La peur des missiles hypersoniques russes

 

LA PEUR DES MISSILES HYPERSONIQUES RUSSES

 

Par Jacques BENILLOUCHE

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Un chasseur-intercepteur MiG-31 avec le missile aérobalistique hypersonique de haute précision Kinjal

Il ne fait aucun doute que la Russie détient une nouvelle arme redoutable, la première à utiliser en réel sur un champ de bataille. Elle a réussi à mettre en service cette arme dans le secret et dans une certaine ignorance des services occidentaux de renseignements qui pensaient que les essais russes n’avaient pas été concluants. Pour la première fois, la Russie est en avance pratique par rapport à tous ses adversaires sur le plan militaire car il s'agirait de la première utilisation connue en conditions réelles de combat de ce système testé pour la première fois en 2018. Les missiles hypersoniques sont capables d'atteindre une vitesse cinq fois supérieure à la vitesse du son, soit plus de 6.100 km/h. Ils peuvent également manœuvrer en plein vol, ce qui les rend plus difficiles à suivre et à intercepter que les projectiles traditionnels. Certains modèles peuvent transporter des ogives conventionnelles ou nucléaires.

Le missile Kinjal, utilisé par la Russie, est un gros missile qui peut porter une charge conventionnelle d'environ 500 kg. Il a potentiellement une portée plus importante de 1.000 à 3.000 kms selon le vecteur qui le porte mais surtout une grande précision. Les missiles «Kinjal» et ceux de croisière «Zircon», tirés depuis des navires de surface et des sous-marins, appartiennent à une famille de nouvelles armes que Vladimir Poutine qualifie «d’invincibles».  Le planeur hypersonique Avangard, le plus perfectionné, peut emporter une charge nucléaire et voler jusqu'à 33.000 km/h en changeant de façon imprévisible de cap ou d'altitude pour le rendre impossible à intercepter. Lancé de très loin avec une précision extrême, il a une capacité de pénétration et une puissance destructrice plus importantes, en raison de sa très haute vitesse. Les anti-missiles sont inefficaces contre ces matériels hypersoniques.

Il ne s’agit pas d’une technologie nouvelle car le premier missile hypersonique, le KH-45, a été conçu par l’Union soviétique dans les années 1970 mais il a toujours raté son lancement au point qu’il a été retiré de l’arsenal actif. Les États-Unis ont suivi le mouvement le 18 novembre 2011 quand la première arme hypersonique avancée (AHW) a été testée avec succès par l'armée américaine. Lancé d'Hawaï, le missile a atteint sa cible dans les îles Marshall à plus de 3.700 km, en moins de 30 minutes. La Chine a été le deuxième pays à atteindre avec succès des vitesses hypersoniques lors de son test de missile en 2014, puis la Russie a annoncé son premier missile en 2018. L’Inde, aidée par Israël, a développé avec succès son Hstdv (Hypersonic Technology Demonstrator Vehicle). Israël n’est pas en reste puisque son missile hypersonique «Arrow 3» est développé par les industries aéronautiques depuis 2011. 

Le risque de ces missiles hypersoniques est significatif car ils peuvent être utilisés pour lancer des ogives nucléaires. Le Traité sur les missiles antibalistiques, signé par les États-Unis et l'Union soviétique en 1972, limitait les deux parties à seulement 100 missiles antibalistiques. Mais ce traité est obsolète depuis la dissolution de l'Union soviétique.

Test arrow israélien

Israël vient de réussir le test de son système antibalistique Arrow-3. Le ministère de la Défense a achevé un essai en vol d’un système de défense antimissiles balistiques conçu pour intercepter des missiles balistiques en dehors de l’atmosphère terrestre. Pendant ce temps il continue à développer et à tester avec les Américains le bouclier antimissile balistique Arrow-4. Selon les tests, le radar de l’Arrow a identifié sa cible et a transmis des données au centre de contrôle pour analyse, et un lancement précis. Une fois l’étalonnage terminé, deux missiles Arrow-3 ont été lancés vers la cible et ont terminé leur mission avec succès.  Pour le ministre de la Défense, Benny Gantz : «Nos systèmes défensifs et nos industries de défense préservent la capacité d’Israël à se défendre contre les menaces régionales croissantes, nous donnant ainsi la liberté d’agir de manière offensive contre nos ennemis».

Si ces armes n'offrent pas de réel avantage stratégique pour les Russes, elles ont en revanche un effet psychologique immédiat car le fait d’utiliser des missiles hypersoniques témoigne de la part de la Russie de montrer qu’ils dominent le sujet et qu’ils sont au-dessus du lot mais c’est surtout pour pallier les déficiences actuelles de l’armée russe. Il ne s’agit pas de révolution dans l’armement actuel mais une volonté de prouver que, jusqu’à preuve du contraire, les armements occidentaux ne sont pas capables de contrer ces missiles hypersoniques sauf preuve du contraire.