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mardi 6 février 2018

Gaza commence à craindre le pire


GAZA COMMENCE À CRAINDRE LE PIRE
Par Jacques BENILLOUCHE
Copyright © Temps et Contretemps
            

          Il est difficile pour Israël de rester passif devant les tirs de roquettes en provenance de Gaza et les attentats au couteau contre les civils en Cisjordanie, transformés en haut fait d’armes par les Palestiniens. La lâcheté semble être une constante de fabrique. Le Hamas sent que la capacité de résilience d’Israël a atteint ses limites. Alors bien sûr, les islamistes de Gaza s’attendent à tout instant à une réaction «disproportionnée» aux attaques inacceptables du Hamas.



            Un exercice militaire conjoint, sous le nom de code Juniper Cobra, se déroulera prochainement entre Israël et les États-Unis en territoire israélien, près de la frontière de Gaza. Ces manœuvres biennales, qui simuleront un conflit majeur dans lequel Israël serait attaqué par des milliers de missiles, visent selon les responsables militaires israéliens, à «améliorer le niveau de préparation militaire d’Israël».
         Si l’on s’inspire du même exercice de 2016, alors au moins 3.200 soldats de l’armée israélienne et du Commandement des forces des États-Unis en Europe (EUCOM) prendront part à la manœuvre Juniper Cobra. Il s’agit cette année de tester la précision des systèmes de défense antimissiles d’Israël vis-à-vis des missiles balistiques à longue portée.
            Le Hamas craint que ces exercices militaires ne se transforment en offensive contre Gaza. Alors tous les groupes terroristes sont sur le qui-vive et se préparent à contrer une éventuelle guerre. Yahia Sinwar, leader du Hamas, a donné des instructions à ses troupes pour préparer la résistance sur le terrain sachant que, selon Tsahal, les exercices simuleront une guerre sur plusieurs fronts avec le tir de milliers de missiles sur des zones civiles. En prévision d’une attaque, les forces islamiques ont installé des postes de surveillance dans toute la bande de Gaza.
Daesh au Sinaï

            Il faut dire que le Hamas s’inquiète de l’encerclement qu’il subit face à la collaboration de moins en moins discrète entre Israël et l’Égypte. En effet, des informations sécuritaires font état de raids de l’aviation israélienne contre les terroristes du Sinaï à la demande de l’Égypte. Ces frappes semblent durer depuis deux années au moyen de chasseurs, d’hélicoptères de combat et de drones qui agissent sans aucune identification israélienne. Elles ont permis à l’armée égyptienne de contenir les actions terroristes des djihadistes et de consolider ses positions militaires au Sinaï. Le Hamas craint que cette nouvelle alliance avec l’Égypte ne se fasse sur son dos. L’objectif évident d’Israël est bien sûr de sécuriser au mieux ses frontières. Une recomposition des alliances s’exprime au grand jour dans la région.


            Le Hamas anticipe donc des assassinats ciblés israéliens. Les brigades Ezzedine El Qasem, la branche armée du Hamas, ont mobilisé leurs miliciens en prévision d’une éventuelle et soudaine frappe militaire israélienne pendant les manœuvres militaires à grande échelle à la frontière de Gaza. Elles ont élaboré des plans d'urgence défensifs selon différents scénarios. Ces plans ont été distribués aux forces de sécurité et aux forces militaires. Des points de contrôle ont été installés pour renforcer la sécurité des frontières terrestres et maritimes de Gaza car le Hamas craint l’infiltration d’agents de sécurité du Shin Bet ou de «collaborateurs» qui pourraient organiser des assassinats.
Sinwar et Haniyeh

            Depuis que les Etats-Unis ont inscrit Ismail Haniyeh, chef du bureau politique du Hamas, sur la liste terroriste, son élimination reste une hypothèse plausible. Le Hamas se justifie en précisant qu’il y a une recrudescence des vols d’avions de reconnaissance israéliens au-dessus de la bande de Gaza ; ce qui est pour lui un signe.
            Certes il est peu probable qu'Israël déclenche une guerre, du moins pour l'instant, mais la confrontation n’est que retardée. Benjamin Netanyahu a effectivement déclaré que son gouvernement «ne cherche pas la guerre mais qu'il fera tout pour défendre le pays. Comme je l'ai dit clairement au président Trump et plus tard aux dirigeants européens et au président Poutine, notre présence ici est le principal facteur empêchant l'expansion de l'islam radical, dirigé par l'Iran et l'État islamique au Moyen-Orient».
            Les responsables militaires israéliens font une autre analyse en fonction des informations qui leur parviennent. Ils ont prévenu le gouvernement que la détérioration des conditions humanitaires et économiques à Gaza pourrait conduite à une nouvelle guerre. Si la crise humanitaire se poursuivait, Israël serait entraîné dans une nouvelle série de combats imposés par le Hamas pour masquer son échec de gouvernance.
            Tsahal a conseillé au gouvernement d'envoyer de la nourriture et des médicaments dans la bande pour éviter que la détérioration des conditions de vie ne pousse à une confrontation militaire. Mais Avigdor Lieberman conteste le point de vue des militaires sans remettre en question la situation difficile dans la bande. Selon lui, cela relève de la seule responsabilité du Hamas et il nie qu'il y ait une crise humanitaire globale à Gaza.

            Tsahal confirme cependant sa conviction que le Hamas n'est pas intéressé par l’ouverture d’un nouveau conflit avec Israël, sauf en cas d’effondrement économique. Le gouvernement israélien veut dissuader le Hamas, et du même coup le Hezbollah, d’entreprendre une quelconque action contre le pays. Alors pour éviter la guerre mais garder la pression sur les organisations terroristes, le recours à des assassinats ciblés devient une arme redoutable et dissuasive. Mais Israël veut limiter leur usage car ils ont nui à son image à travers le monde. Si ces opérations permettent à Israël de gagner en efficacité en limitant les dégâts collatéraux, en revanche le prix moral à payer est élevé. C'est le dilemme d'Israël.

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