LA TUNISIE EN MARCHE VERS LA DICTATURE
Par Jacques BENILLOUCHE
Conseil supérieur de la magistrature Tunisie |
À petits pas, la Tunisie se dirige vers le pouvoir personnel de Kaïs Saïed, voire la dictature. En juillet 2021, le président avait soudainement suspendu le Parlement, limogé le Premier ministre Hichem Mechichi, et déclaré qu'il gouvernerait dorénavant par décret. Il avait annoncé son intention de réécrire la constitution tunisienne de 2014 et de la soumettre à référendum. Il vient de décider de dissoudre le Conseil supérieur de la magistrature qui nomme les juges.
Un policier devant le bâtiment du Conseil supérieur de la magistrature |
Youssef Bouzaher, président de cet organisme
indépendant, estime qu’aucun mécanisme constitutionnel permettait cette dissolution et que «Les
juges ne resteront pas silencieux. La décision du président est illégale et
s'apparente à une tentative de soumettre les juges au bon vouloir présidentiel». Le Conseil est l'un des rares organes de
l'État encore en mesure d'agir de façon souveraine. Depuis des mois, le
président est en conflit avec l'institution judiciaire dont il critique les
décisions et qu’il accuse de corruption et d’être infiltrée par des opposants
politiques, voire des islamistes.
Les Américains n’étaient jamais intervenus dans la
politique tunisienne mais pour la première fois, Joe Biden a exprimé son
inquiétude face à la tentative du président tunisien Kais Saïed de dissoudre un
organisme de surveillance judiciaire indépendant, selon lui, une décision qui
risque de menacer davantage la démocratie dans un pays qui était autrefois
considéré comme la seule réussite du printemps arabe. : «Les États-Unis
sont profondément préoccupés par les appels du président tunisien Saïed à
dissoudre le Conseil supérieur de la magistrature et l'interdiction aux employés
d'entrer au Conseil supérieur de la magistrature. Les États-Unis réitèrent nos
appels à un processus accéléré de réforme politique en Tunisie qui réponde aux
aspirations du peuple tunisien». Le président de la commission des affaires
étrangères de la Chambre américaine, Grégory Meeks, a qualifié «la dernière
manœuvre politique de Saïed de nouveau pas en arrière pour ce qui était une
démocratie en développement».
En réponse Saïed a défini le Conseil comme une «chose
du passé partiale et corrompue». Le Conseil ayant décidé de continuer à
exercer ses fonctions, la police tunisienne a verrouillé les portes du bâtiment
du Conseil pour empêcher le personnel d'entrer. Mais si au début de son mandat,
les actions de Saïed ont largement bénéficié d'un soutien populaire, la gestion
de son économie et de la crise du Covid reçoit à présent moins d’approbation.
Jusqu’à présent personne ne définissait la prise de
pouvoir de Saïed en juillet comme coup d’État mais la dernière mesure ne laisse
aucun doute. La dissolution du CSM constitue la dernière étape de la
décomposition des institutions de l’État tunisien Elle diffuse une mauvaise
image auprès de l’étranger au moment où la Tunisie, en déroute économique,
s’apprête à entamer des négociations avec le FMI alors le véritable problème n’est
pas institutionnel ou constitutionnel mais plutôt économique.
Des membres des forces de sécurité tunisiennes se tiennent devant le siège fermé du CSM |
Dans une déclaration conjointe, les ambassadeurs
d’Allemagne, du Canada, des États-Unis, de France, d’Italie, du Japon, du
Royaume-Uni, et de l’Union européenne en Tunisie ont annoncé qu’ils étaient profondément
préoccupés par l’annonce de la volonté de dissoudre unilatéralement le Conseil
supérieur de la magistrature, dont la mission est d’assurer le bon
fonctionnement du système judiciaire et le respect de son indépendance.
On s’attendait à de nombreuses réactions dans le
pays de la part de la cinquantaine de magistrats ou une mobilisation générale
des avocats, voués normalement à défendre les causes, les libertés et
l’indépendance du pouvoir judiciaire. Rien de cela et les tribunaux continuent de
fonctionner normalement.
En s’arrogeant les pleins pouvoirs le 25 juillet
2021, en faisant main basse sur le pouvoir judiciaire le 6 février 2022, le
président de la République Kaïs Saïed répond à la définition littérale de «dictateur»
puisqu’il s’est arrogé les pleins pouvoirs. Mais en Tunisie, il y a peu d’enthousiasme pour défendre la justice et la démocratie
tunisiennes même de la part de l’UGTT, principale puissance syndicale. Kaïs
Saïed a donc les mains totalement libres pour faire ce qu’il veut de l’État
tunisien. Seule la réalité économique pourrait avoir raison de son emprise.
2 commentaires:
Je crois qu'il n'existe pas un seul Etat musulman democratique. Et donc la Tunisie rectifie le tir et deviendra une dictature comme tous les autres pays musulmans. Meme en Israel, de nombreuses voix publiques reclament l'institution d'une dictature. C'est normal, quand on vit dans un pays libre, cela gene.
Linfluence dominante de l'Islam rigoriste secrète misére et dictature...
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