ISRAËL ET LA CONCENTRATION DES
POUVOIRS
Par Jacques BENILLOUCHE
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Cour Suprême |
Mme Hayut, Mr Rivlin et Mme Shaked |
La Cour suprême du Royaume-Uni est la juridiction la plus élevée de l'ordre judiciaire au Royaume-Uni dispose du droit de juger les lois. Enfin, pour les Etats-Unis, la Cour suprême contrôle la constitutionnalité des lois mais a posteriori, après que la loi a été promulguée.
Il est important qu’une juridiction indépendante existe
pour contrôler l’exécutif qui ne doit pas avoir les mains tout à fait libres. Or
en Israël on veut tout faire pour limiter les pouvoirs de la Cour Suprême qui pourtant
ne connaît que le droit et ne juge qu’en fonction des textes votés par la
Knesset. Il est vrai que la majorité actuelle se plaint que plusieurs textes aient été retoqués par la Cour parce qu’ils n’étaient pas conformes aux Lois
fondamentales, faisant office de Constitution.
Alors, au lieu de se plier aux
règles de droit, la Knesset cherche, depuis le début de sa session, à
neutraliser la Haute Cour considérée à tort comme un organisme politique, et pire,
comme une émanation de «gauchistes» selon le principe que ce qualificatif s'applique à ceux qui s'opposent à Netanyahou.
Commission des Lois |
Or onze des douze membres de la commission des lois
viennent de proposer un nouveau texte qui permettrait à la Knesset d'adopter
des lois déjà annulées par la Haute Cour de Justice sous réserve d'une majorité simple de
61 députés sur 120. Dans des textes aussi forts, la majorité des 2/3 est
partout exigée dans les assemblées occidentales quand il s’agit de modifier la Constitution. De manière
étonnante, le ministre Yoav Galant du parti Koulanou, s’est associé à cette
démarche qui modifie la Loi fondamentale : Dignité Humaine et Liberté.
En fait la question des migrants africains illégaux pousse les nationalistes
juifs à réagir pour pouvoir garder la liberté de les expulser sans tenir
compte de la loi.
Raz Nazri |
Les deux procureurs de l’État sont opposés à cette
réforme. Le procureur général adjoint, Raz Nazri, n’est pas favorable au
projet : «La position du procureur général est que toutes les
propositions devraient être opposées. Nous ne disons pas que ce n'est pas
constitutionnel, parce que c'est un amendement aux lois fondamentales, mais nous
y sommes opposés. La loi fondamentale sur la législation aborde toutes les
complexités des relations entre les autorités». Le procureur
Mandelblit n’est pas non plus favorable à tout changement de la loi parce qu’il
pense qu’il n’y aura plus de garde-fou face à un risque imprévisible.
Cela est grave car une simple majorité peut imposer des
lois sans contrôle. Réunir une majorité de 61 députés est une formalité pour
toute coalition. L’exécutif serait alors omnipuissant. Bien sûr les leaders
nationalistes Naftali Bennett et Ayelet Shaked, approuvent cette décision du
comité qui marque le «début de la construction d'un mur de séparation entre
les trois branches du gouvernement. La clause de contournement rendra la
confiance du public à la Haute Cour de justice et rétablira les fonctions
originelles des branches : la Knesset légifère, les gouvernements mettent en
œuvre et la cour interprète. La Knesset, en tant que représentante de la nation,
est la souveraine comme dans toute démocratie civilisée».
Seul le leader de Koulanou, Moshé Kahlon, peut sauver la
situation car il dispose d’un droit de veto dans la coalition. La présidente de
la Cour suprême, Esther Hayut, qui reste très attachée à maintenir la
démocratie dans le pays, a rencontré le premier ministre dans une dernière
tentative de bloquer une initiative qui peut conduire à la dictature d’une
majorité de la Knesset contre les institutions. Nul n’est à l’abri de manœuvres
d’un clan qui pourrait imposer sa loi au pays. Or, il faut faire confiance dans
les institutions qui ont bien fonctionné jusqu’à présent et qui garantissent à
l’État d’Israël sa qualité de pays démocratique, le seul de la région. Il
serait dangereux de suivre les traces de la Turquie qui a progressivement
grignoté des pans entiers de démocratie pour devenir une dictature théocratique.
Le rôle de la Cour suprême est fondamental dans un
système où la Constitution est lacunaire et en constante construction. Elle a
réussi à protéger les droits fondamentaux sans disposer d'un texte
constitutionnel en bonne et due forme. Elle a développé un contrôle de
constitutionnalité alors même que la nature des textes dont elle disposait
était loin d'être claire. Ainsi, depuis 1995, la Cour suprême d'Israël exerce
un contrôle efficace de la constitutionnalité des lois dont elle a précisé les
contours. Elle a utilisé scrupuleusement les textes pour protéger à la fois les droits
fondamentaux et les valeurs de l'État d'Israël. Ce serait triste de
compromettre un acquis pour plonger le pays sur la voie de la dictature.
2 commentaires:
Bon article Mr Jacques,
Question : par qui, sont élus les membres de la Cour Suprême ?
Si c'est un acquis pour la démocratie, comment est il possible de la réduire au silence juridiquement ?...
Le Président d'Israel n'a t-il aucun pouvoir à ce sujet si important..?
La Cour suprême d'Israël est composée de 15 membres nommés par un comité indépendant de sélection des juges, établi par une loi fondamentale : celle de la magistrature. Lors des dernières désignations la ministre de la justice Ayelet Shaked est intervenue pour «proposer» ses candidats qui n’ont pas tous été cooptés.
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