LE BEST-OF DES ARTICLES LES PLUS LUS DU SITE, cliquer sur l'image pour lire l'article


 

vendredi 4 novembre 2022

L'échec programmé du sommet de la Ligue arabe par Albert NACCACHE

 

L’ÉCHEC PROGRAMMÉ DU SOMMET DE LA LIGUE ARABE

 

Chronique d’un papy flingueur Albert NACCACHE

 


Les drapeaux des pays de la Ligue arabe


La Ligue arabe, qui regroupe 22 pays, s’est réunie pour son 31ème sommet, les mardi et mercredi 1er et 2 novembre à Alger. L’Algérie a placé ce sommet sous le signe du «rassemblement». «L’Algérie entend organiser un sommet arabe unificateur et inclusif et ne cautionne pas la division arabe», a déclaré le président Abdelmadjid Tebboune. Pour le président algérien, le Sommet arabe d’Alger marquera le retour de la diplomatie algérienne sur la scène internationale.


Abdelmadjid Tebboune


Le secrétaire général de la Ligue arabe, Ahmed Aboul Gheit a d’ailleurs appelé vendredi à l’élaboration, lors du sommet, d’une «vision arabe intégrée» pour relever tous les défis de la région.

Ahmed Aboul Gheit


Ils ne sont peut-être pas aidés par certains journalistes algériens comme Mehdi Messaoudi. «Au sujet du Sommet arabe prévu à Alger, les 1 et 2 novembre, dont la symbolique remue les plaies de la défaite de l’Establishment français et de ses alliés sionistes. Par la voix de certains larbins de la propagande franco-marocco-sioniste (FMI), le Sommet arabe d’Alger, fut l’objet des critiques les plus virulentes allant jusqu’à spéculer sur ses résultats, alors que sa tenue est déjà une victoire, dans la mesure ou la question palestinienne, longtemps reléguée au second plan et intérêt au profit des crises nées au lendemain de ce qui a été appelé «printemps arabe», revient au-devant de la scène internationale, permettant au passage de réunifier les rangs arabes autour de cette cause sacrée, via une action arabe commune et une feuille de route pour aller clamer haut et fort le droit du Peuple Palestinien à édifier un Etat souverain sur ses terres spoliées par l’occupant sioniste, au niveau de toutes les instances internationales. … (ce) devrait constituer un pas non-négligeable pour élaborer un consensus arabe autour de la question sacrée de la Palestine loin du diktat sioniste». [1]

Bienvenue aux frères arabes

  

Les principales artères de la capitale algérienne ont été ornées de drapeaux des pays arabes et des affiches souhaitant la bienvenue aux Frères arabes ont été placardées sur d’énormes panneaux publicitaires.

Les États membres choisissent leur camp

Les dirigeants arabes se réunissent en sommet pour la première fois depuis trois ans, sur fond de divisions persistantes à propos des conflits qui agitent la région.

Les ambitions de MBS


Le bloc majoritaire est dirigé MbS (Mohammed ben Salmane), prince héritier de l’Arabie Saoudite, avec les Emirats arabes unis, Koweït, Bahreïn, Oman, Qatar, l’Egypte et le Soudan. Autrefois en position de force, l’Algérie est dans la défensive, car le rapport de force lui est aujourd’hui défavorable. Ses soutiens Syrie, Libye, Irak n’étant plus opérationnels.

Placer la question palestinienne au centre

Alger a parrainé à la mi-octobre un accord de réconciliation entre les factions palestiniennes rivales. Le président Tebboune voulant placer la question palestinienne au centre des discussions du sommet.                                             

Abbas-Tebboune-Haniyeh


Mahmoud Abbas et Ismail Haniyeh pouvaient difficilement refuser de se serrer la main en raison du soutien constant et inconditionnel témoigné par l’Algérie à la cause palestinienne, soutien accompagné d’une nouvelle aide financière de 100 millions de dollars, un montant non négligeable. Pourtant les chances de concrétisation de cet accord sont nulles. Et pour cause : le Hamas s’apprête à rejoindre le camp irano-syrien. «La Palestine ne constitue plus une priorité. Certes, la cause demeure très puissante comme symbole, mais elle sert souvent de couverture pour servir un objectif, un programme, voire une posture. Ainsi, pour la plupart des pays arabes, la cause est entendue. La Palestine n’est plus une priorité, face à de nouveaux impératifs qui s’imposent avec acuité : restaurer l’État national en Libye et en Irak, préserver l’unité nationale en Syrie, survivre en Somalie, éviter un engrenage du chaos en Tunisie, pérenniser l’État au Koweït, assurer le fonctionnement des institutions au Liban, s’imposer comme puissance régionale pour l’Arabie saoudite». [2]

Le Maroc et Israël

La coopération sécuritaire nouée par le voisin marocain avec Israël après la normalisation de leurs relations a exacerbé les tensions entre les deux frères ennemis du Maghreb, déjà vives en raison de profonds désaccords sur le Sahara occidental, ayant conduit à la rupture de leurs relations diplomatiques en août 2021, à l’initiative d’Alger. 

Le chef d’Etat-major de l’armée israélienne, Aviv Kohavi , au quartier général des Forces armées royales (FAR), à Rabat, le 19 juillet 2022.


L’été 2022 a été ponctué par les visites successives de responsables israéliens de premier plan : le chef d’État-major de l’armée, Aviv Kohavi, le chef de la police, Yaakov Shabtai… Le royaume a fait l’acquisition du système de défense aérienne et anti-missiles Barak MX (contrat à 500 millions de dollars), une flotte de drones destinés à la surveillance, ou encore des intercepteurs de drones Skylock.

La Syrie devra attendre

Bachar al-Assad


Alger a tenté de faire réintégrer la Syrie au sein de la Ligue arabe. Le pays en avait été exclu fin 2011 au début de la révolte contre le régime de Bachar al-Assad. Les pays du Golfe voient mal le renforcement de la présence militaire iranienne en Syrie et au Liban et sa mainmise sur la politique intérieure irakienne. Devant cette opposition, La Syrie a renoncé à son siège, pour l’instant. Selon Pierre Boussel, chercheur associé à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS) en France, «le retour de la Syrie au sein de la Ligue arabe était pourtant un souhait de la Russie, alliée de Damas mais aussi d’Alger».

Beaucoup d’absents

Ainsi, le sommet de la Ligue arabe s’ouvre sans le roi du Maroc, le prince héritier saoudien ou les dirigeants des Émirats Arabes Unis et de Bahrein.

La déclaration de clôture

Les dirigeants arabes et leurs collaborateurs se sont livrés à des acrobaties diplomatiques dans la formulation des résolutions finales – adoptées à l’unanimité – pour éviter de froisser tel ou tel pays. Asharq Al-Awsat a obtenu une copie de la déclaration de clôture du sommet d'Alger dont voici les points le plus significatifs :  Des pays comme l'Algérie, le Maroc, l'Égypte et le Liban, dépendent grandement de l'importation de céréales d'Ukraine et de Russie ; d'où la volonté des États arabes d'adopter une nouvelle stratégie agricole qui consiste à produire localement le blé.

La sécurité hydrique est abordée avec la proposition de l'Égypte de discuter du conflit du barrage de la renaissance et le partage des eaux du Nil avec l'Éthiopie. L’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis sont félicités pour leur engagement dans le respect du droit international.

Concernant l'Iran, la déclaration a critiqué son ingérence dans les affaires intérieures des pays arabes qui alimente les conflits sectaires. Elle condamne l'Iran pour son soutien aux groupes qui alimentent ces conflits, en particulier dans la région du Golfe. Téhéran est accusé d'alimenter le sectarisme visant à déstabiliser le royaume et de former des groupes terroristes entraînés et financés par les Gardiens de la révolution iraniens. L’Iran est aussi condamné pour son ingérence dans la crise syrienne.

Infractions turques

La déclaration appelle à adopter une position arabe unie contre les violations turques de la souveraineté irakienne, exige qu'elle retire ses forces des territoires irakiens conformément à une résolution de la Ligue arabe de 2015 et condamne les attaques turques contre la Syrie.

Israël - Palestine

Elle souligne que la résolution du conflit palestino-israélien restait essentielle pour le monde arabe. Le conflit devant être résolu conformément aux résolutions internationales et à l'Initiative de paix arabe de 2002, qui stipule la création d'un État palestinien selon la frontière de 1967 et ayant Jérusalem-Est pour capitale. La déclaration soutient le plan de paix proposé par le président Abbas qui appelle à la création d'un mécanisme international pour parrainer des négociations de paix crédibles.

La situation en Libye est à l'ordre du jour du sommet arabe d'Alger. La question de la tenue d'élections législatives et présidentielle en Libye sera tranchée par des dirigeants arabes, malgré quelques réticences de la partie égyptienne sur la représentativité du gouvernement de Tripoli. Considérée comme inquiétante, la situation actuelle du Soudan a été abordée par les chefs d'État arabes pour soutenir un retour à l'ordre constitutionnel au moment où le pays connaît des manifestations pour réclamer «un pouvoir civil». Concernant le Yémen, condamnation des Houthis. La déclaration a souligné l'attachement à l'unité du pays, sa souveraineté, sa sécurité et sa stabilité

le 31ᵉ sommet arabe


Conclusion

Nous avons là un chapelet de vœux pieux, de formules qui n’engagent à rien, de déclarations redondantes, souvent sans effet sur le terrain. «De plus, les résultats se traduisent rarement par un réel renforcement de la coopération et de la coordination interarabe, surtout dans le domaine économique qui gagnerait à être efficacement développé, au regard des bénéfices partagés qu’il peut générer. Enfin, les clichés de certains dirigeants arabes somnolant durant les séances d’ouverture en disent long sur le climat désinvolte généralisé». [3] 

Seule la tenue de ce sommet qui a été reporté à plusieurs reprises «est déjà un exploit en soi tant les divisions sont profondes au sein du Monde arabe», mais l’idée d’un «sommet unificateur et inclusif» vantée par le président algérien Abdelmadjid Tebboune «ressemble de plus en plus à un mirage». Les titres de la presse arabe sont cruels : «Sommet arabe d’Alger : beaucoup d’ambitions, peu d’illusions», «Le sommet des Etats Arabes à Alger ce 1er Novembre : une cacophonie»

Le drapeau national algérien flotte parmi d'autres drapeaux des pays participant au Sommet de la Ligue arabe.

[1] Mehdi Messaoudi- Algérie 54- 28-10-22

[2] Abed Charef,  Jeune Afrique, 1 novembre 2022

[3] Ici Beyrouth 2 aout 2022

1 commentaire:

Georges Kabi a dit…

A quoi sert cette organisme aujourd'hui?