UN GRAND JUIF NOUS A QUITTÉS
La chronique de André NAHUM
Judaïques F.M
Judaïques F.M
Il est habituel
qu’une personne décédée soit couverte de louanges quoi qu’elle ait fait de son
vivant. «Le mort, ses jambes s’allongent» disait-on chez moi. «Il est
plus grand mort que vivant» s’est écrié un roi de France devant le cadavre
du duc de Guise.
Réactions
diverses
Le décès
d’Ariel Sharon après ses huit années de
coma n’a pas suscité partout les mêmes réactions. Si tout le monde s’accorde
pour reconnaitre qu’il fut un génie militaire, il est par contre blâmé un peu
partout pour les massacres en 1982 des
camps palestiniens de Chabra et Chatilla, dont on lui fait porter à tort la
responsabilité alors qu’il est le fait des forces libanaises sous l’autorité de Elie Hobeika ; et par
ailleurs une frange de la population israélienne ne peut lui pardonner
l’évacuation en 2005 de la bande de Gaza alors qu’il était premier
ministre.
La fête à Gaza |
Les réactions
du monde arabe allant quant à elles de l’indifférence aux explosions de joie
comme à Gaza où des bonbons ont été distribués dans les rues. Voyons cela de
près : Durant la
guerre de Kippour en 1973, les Égyptiens avaient forcé les lignes israéliennes
et menacé le cœur vital du pays tandis que les Syriens attaquaient sur le
Golan. Israël se trouvait dans une
situation extrêmement difficile et sa survie était en jeu.
Sharon durant la guerre de Kippour |
C’est alors que le
général Sharon, qui s’était déjà distingué dans toutes les guerres que son pays
eut à mener depuis sa déclaration d’indépendance, passant outre les ordres de ses
supérieurs civils et militaires entreprit une manœuvre d’une audace folle que l’on étudiera longtemps dans les écoles
militaires. Avec les quelques tanks dont il disposait, il traversa le canal de
Suez, contourna les Égyptiens par le sud, les encercla, coupant leurs lignes de ravitaillement et arriva à cent kilomètres du Caire.
Un exploit
surprenant, impensable, qui donna la
victoire à Israël ! Sous la pression des Américains il dut stopper sa
progression, se vit obligé de ravitailler lui-même l’armée ennemie prise au
piège et d’éviter ainsi sa reddition. L’Etat juif était sauvé et Ariel Sharon
inscrivait son nom auprès des plus grands stratèges militaires de l’Histoire.
Des
zones d’ombre
Mais il y eut aussi des
zones d’ombre :
Massacres de Chabra et Chatilla |
1) Sabra et Chatilla.
1982 : Les
Israéliens campaient dans la banlieue de Beyrouth. Béchir Gemayel, leur allié,
élu président de la république libanaise venait d’être assassiné ainsi que ses
compagnons dans un terrible attentat dont les auteurs étaient faciles à identifier
: Les Palestiniens et les Syriens. Ce drame ne pouvait laisser indifférentes
les milices chrétiennes qui voyaient s’effondrer les plans qu’elles avaient
édifiés avec leurs alliés israéliens pour redessiner un Moyen-Orient nouveau.
Elles voulurent
se venger. Sharon eut la faiblesse d’accepter qu’elles pénètrent dans les camps
palestiniens à la recherche de 200 combattants qui s’y étaient réfugiés. Il ne
pouvait pas imaginer que ses alliés chrétiens se livreraient à un tel massacre
n’épargnant ni les femmes, ni les enfants, ni les vieillards. Il ne s’était pas
méfié et c’est bien là sa faute. Désigné comme indirectement responsable par
une commission israélienne, il fut obligé d’abandonner son poste de ministre de
la défense. Ni les Palestiniens, ni les Arabes en général ni l’opinion mondiale
ne le lui ont jamais pardonné ce drame.
Evacuation par la force |
2) L’évacuation des habitants juifs du Goush
Katif à Gaza en 2005 lui valut l’inimitié et même la haine d’une partie de la
population. Ses opposants ne pouvaient pas comprendre ni admettre que l’homme
qui avait le plus milité pour la création d’implantations juives dans les
territoires occupés arrache brutalement à leurs foyers, à leurs champs, à leurs
écoles, à leurs synagogues, à leurs cimetières, 7.000 personnes qui s’y étaient installées depuis une quarantaine
d’années. En fait, Ariel Sharon avait compris
que le rêve du grand Israël devait être abandonné car il était irréalisable et il recherchait un
accord avec les Palestiniens.
Le Hamas à Gaza |
Comme il avait
pris brusquement, 32 ans auparavant, la décision de franchir le canal de Suez,
il décida aussi avec la même impétuosité
que la présence de quelques milliers de Juifs à Gaza au milieu d’un million
d’Arabes hostiles ne justifiait pas tant
de dépenses et la présence de tant de soldats pour les protéger. Il n’est pas
dit non plus qu’il ne voulait pas, par ce cadeau inattendu fait aux
Palestiniens, tester leur fiabilité et leur volonté de vivre en paix aux côtés
d’Israël.
Les faits ont
hélas démontré que loin de faire de ce bout de terre un nouveau Singapour, au
lieu de profiter des installations laissées par les Israéliens pour créer les développer et en créer des nouvelles, de
développer le tourisme, d’améliorer les conditions de vie de la population, le
Hamas qui y prit le pouvoir en fit un camp retranché braqué sur Israël,
dépensant en création de tunnels et en achat de missiles, l’argent, de l’aide internationale. On
comprend que cette expérience désastreuse, mais probablement nécessaire puisse rendre encore plus méfiants les
Israéliens qui négocient actuellement avec l’Autorité Palestinienne.
L’Histoire
retiendra certainement d’Ariel Sharon
qu’il fut un très grand soldat, qu’il a
sauvé Israël du désastre en 1973, qu’il
a consacré sa vie à sa terre et à son peuple qu’il a aimés passionnément
et que, comme Itzhaq Rabin, il a réalisé
après ses brillants exploits militaires que les guerres même victorieuses n’arriveraient pas à elles seules à régler le
conflit avec les Palestiniens. Un grand homme, un grand Juif nous a quittés.
Que son souvenir soit béni !
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