Guerre Ukraine |
Paul Valéry |
La vraie raison de son obstination est, leur dit-il, l’effet
dévastateur de l’erreur d’appréhension de cette notion. Surtout en ces temps de
choix électoral et plus encore de tragédies. Erreur aux plans général et
particulier.
L’erreur est d’abord fondamentale. L’identité n’est pas un état,
mais un mouvement. Il ne s’agit pas de reproduire la Gaule mais d’inventer la France
des temps nouveaux. Israël n’est pas reproduction d’une histoire magnifiée,
mais concrétisation d’une volonté contemporaine. L’identité n’est pas un acquis
à mettre en conserve mais une création permanente, pas l’histoire à vénérer
mais le présent à optimiser. «L’histoire justifie ce que l’on veut. Elle
n’enseigne rigoureusement rien», écrit Paul Valéry.
La première erreur de Poutine dans sa reconquête sanglant de
l’Ukraine est d’abord historique. Paul Valéry enfonce le clou dans le cercueil
de l’illusion du boucher russe : «Le système des causes qui commande le
sort de chacun de nous, s’étendant désormais à la totalité du globe, le fait
résonner tout entier à chaque ébranlement». L’identité n’est pas un
embaumement mortifère, mais une force de vie créatrice. Elle n’est pas subie,
elle est un choix. Les populations africaines arrivant en Europe, confrontées à
une double appartenance, doivent pour s’intégrer, privilégier la nouvelle sans
oublier, en second rang, l’originaire. Comme la minorité arabe d’Israël doit
savoir, de son côté, hiérarchiser ses appartenances en choisissant clairement
la nationalité israélienne, sans pour autant renier sa proximité à la
population palestinienne.
L’identité n’est pas réduction à un facteur prédominant unique,
mais fédération et mobilisation de composants multiples. Elle n’est pas enfermement
mais ouverture. L’exploitation d’une thématique surdimensionnée pour cause
électorale, comme celle du grand remplacement, ne fait de son initiateur
ni un concentrateur de forces présentes, ni un constructeur du futur.
Jonathan reprit son souffle… et reprit vite afin d’éviter le risque
de surexposition. L’erreur identitaire produit tous ses effets néfastes dans ses
applications particulières. Premier exemple, la mixité galopante des populations.
Plus spécifiquement le flux continu, irrépressible car naturel, d’immigration. L’opposition
féroce à ce mouvement brandit très haut le drapeau de la défense de la pureté
d’identité. Erreur double qui ne fait que cacher la solution à une
interrogation légitime en soi. Double car les identités sont toujours, elles-mêmes,
l’aboutissement de mixités historiques. Ce qui ne les rend pas plus impures que
pures.
Car, aussi, l’enfermement identitaire perturbe et parfois empêche,
l’enrichissement réciproque que le mixage de populations produit
inévitablement. La réussite de la mixité tient en effet dans l’existence et la
qualité du package d’accueil des arrivants. Mais pas seulement. Dans la faculté
de connaître, de partager les cultures, les histoires, les traditions, dans un
esprit d’ouverture, de curiosité. Autrement dit, l’art de transformer le danger
en chance. L’application peut être étendu à l’Europe. Qui a tout à gagner dans la conjugaison des États-nations.
Comme chaque nation européenne a à gagner dans l’inévitable processus de
construction européenne. Exemple conforté par la mise en œuvre des Accords
d’Abraham, au nom si approprié.
Transformant l’affrontement des histoires, traditions, cultures
identitaires, en une œuvre commune de réalité identitaire moyen-orientale.
Heureux d’avoir pu aller au bout de l’explicitation d’un sujet, pour lui majeur, du niveau d’attention finalement atteint, il conclut en faisant, la main levée, le V de cette petite victoire. Victoire vite douchée par l’injonction de Nathalie, une participante à l’identité personnelle clivante, Dis-nous, monsieur l’expert, quelle est notre identité commune, à nous, groupe plein de valeurs ? Il prit le temps de se gratter le crâne, puis, lentement, énonça le verdict : Vous êtes les chevaliers de la libre parole. Pour ajouter, rapidement cette fois, Et toi, Nathalie, tu en es la grande cheftaine. Déclenchant une joyeuse ola miniature.
1 commentaire:
Les peuples - et leurs dirigeants - ont une représentation d’eux-mêmes et des autres peuples qui peut durer des générations. Quand une génération est maudite pour sa conduite, sa descendance est maudite aussi, pour cette raison que la représentation perdure.
Quand l’Allemagne se voit comme le phare de l’Europe, ou que la Russie se voit comme l’Empire chrétien Eurasien… ça dure longtemps. Et nous nous les voyons comme des barbares violents et prédateurs.
Une bonne nouvelle : les Français et les Juifs se voient comme le phare des nations.
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