Liban Elections |
Jusqu’à maintenant le Hezbollah qui
s’est auto proclamé ultime rempart contre Israël, contrôle le pays. Les
élections programmées pour mai représentent le prochain défi majeur pour l’Iran
et son affidé terroriste qui dispose de la majorité parlementaire grâce à la
complicité du président Aoun, de son gendre Basil Gibran et de la milice Amal
de Nabi Berri. Rejeté par une très grande majorité des citoyens, y compris même
au sein de la communauté chiite qui n'est plus inconditionnelle, le Hezbollah
pourrait perdre la majorité.
Les émeutes de 2019 visaient trois
personnalités mêlées à des affaires de corruptions de notoriété publique, Nabi
Berri, Basil Gibran qui avait aussi bloqué la formation d’un nouveau
gouvernement et Riad Salamé, gouverneur de la banque centrale. Les Libanais ont
vécu dans leur chair les manipulations de l’organisation terroriste qui met uniquement
en avant ses intérêts en bloquant le fonctionnement des institutions. En 2005,
Gibran bénéficiait d’un soutien à hauteur de 70% du parti chrétien FMP, qui est
tombé à 13%. C’est un écueil de plus pour l’organisation.
Le Hezbollah ne peut plus seul
faire face à la situation économique et sociale dont il est largement responsable
et est en position délicate, si les partis politiques et les oppositions plus
largement, ont suffisamment de lucidité et de sens de l’Etat pour faire table
rase de leurs différences pour reprendre le contrôle du pays. On cite fréquemment le nom du chef des forces
Phalangistes Kataëb, Samy Gemayel.
Samy Gemayel |
Le Hezbollah est confronté à un
basculement possible, mais il a démontré sa très grande duplicité en 2019 en
encourageant les manifestations y compris dans la communauté chiite contre son
allié de toujours Nabi Berri, pour s’en dissocier, au moins de façade. Ce qui aura
une suite et entrainera une partie des chiites à ne plus voter pour la majorité.
Dans le même temps, l’exode des jeunes libanais a doublé depuis la dernière
élection. Essentiellement chrétiens, les plus de 245.000 exilés déjà inscrits
sur la liste électorale, qui étaient moins de 100.000 en 2018, ne voteront pas
pour reconduire la majorité actuelle.
Les milices alliées de l’Iran ont
été battues dans les dernières élections en Irak. Téhéran et Nasrallah redoutent
un nouvel échec. Ils sont donc à la recherche de plusieurs scénarios pour éviter
cette éventualité. Un report des élections, permettrait au Hezbollah de choisir
le nouveau président ou d’attendre que les difficultés soient moins flagrantes
et que l’opinion publique se calme. En 2013 une première prolongation du
parlement de 2 ans, a eu lieu, puis en 2014 à nouveau 2 ans. L’organisation pourrait
invoquer divers motifs, notamment sécuritaires, pour repousser mai aux calendes
perses et dans cette configuration une
étincelle suffirait pour déclencher de nouveaux affrontements.
Opérateur drone Hezbollah |
L’envoi récent de drones vers Israël s’inscrit dans ce procédé et peut provoquer cette étincelle qui entrainerait irrésistiblement les deux parties vers un nouveau conflit qui serait suffisant pour reporter les élections et permettre au groupe de rester en place. Cette éventualité implique que l’Etat hébreu fasse preuve d’une grande retenue et d’un discernement aigu pour ne pas se laisser entrainer dans un affrontement qui permettrait le statu quo et le renforcement de la milice voire la préparation d’une offensive liée à une levée des sanctions contre l’Iran.
Les États-Unis, plusieurs gouvernements européens et de nombreux autres
acteurs internationaux soutiennent fermement la tenue des élections à temps, et
cette pression pourrait rendre difficile le report du vote, bien que dans le passé
ces pressions soient restées sans effet.
Une autre option
est la paralysie, Même en cas d’échec, le groupe terroriste pourrait encore bloquer
la formation d’un gouvernement pendant des mois, sinon des années. Comme la
démonstration a été faite précédemment, sans qu’aucune grande puissance dont la
France n’ait pu changer quoi que ce soit, malgré des déclarations martiales. On
se souvient des visites du président français, restées sans aucune suite.
Visite de Macron au Liban |
Fort de son expérience en coercition le Hezbollah peut recourir à la menace
ou à l'usage de la force si les votes ne se déroulent pas dans son sens et
obliger un nouveau gouvernement à faire des compromis sur tous les plans. Le
Hezbollah a déjà utilisé ses moyens armés. Après avoir perdu les élections
de 2005 au profit de la coalition du 14 mars, le groupe a eu recouru à la
violence et a fait tomber le gouvernement, non sans avoir également assassiner
de ses membres, le groupe a bloqué le gouvernement pendant des mois et a
finalement ordonné à ses troupes de provoquer des combats de rue à Beyrouth en
mai 2008. Cette escalade a forcé les opposants à accepter l'accord de Doha, qui
a dépouillé la coalition du 14 mars de sa majorité et a formé à sa place un
gouvernement «d'union nationale». Lors d'un incident survenu en février
2011, le groupe a forcé le gouvernement à démissionner et a installé Najib
Mikati à la tête d'un nouveau gouvernement d'union nationale.
Malheureusement, rien n'empêche le Hezbollah d'utiliser à nouveau ces procédés
s'il perdait. Un tel scénario est encore plus plausible après les
affrontements d'octobre dernier à Tayouneh. Les enquêtes du gouvernement
sur cet incident n'ont abouti à aucune responsabilité jusqu'à présent, et les
responsables du Hezbollah continuent de proférer des menaces voilées.
Deux nouveaux événements peuvent impacter la suite à
l’avantage d’Israël ou à son détriment. Les pourparlers du nucléaire de Vienne
semblent s’acheminer vers un compromis qu’Israël sera contraint d’accepter. Ce
qui sous-entend une levée des sanctions américaines et une reprise plus
généreuse de l’aide de Téhéran et donc des moyens accrus en vue des élections
et un arrosage plus important de sa clientèle électorale. Il se peut aussi que
l’accord prévoit un ralentissement de l’aide iranienne au Hezbollah. Ce qui
reste à vérifier.
Les accords d’Abraham représentent
l’autre événement majeur de la période. Les Libanais ont découvert que leurs
frères arabes et musulmans, sunnites pour la plupart, ont passé des accords
avec leur grand voisin Israël et que l’ennemi d’hier est devenu le partenaire
d’aujourd’hui et peut-être l’allié d’après-demain. On sait à quel point les
monarchies sont hostiles au groupe terroriste et ne le financeront pas.
Même les chrétiens et une fraction
des musulmans, antérieurement anti-israéliens constatent que leur pays n’a pas
fait le bon choix. Ce qui crée un motif supplémentaire de battre le Hezbollah. Les élections pourraient permettre une victoire
symbolique pour le mouvement de protestation si le Hezbollah est privé de sa
majorité parlementaire. Le groupe fera tout pour conserver les vingt-sept
sièges attribués à la communauté chiite dans le cadre du système confessionnel
libanais – Depuis 2019 il empêche les candidats chiites de l'opposition de se
présenter à ces sièges. Le Hezbollah mettra aussi tout en oeuvrer pour
aider la faction chrétienne de B. Gebran à maintenir une présence importante au
parlement et à exploiter le départ de Saad Hariri de la scène politique en tentant
de faire une OPA sur la communauté sunnite. En revanche, une forte
abstention jouerait en faveur du Hezbollah et de ses alliés.
Selon ce qui se passera en mai, le Liban pourrait être le prochain pays de
la région à signer la paix avec Jérusalem alors qu’officiellement les deux pays
n’ont signé qu’un armistice le 23 mars 1949 et restent virtuellement en guerre
depuis.
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