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mardi 11 avril 2023

La dépendance d'Israël vis-à-vis du pétrole kurde


LA DÉPENDANCE D’ISRAËL VIS-À-VIS DU PÉTROLE KURDE


Par Jacques BENILLOUCHE

Copyright © Temps et Contretemps

          


        On ignore généralement qu’Israël importe du pétrole brut depuis la frontière nord de l’Irak contrôlée par les Kurdes qui cherchent à construire un territoire autonome qui engloberait l’ensemble de toutes les zones peuplées de Kurdes. Cette zone est très riche en pétrole, poussant les autonomistes kurdes à tenter d’établir sa frontière d’avec le reste de l’Irak. Les reconfigurations territoriales internes qui ont marqué l’Irak au cours des trois décennies passées demeurent extrêmement changeantes et imprévisibles, et répondent à des rapports de forces qui peuvent basculer rapidement.




            Cependant depuis le 25 mars, le flux de pétrole brut en provenance des Kurdes a été temporairement suspendu. Il ne représente certes que 400.000 barils/jour, soit 0,5% de l'approvisionnement mondial en pétrole. Il semble que le gouvernement fédéral irakien et le GRK (Gouvernement régional kurde) seraient parvenus à un accord pour reprendre les exportations par la route du Nord. Mais cet arrêt temporaire a mis en évidence la dépendance d’Israël vis-à-vis du pétrole du Kurdistan et le risque sur la sécurité énergétique israélienne. Au cours des trois premiers mois de cette année, 40% des approvisionnements en pétrole d'Israël provenaient du Kurdistan irakien, soit près du double de la proportion en 2022. Israël a importé environ 183.000 barils/jour en février, soit plus de cinq fois le volume au cours du même mois l'année dernière, sachant qu'Israël a consommé environ 210.000 bpj ces dernières années.  

Israël est client du GRK depuis 2014, lorsque les Kurdes ont décidé de vendre indépendamment leur brut via le port turc de Seyhan. À la mi-2015, Israël importait jusqu'aux trois quarts de ses besoins en pétrole brut du GRK. Les expéditions du Kurdistan irakien ont offert une source fiable de pétrole provenant d'un point de chargement à proximité, en maintenant ainsi les coûts de fret à un faible niveau. Mais Bagdad a porté plainte contre la décision d'Ankara d'autoriser le GRK à exporter du pétrole via Seyhan sans son autorisation, Les flux de brut ont alors été interrompus le 25 mars.



En plus des expéditions du Kurdistan irakien, Israël s'approvisionne également en pétrole brut auprès de l'Azerbaïdjan, du Brésil, du Gabon, du Kazakhstan et du Nigéria.  Auparavant, il importait également du brut russe, en particulier entre 2018 et 2020, mais aucun type de brut ne peut remplacer le KBT pour des raisons techniques, financières et politiques. Après l’arrêt de pétrole du nord de l'Irak, la question a été soulevée sur les qualités de brut qui pourraient potentiellement remplacer KBT. L'une des premières alternatives serait le pétrole russe vendu à prix réduit au milieu des sanctions occidentales contre Moscou.

 Mais alors qu'Israël n'a pas rejoint l'Occident pour sanctionner le pétrole russe, des facteurs politiques font de l'acte d'importer du brut russe une voie précaire. Sur le plan financier, le pétrole russe serait la meilleure option, mais ce serait un risque politique pour Netanyahou car cela accroitrait les tensions avec les États-Unis.  

L’incident de la rupture d’approvisionnement pourrait pousser Israël à se rapprocher du Brésil où la production est en hausse, et même des États-Unis, bien que la qualité du brut soit en cause. Il est certain que le remplacement de KBT sera une solution coûteuse pour Israël en raison des coûts de fret plus élevé et des prix pratiqués par les autres fournisseurs.



Pour l'avenir, des risques politiques potentiels pour le commerce pétrolier israélo-kurde se profilent également à l'horizon. Bien qu'un accord ait été trouvé entre Erbil et Bagdad pour reprendre les exportations de brut via Seyhan, on ne sait pas comment ces ventes seront gérées. Si le GRK continue de commercialiser sa production de brut sans ingérence de Bagdad, alors le pétrole continuera probablement d'affluer vers Israël. Mais même si les expéditions via Seyhan reprennent, les développements récents ont révélé un point faible dans la sécurité énergétique d'Israël. Il reste à voir comment Israël choisira finalement de faire face à ce défi.   

 

1 commentaire:

Georges Kabi a dit…

On a assez de problemes avec les USA pour aussi les envenimer en achetant du petrole russe!
Certes cela ameliorerait nos relations avec la Russie, mais jusqu'a present, et malgre les critiques (assez justifiees il faut l'avouer) americaines sur la pretendue "reforme" judiciaire, qui, en fait, n'est que l'etablissement d'une democratie "populaire" (genre anciens pays sovietiques) en Israel ferait fuir a moyen terme la quasi totalite des industries de pointe et surtout l'arret des investissements occidentaux pour qu'on doive payer le petrole plus cher. Cela ne diminuera pas le parc automobile israelien et paradoxalement contribuerait a augmenter les recettes fiscales d'Israel. Le seul probleme, c'est que l'inflation augmentera, mettant en peril de plus nombreuses couches de la societe israelienne.