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mercredi 12 janvier 2011

BILLET D’HUMEUR : J’AI MAL A MON PEUPLE



BILLET D’HUMEUR : J’AI MAL A MON PEUPLE

Par Jacques BENILLOUCHE

Texte radiodiffusé

            Les occidentaux ont toujours qualifié les tunisiens de peuple pacifique et modéré parce que le président Habib Bourguiba avait opté pour l’émancipation de la femme, la réduction de l’influence de la religion dans la vie civile et politique et le pragmatisme dans son approche du conflit israélien. Le pays avait investi pour que sa jeunesse soit instruite et diplômée au point de la voir constamment lorgner vers le Continent. L’éducation était la base de l’ascension sociale parce qu’aucun autre choix n’était ouvert. La réussite des tunisiens, et celle des juifs en particulier, n’était pas une réputation surfaite.

            Cependant, les juifs tunisiens ont déserté leur pays parce qu’ils avaient estimé que la création de l’Etat d’Israël les avaient rendus suspects aux yeux des dirigeants arabes qui les assimilaient tous à des sionistes alors que seule une minorité l’était à l’époque et que la majorité avait résisté aux appels des pionniers. La Tunisie avait décidé de prendre le parti de ses « frères » arabes pour n’en tirer d’ailleurs aucun profit tangible. Elle a au contraire hérité d’une idéologie à forte capacité de nuisance avec ses éléments islamistes les plus néfastes et les plus perturbateurs.

            Mais la colère qui gronde aujourd’hui n’est pas télécommandée par les islamistes car la Tunisie était comparable à une cocotte bouillante dont on avait vissé le couvercle dans l’espoir d’empêcher la fuite des rancœurs, d’étouffer l’aspiration à la démocratie et de briser la volonté de faire partie d’un monde moderne. A l’époque d’Internet et de la télévision la tâche fut difficile et, l’absence de partage des richesses accaparées par une minorité de privilégiés, représentait un suicide politique dont les dirigeants paient le prix aujourd’hui.

            La Tunisie aurait pu comprendre que les riches pétroliers et les potentats ne s’aident qu’entre eux pour que la richesse reste dans un cadre étroit. Elle aurait eu intérêt à s’allier au jeune pays juif qui se créait dans le dénuement le plus complet car ils avaient ensemble une communauté de destin et de misère. Mais  Israël s’est développé tandis que la Tunisie a stagné économiquement. 

            Les diplômés tunisiens auraient pu collaborer avec l’industrie israélienne dans une sorte de mini « silicon Valley » à l’odeur de jasmin car de nombreuses pointures d’origine tunisienne hantent les conseils d’administration des fleurons industriels israéliens et français. Les cadres diplômés auraient pu alors trouver un environnement professionnel en adéquation avec leurs espérances. Mais la politique a pris le dessus sur l’intérêt économique et le pragmatisme politique. Aucun ambassadeur tunisien n’était digne de rejoindre l’Etat d’Israël qui n’existe toujours pas dans les tablettes du palais de Carthage.

            Alors, nul ne se réjouit des moments difficiles que passe la Tunisie et, même si les juifs l’ont quitté depuis de longues années, elle reste ancrée dans les mémoires figées, dans le ciment des fêtes, dans les traditions répercutées de génération en génération, dans les plats culinaires et dans l’accent dont les jeunes ont paradoxalement hérité avec une certaine fierté. Souhaitons seulement que les islamistes ne récupèrent pas à leur profit une situation politique bloquée car alors, la Tunisie que nous avons connue et aimée, n’existera plus que dans notre seul souvenir.       

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