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dimanche 10 février 2019

Rupture consommée entre le Fatah et le Hamas



RUPTURE CONSOMMÉE ENTRE LE FATAH ET LE HAMAS

Par Jacques BENILLOUCHE
Copyright ©  Temps et Contretemps

Hamdallah-Abbas

Après la démission du premier ministre palestinien Rami Hamdallah, le 29 janvier 2019,  le Comité central du Fatah avait décidé de former un gouvernement composé uniquement de factions de l'OLP et sans participation du Hamas. Mahmoud Abbas a trouvé ce moyen pour isoler les islamistes du Hamas qui contrôlent la bande de Gaza. Le consensus national est ainsi définitivement enterré, à la grande joie des Israéliens qui voient s’éloigner toute possibilité de création d’un État palestinien en Cisjordanie et à Gaza. 


Comité central du Fatah
Le 27 janvier, le Comité central avait recommandé la dissolution du gouvernement. Le premier ministre reconnaît ainsi son échec dans sa tentative de réconciliation avec le Hamas. En fait cette décision était prévisible depuis que la Cour constitutionnelle suprême avait décidé, le 12 décembre 2018, de dissoudre le Conseil législatif palestinien (PLC) entièrement dominé par le Hamas et d’organiser de nouvelles élections législatives. 
Cependant les dirigeants du Fatah souhaitent choisir une autre personnalité que Hamdallah qui paie ainsi son incapacité à reprendre en main Gaza. Trois candidats émergent de la liste. Mohammad Shtayyeh, membre du Comité central et président du Conseil économique palestinien pour le développement et la reconstruction, Saeb Erekat, membre du Comité central et secrétaire du Comité exécutif de l'OLP et enfin Mahmoud al-Aloul seraient les finalistes d’un choix imposé en fait par Mahmoud Abbas. Le président de l’Autorité a besoin de nouvelles personnalités pour faire face au nouveau gouvernement israélien qui sortira des élections du 9 avril 2019.
Mohammad Shtayyeh

Loin est le temps où le Hamas et le Fatah cosignaient un accord, le 23 avril 2014, au domicile d’Ismaël Haniyeh à Gaza. Tout était prévu pour la tenue d'élections législatives et présidentielles ainsi que d'élections de conseils locaux dans un délai de six mois. La situation n’a pas évolué et Hamdallah est accusé non seulement d’avoir échoué à amener le Hamas devant les urnes mais aussi d’avoir été à l’origine des crises internes menant à des manifestations chez les Palestiniens. 
Pour mettre fin à l’agitation populaire, Mahmoud Abbas a été contraint d'arrêter la mise en œuvre de la Loi sur la sécurité sociale entrée en vigueur en octobre 2018  qui avait été approuvée par le gouvernement. Il a exigé «la poursuite du dialogue entre toutes les parties concernées afin de parvenir à un consensus national Loi et date d'entrée en vigueur».  
Manifestation contre la loi sur la sécurité sociale

Le Fatah avait donc trouvé un alibi pour obtenir le renvoi de Hamdallah de son gouvernement et pour faire pression pour la formation d'un gouvernement sans le Hamas. Le Fatah n’attendait que cette opportunité depuis sa défaite aux élections législatives de 2006. Jamal Hawil, membre du Conseil révolutionnaire du Fatah, s’est ainsi justifié : «La situation palestinienne nécessite un changement de gouvernement pour répondre aux demandes de la rue palestinienne, en particulier à la lumière des performances médiocres du gouvernement de certains ministres. Toutes les factions de l'OLP doivent assumer la responsabilité de ce qui se passe». 
Abdullah Kamil, autre membre du Conseil révolutionnaire du Fatah, a constaté que la réconciliation avec le Hamas était dans l’impasse : «Il est nécessaire de passer d'un gouvernement de consensus national à un gouvernement d'union nationale pour mener à bien ses tâches en vue des prochaines élections. Le prochain gouvernement serait formé principalement du Fatah, des factions de l'OLP et de certains indépendants. Le nouveau gouvernement verra bientôt la lumière».
Mais tout n’est pas si limpide car le FPLP (Front populaire de libération de la Palestine) et le DFLP (Front démocratique de libération de la Palestine) s’opposent à la création d’un tel gouvernement car il veulent d’abord résoudre les raisons de la scission interne : «Des mesures sérieuses sont nécessaires pour mettre en œuvre le rapprochement. Le président Abbas devrait convoquer une réunion urgente du comité de développement de l'OLP et former un gouvernement d'union nationale composé de toutes les factions, y compris du Hamas, pour superviser les élections générales». On sent bien un dialogue de sourds au sein des factions de l’OLP qui estiment indispensable la création d’un gouvernement intérimaire approuvé par tous, y compris le Hamas et le Djihad islamique.
Feu l'accord Fatah-Hamas

Mahmoud Abbas veut passer outre et former son gouvernement avec quelques clans qui lui sont fidèles : le FLP (Front de libération de la Palestine), le Front de libération arabe, le Front de lutte populaire et des personnalités indépendantes. Il s’appuie pour cela sur l’article 65 de la Loi fondamentale de 2003 qui précise que le président de l'Autorité désigne le Premier ministre pour former un gouvernement dans les trois semaines à compter de la date de sa nomination. Il aura un droit à une prolongation maximum de deux semaines. L'article 66 prévoit que le Premier ministre soumet son gouvernement à un vote de confiance du CLP. Cette procédure n'a toutefois jamais été appliquée depuis la division entre la bande de Gaza et la Cisjordanie.

Mais la décision finale de dissoudre le gouvernement actuel ou de demander la constitution d’un nouveau gouvernement et de désigner le Premier ministre, incombe à Mahmoud Abbas. Il temporise car les élections israéliennes désigneront un nouveau gouvernement qui aura pour rôle principal de se pencher sur le plan de paix de Trump  qui ne recueille pas de majorité  au sein du Likoud et de ses associés nationalistes.
En cas de défaite de Netanyahou, le centre et bien sûr la gauche seraient plus attentifs aux propositions américaines impliquant la création d’un État palestinien sur la moitié au moins de la Cisjordanie. Quoi qu’il en soit, Netanyahou ou son successeur devront trouver une solution conforme aux intérêts israéliens, faute de quoi elle sera imposée par Donald Trump qui tient à supprimer l’abcès de fixation du conflit israélo-palestinien pour mieux s’occuper de l’Asie qui reste sa préoccupation principale. La question de Gaza est quasiment réglée avec l’acceptation d’une «entité» islamique indépendante. Cependant le dogme de deux États pour deux peuples a été réduit à sa plus simple expression.

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