COUP DE MAITRE
DE LA CIA CONTRE L’IRAN
Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps
Le
récent sommet de l’ONU a été émaillé d’un épisode rocambolesque. La délégation iranienne était accompagnée du caméraman officiel du président
Ahmadinejad, très proche du pouvoir iranien. Hassan Gol Khanban suivait et
filmait la délégation et son président. Il avait préparé pour la fin du voyage
un tournage d’une émission à la gloire du dictateur qui devait montrer comment il brillait sur la scène internationale. Cette émission n’a jamais été
tournée car le caméraman s’était envolé dans le secret le plus total.
Déserteur
Téhéran
le considère comme un déserteur dont les options politiques iraniennes avaient évolué.
Son avocat Paul O’dwyer estime que : «Hassan
Golkanbhan n'est pas perçu comme étant un partisan ou un opposant du régime
iranien, mais comme quelqu’un qui a trahi le régime et qui n’est plus digne de
confiance». Khanban avait travaillé pour la télévision d'État iranienne
IRIB pendant plusieurs années.
Ali Reza Asghari |
Cette
défection est considérée comme la plus importante depuis la disparition en 2007
en Turquie de l’ancien ministre adjoint iranien de la Défense, Ali Reza Asghari.
Entourée de mystère, elle avait alors fait l’objet d’intenses spéculations dans les
hautes sphères du pouvoir à Téhéran qui avait accusé les renseignements
occidentaux de l’avoir enlevé. Les médias israéliens avaient suggéré que son
rapt était l’œuvre du Mossad alors que plusieurs médias américains, dont le
Washington Post, parlaient d’une défection vers l’occident. Asghari était le
conseiller en chef du ministère de la Défense iranien «pour les affaires stratégiques et les achats d’armement».
Cette
nouvelle affaire est d’autant plus sensible que Hassan Golkanbhan détenait une
mine de renseignements touchant les sites nucléaires et les bases de missiles à
l’occasion des visites d’Ahmadinejad et des déplacements du guide suprême, l'ayatollah
Ali Khamenei. En quittant Téhéran, il avait emporté les plans intérieurs du
complexe nucléaire de Natanz, de l'usine souterraine d'enrichissement Fordo, du
complexe militaro Parchin et du petit réacteur de recherche Amir-Abad à
Téhéran. Il avait filmé et enregistré les exposés des chefs des Gardiens de la
Révolution et du responsable en chef de l’exploitation nucléaire.
Une
année de préparation
Son
voyage avait été minutieusement préparé avec l’aide des services de
renseignements occidentaux puisque, dès la fin septembre, sa femme et ses deux
enfants s’étaient déplacés en Turquie sous prétexte de rencontrer la famille.
Sa famille a été immédiatement mise sous protection d’agents de sécurité
israéliens, collaborant avec la CIA, et
certaines indiscrétions précisent qu’elle aurait été exfiltrée en Israël avant son
transfert en toute sécurité aux États-Unis.
Le «déserteur» n’était pas uniquement un artiste spécialiste des
médias mais un militant fidèle du Bassidj, la force paramilitaire iranienne fondée
par l'ayatollah Khomeiny en 1979 afin de fournir des jeunes volontaires
populaires aux troupes d'élite dans la guerre Iran-Irak. Les Basij sont
actuellement une branche des Gardiens de la Révolution islamique. Cela rend plus critique la fuite de ce proche du régime iranien.
Il
avait déjà contacté les américains lors de son précédent voyage à New-York où
les modalités de sa fuite avaient été arrêtées. Il reçut alors la mission de
copier et de stocker des films et des photos compromettantes pour le régime de
Téhéran. Il vient de demander l’asile politique aux États-Unis qui lui a été accordé
mais en attendant, l'homme vit caché pour éviter les éventuelles représailles.
Téhéran n’a pas fait de commentaire mais le coup est dur pour un régime qui
subit depuis quelques temps les déboires des virus Stuxnet et Flame et de l’assassinat
de savants nucléaires qui ont ralenti le projet nucléaire pour plusieurs mois. Cette
affaire prouve que les américains n’ont pas désarmé et qu’ils comptent s’attaquer
au programme nucléaire par leurs propres méthodes, moins militaires.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire