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lundi 17 juin 2013

TURBAN BLANC ET BLANC TURBAN



TURBAN BLANC ET BLANC TURBAN

Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps
             
           
          Il est de l’islamisme comme il est de l’Iran. Le terme de «modéré» n’est pas adapté car l’islamisme est une forme plus pernicieuse de l’islam tandis que les barbus enturbannés ne peuvent pas être modérés tant qu’ils restent totalement attachés à leur dogme et à leur Guide suprême. On peut à la rigueur qualifier de pragmatiques plutôt que de modérés ceux qui mettent en avant, d’abord l’intérêt de leur pays et de leurs citoyens.




Surprise du premier tour

Hassan Rohani



            Les résultats transmis par le ministre iranien de l’intérieur, Mostapha Mohammad Najjar, sont une surprise pour tous les commentateurs car l’élection d’Hassan Rohani a été acquise dès le premier tour. Certes il était prévisible qu’il soit parmi les deux premiers candidats pour un éventuel second tour mais nul n’avait prévu qu’il mette un terme si vite à huit années de pouvoir exécutif conservateur. Il a obtenu 18,6 millions de voix (50,68%) face à cinq candidats qualifiés de purs et durs et inféodés au Guide Suprême Ali Khamenei.  On attendait plutôt une surprise de la part du maire de Téhéran, Mohammad Bagher Ghalibaf, qui cependant le suit de très près. Le scrutin a été acquis parce que les iraniens se sont précipités à près de 73% dans les bureaux de vote.
Ali Kkamenei

            On ignore la marge de manœuvre dont disposera le nouveau président car son pouvoir est verrouillé par Ali Khamenei et, de ce fait, il est peu probable qu’il y ait un infléchissement  immédiat de la politique iranienne. Hassan Rohani a toujours été dans les arcanes du pouvoir islamiste iranien, au plus haut sommet. Il est membre depuis 1991 du Conseil de Discernement, qui s'apparente à un conseil d'État arbitrant les litiges entre le parlement, le Sénat et le conseil des Gardiens de la révolution. Il est membre depuis 2000 de l'Assemblée des Experts qui élit et révoque le Guide de la révolution. Il est depuis 1989 secrétaire du Conseil suprême de la Sécurité nationale, directement placé sous l’autorité du guide suprême de la révolution, qui a en charge de déclarer la guerre, de mobiliser les forces armées, de désigner les chefs des différentes armées et des Pasdarans et de définir les plans stratégiques et la politique de défense. Hassan Rohani fut par ailleurs vice-président du Majlis (parlement) de 1992 à 2000. Il fait partie du sérail et n’a jamais fait preuve d’aucune velléité pour s’opposer aux instances dirigeantes, c’est dire s’il est mouillé dans les grandes décisions prises par l’Iran. C’est pourquoi il ne peut pas renier brutalement ses anciennes convictions.



Départ de l’illuminé
Ahmadinejad et son dauphin




            Le seul élément positif de cette élection, dans l’immédiat, est le départ de l’illuminé Ahmadinejad qui va rejoindre le cimetière politique de ceux qui n’ont pas réussi leur triste besogne. Il avait décidé de rayer Israël de la carte, d’élever le niveau de vie des classes défavorisées et des classes moyennes et de terminer son programme nucléaire, or il n’a réussi qu’à décrédibiliser le pouvoir iranien. Mais le Guide suprême regrettera cette marionnette à ses ordres dont le rôle qui lui a été assigné consistait à s’opposer à toute émergence d’un courant réformateur. Mais là aussi il a échoué.

            Rohani est aussi un homme à turban et il est tenu à suivre la politique de ses pairs. Il ne sera original que s’il décide de réduire son programme nucléaire, de diminuer l’agressivité verbale à l’égard d’Israël et pourquoi pas de reconnaitre l’État juif. C’est ce qui le distinguera des autres ayatollahs et consorts. 
Mohammad Khatami

            L’Iran a déjà fait l’expérience d’un réformiste du 2 août 1997 au 3 août 2005 avec le président Khatami. Il avait au cours de ses deux mandats construit des relations diplomatiques avec de nombreux États, y compris ceux de l'Union européenne et de l'Asie. En politique intérieure, il avait prôné la liberté d'expression et la tolérance, mais il n’est jamais parvenu à changer les institutions, ni à relancer l'économie du fait de l'opposition conservatrice au Parlement et du contrôle exercé par le Guide suprême. Il n’y a aucune raison pour que le nouveau président ne soit pas bloqué lui-aussi dans son action. Son pragmatisme consistera à admettre que les iraniens veulent qu’on leur donne du pain et non de l’uranium enrichi.



Discrétion israélienne




            Israël ne s’attend pas à un changement immédiat et ne veut pas s’engager dans des hypothèses tant qu’il ne connait pas précisément les intentions du nouvel élu. Mais il est clair que le risque de conflit s’éloigne et que Barack Obama peut s’estimer dans le vrai après avoir décliné une stratégie d’attente. Il n’est pas certain que les iraniens vont réduire leur programme nucléaire parce qu’il est bien avancé mais, comme l’occident réclame depuis plusieurs années des garanties, il espère que Rohani sera le bon interlocuteur. Il faut se souvenir qu’en 2003, en tant que responsable des négociations sur le dossier nucléaire, il avait réussi à persuader le Guide d’accepter une suspension de l’enrichissement d’uranium.
 

Israël n’oublie pas que sa candidature avait été présélectionné par l'ayatollah Khamenei, qui a disqualifié les candidats qui n’étaient pas en phase avec ses vues.  Il n’oublie pas non plus le programme nucléaire a été lancé et conçu par le guide et non par le président iranien. Alors Israël préfère se prononcer uniquement sur les actions de Rohani et sur ses capacités à cesser de diffuser la terreur à travers le monde. Il n’oublie pas enfin que, malgré sa qualité de représentant du Guide, il est qualifié au Conseil suprême de la sécurité nationale pour prôner plus de souplesse dans les discussions avec l’occident. 
Il pourrait même envisager des discussions directes avec les États-Unis pour tenter de remédier à la grave crise économique due aux sanctions internationales. Il serait contraint à ces discussions car la majorité de ses électeurs partage une même préoccupation: la crise économique, qui se traduit par une hausse du chômage, une inflation supérieure à 30% et une dépréciation du rial de près de 70%.  
Avec Rohani il ne faudra pas s’attendre à un changement dans l’idéologie du pays mais peut-être une évolution dans la rhétorique et dans les méthodes de gouvernance. Le prochain président sera le deuxième personnage de l'État selon la Constitution iranienne, mais il n'aura que peu d'influence sur les dossiers stratégiques comme le nucléaire, qui sont sous l'autorité directe du guide suprême. Rohani et Ahmadinejad risquent d'être turban blanc et blanc turban.


3 commentaires:

Daniel GAL a dit…

Est ce que les turbans seraient plutôt verts et comme les pastèques beaucoup de rouge à l 'intérieur mais ils ne connaissent pas nos pastèques qui n'ont pas de pépites ,en hébreu garin signifie pépites noyau mais aussi nucléaire

Marianne ARNAUD a dit…


Pour les Gaulois que nous sommes, cher monsieur Benillouche, il n'y a qu'une élection qui vaille la peine qu'on s'y attarde ce dimanche, c'est celle de Villeneuve-sur-Lot !

Jacques BENILLOUCHE a dit…

Je croyais qu'Israël était le centre du monde et pas la France !

Je vais corriger mes classiques.