L’AFFAIRE INQUIÉTANTE DU DRONE ESPION
Par Jacques BENILLOUCHE
L’affaire du drone d’origine inconnu, qui a été abattu par l’aviation
israélienne le 6 octobre au-dessus du Néguev, est prise très au sérieux par les
autorités militaires. Il s’agit d’une faille sévère dans les services israéliens
de détection aérienne puisque le drone a pu voler en Méditerranée, s’introduire
par Gaza et pénétrer dans l’espace aérien israélien après avoir eu le temps
d’observer et certainement de filmer pendant trente minutes. Quatre F-16 ont
été à sa rencontre pour l’abattre au-dessus de la forêt de Yatir. On imagine le
risque encouru par Israël si le drone disposait d'une charge
explosive ou chimique.
Victoire du Hezbollah
Les israéliens sont
convaincus que cette opération a été coordonnée par le Hezbollah, avec l’aide
technique des Gardiens de la révolution iraniens qui occupent une partie du
Liban-Sud. Tsahal se défend en arguant qu’il n’y a eu pour lui aucune surprise,
que le drone avait été détecté dès le départ et que la décision de le détruire
avait été retardée pour éviter des dommages collatéraux civils dans les régions
qu’il survolait.
En effet, selon la porte-parole de l’armée israélienne, Avital Leibovich : «ce drone a été repéré au-dessus de la Méditerranée dans un secteur proche de la bande de Gaza, avant son entrée dans l’espace aérien israélien, et des appareils de l’armée de l’air l’ont ensuite escorté. Le drone a été suivi depuis le début jusqu’à ce que la décision soit prise de l’intercepter et de l’abattre pour des raisons opérationnelles et de sécurité au-dessus de la forêt de Yatir, dans le nord du désert du Néguev, un secteur inhabité». Cependant le drone a eu le temps de survoler la base aérienne de Nevatim au Néguev.
Si le Hamas était impliqué dans l’opération, il aurait alors passé outre aux instructions de l’Égypte et du Qatar qui lui ont
conseillé de ne pas s’engager dans des provocations contre Israël. Gaza
s’attend à des représailles puisqu’il a mobilisé des forces de réserve, a placé
des barrages routiers pour limiter le trafic civil et permettre aux forces
militaires de se déployer librement en cas de conflit.
Test de la défense aérienne
La détection à temps
d’un objet volant non identifié fera donc l’objet d’études et d’analyses de la
part des services israéliens qui semblent avoir été surpris par l’audace du
Hezbollah. Et pourtant, dès le 20 juillet, Hassan Nasrallah avait mis en garde
les israéliens sur une probable opération exceptionnelle : «Le mouvement de résistance va surprendre
Tel-Aviv dans une guerre future.» Il a tenu son engagement en filmant les
bases israéliennes du sud et la station radar américaine du Néguev.
Il n’était pas chargé d’une mission de
destruction. Il devait éprouver la fiabilité des procédures israéliennes de
contrôle aérien avec pour mission de détecter les signatures électroniques de
la défense aérienne du réacteur nucléaire de Dimona et celles de la station
américaine qui a pour fonction de protéger Israël contre une attaque de missiles balistiques
iraniens. Le drone aurait donc réussi à percer les lacunes du système du
bouclier.
Général Amir Ali Hajizadeh |
On s’explique à présent
la déclaration du général iranien Amir Ali Hajizadeh qui avait prévenu les
occidentaux le 23 septembre qu’il était prêt à lancer des opérations
préventives contre Israël. Le survol du territoire sud par le drone a été un
test réussi de réactivité des services israéliens de défense aérienne et la
preuve qu’une telle attaque pouvait être envisagée. Il semble que Tsahal ait
attendu les ordres du ministre de la défense pour abattre le drone mais Ehud
Barak a tardé à les délivrer car il voulait neutraliser le drone par des moyens
électroniques afin de le récupérer intact pour analyser ses performances et
connaitre son origine. A présent, il ne reste que des débris épars à analyser pour les
faire parler.
Il est évident que le
Hezbollah ou les iraniens ont fait preuve d’une audace dans ce qui pourrait
être considéré comme une provocation militaire pour ne pas dire un acte de
guerre nécessitant des représailles à la hauteur de l’enjeu. Les américains se
sentent eux-aussi très concernés par cette intrusion qui a mis à mal leurs procédures de
détection dans leur base radar. Ce vol de drone peut être considéré comme une
réussite indéniable des iraniens qui masque leur échec dans la
fuite du caméraman officiel du régime.
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