
aurait pu booster sa liste.
Baruch Marzel, Ben Ari et Ben Gvir |
À l’extrême-droite des noms d’oiseaux sont échangés entre Naftali Bennet,
accusé de trahison par Moti Yogev, et les dirigeants de son ancien parti,
Habayit Hayehudi : «Bennett n’a pas été loyal envers le sionisme religieux
et les membres de son mouvement. Il a abandonné le parti endetté à hauteur de
millions de shekels». Il l’accuse aussi de ne pas lutter contre le
recrutement des filles dans l'armée et contre les droits LGBT. À force de
vouloir les singer, les sionistes religieux ont rejoint l’extrémisme des
orthodoxes. En écho, Naftali Bennett lui a répondu : «Vous avez transformé
Habayit Hayehudi en un endroit qui n’est dorénavant plus un foyer naturel, et
qui est très éloigné des valeurs du public sioniste religieux ainsi que de
celles du public sioniste laïc». La rupture est donc actée.
Bennet et Shaked |
Naftali Bennet et Ayelet Shaked, qui avaient fondé la Nouvelle droite, se retrouvent
orphelins après avoir été rejetés de toutes parts après avoir critiqué «l’intolérance
qui ne représente pas la communauté nationaliste-religieuse». Leurs anciens
partenaires ont peu apprécié leur campagne axée sur les questions sécuritaires
et surtout la volonté de créer un «partenariat laïc-religieux».
Le parti Zehut de Moshé Feiglin avait obtenu 2,74% en avril 2019 tandis que
Gesher de Orly Levy-Abecassis n’a eu que 1,73%.
Ils ne pourront entrer à la Knesset que s’ils envisagent une fusion avec
une autre liste. Mais Feiglin est exigeant car, s’il veut bien d’une alliance avec
Ayelet Shaked, il n’est pas question
pour lui d’envisager un quelconque lien avec l’Union des partis de droite parce
que «Zehut ne se voit pas comme
faisant partie du sionisme religieux ou de tout autre secteur. La synergie
nécessaire a déjà été créée dans une large mesure. Les concepts de laïc et de
religieux et, dans une certaine mesure, la division dichotomique de droite et
de gauche, ne sont plus pertinents dans la sphère de Zehut».
Habayit Hayehudi et la Nouvelle droite sont encore en danger s’ils se
présentent séparément. Cependant une nouvelle rupture vient d’être entamée. Les factions de l'Union
des partis de droite – qui regroupe Habayit Hayehudi, l’Union nationale et
Otzma Yehudit — sont en pleine querelles intestines et viennent d’exploser non
pas pour des raisons idéologiques mais pour des questions matérielles, en
particulier la course au portefeuille ministériel.
Itamar Ben-Gvir, le représentant d'Otzma Yehudit, vient d’envoyer une
lettre au ministre Rafi Peretz, leader de Habayit Hayehudi, le Foyer juif, pour
l’informer qu’il met fin à son partenariat parce que Peretz n’a pas respecté l’engagement
de démissionner de la Knesset après sa nomination comme ministre afin de
permettre au suivant de liste, Ben Gvir de prendre sa place de député.
Dans leur missive, les
dirigeants d'Otzma ont fait un procès au Foyer juif pour expliquer leur départ
de la droite unie : «Malheureusement, ces derniers mois, nous n’avons
pas reçu de traitement approprié. Vous et les autres responsables du Foyer
juif vous êtes comportés comme si vous utilisiez puis jetez Otzma
Yehudit. Comme vous le savez bien, et comme vous l'avez annoncé vous-même
dans une émission télévisée, l'union entre nous a permis de remporter la
victoire aux élections. Sans le comportement de Lieberman, nous aurions pu
entrer au gouvernement. Malgré tout cela et
malgré le fait que plus de 70.000 électeurs d’Otzma Yehudit ont voté pour
l’Union des partis de droite, le comportement des responsables de Habayit
Hayehudi a malheureusement été scandaleux ces derniers mois».
Il faut rappeler qu’aux élections du 9 avril 2019, l’alliance
a obtenu 159.000 voix et cinq sièges. Pourtant, Benjamin Netanyahou avait permis
à deux députés du même parti, nommés ministres, de quitter la Knesset et de
retrouver leur poste de député à la Knesset s'ils perdaient leur portefeuille. Rafi
Peretz, a refusé de démissionner de la Knesset, entérinant ainsi la rupture définitive.
Il est probable que Benjamin Netanyahou interviendra
pour les réconcilier car une liste
pleinement unifiée est dans son intérêt pour constituer son gouvernement. Mais
les questions personnelles polluent l’atmosphère politique. Certes, il reste
quelques semaines avant le dépôt définitif des listes. Mais certains leaders
politiques ne voient jamais plus loin que leur petit cercle privé. L'intérêt
personnel prime sur l'intérêt national et les querelles de clocher régentent la
vie politique. Il n'y a pas qu'en France que la droite est la plus bête du monde.
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