Les drapeaux des pays de la Ligue arabe |
La Ligue arabe, qui
regroupe 22 pays, s’est réunie pour son 31ème
sommet, les mardi et mercredi 1er et 2 novembre à Alger. L’Algérie a placé ce sommet
sous le signe du «rassemblement». «L’Algérie entend organiser un
sommet arabe unificateur et inclusif et ne cautionne pas la division arabe»,
a déclaré le président Abdelmadjid Tebboune. Pour le président algérien, le
Sommet arabe d’Alger marquera le retour de la diplomatie algérienne sur la
scène internationale.
Abdelmadjid Tebboune |
Le secrétaire général de la Ligue arabe, Ahmed Aboul Gheit a d’ailleurs
appelé vendredi à l’élaboration, lors du sommet, d’une «vision arabe
intégrée» pour relever tous les défis de la région.
Ahmed Aboul Gheit |
Ils ne sont peut-être pas aidés par
certains journalistes algériens comme Mehdi Messaoudi. «Au
sujet du Sommet arabe prévu à Alger, les 1 et 2 novembre, dont la symbolique
remue les plaies de la défaite de l’Establishment français et de ses alliés
sionistes. Par la voix de certains larbins de la propagande franco-marocco-sioniste (FMI),
le Sommet arabe d’Alger, fut l’objet des critiques les plus virulentes allant jusqu’à
spéculer sur ses résultats, alors que sa tenue est déjà une victoire, dans la
mesure ou la question palestinienne, longtemps reléguée au second plan et
intérêt au profit des crises nées au lendemain de ce qui a été appelé
«printemps arabe», revient au-devant de la scène internationale,
permettant au passage de réunifier les rangs arabes autour de cette cause
sacrée, via une action arabe commune et une feuille de route pour aller clamer
haut et fort le droit du Peuple Palestinien à édifier un Etat souverain sur ses
terres spoliées par l’occupant sioniste, au niveau de toutes les instances
internationales. … (ce) devrait constituer un pas non-négligeable pour élaborer
un consensus arabe autour de la question sacrée de la Palestine loin du diktat
sioniste». [1]
Bienvenue aux frères arabes |
Les principales artères de la capitale algérienne ont été ornées de
drapeaux des pays arabes et des affiches souhaitant la bienvenue aux Frères
arabes ont été placardées sur d’énormes panneaux publicitaires.
Les États membres choisissent leur camp
Les dirigeants arabes se réunissent en sommet pour la première fois depuis trois
ans, sur fond de divisions persistantes à propos des conflits qui agitent la
région.
Les ambitions de MBS |
Le bloc majoritaire est dirigé MbS (Mohammed ben Salmane), prince héritier
de l’Arabie Saoudite, avec les Emirats arabes unis, Koweït, Bahreïn, Oman,
Qatar, l’Egypte et le Soudan. Autrefois en position de force, l’Algérie est
dans la défensive, car le rapport de force lui est aujourd’hui défavorable. Ses
soutiens Syrie, Libye, Irak n’étant plus opérationnels.
Placer la question palestinienne au centre
Alger a parrainé à la mi-octobre un accord de réconciliation entre les
factions palestiniennes rivales. Le président Tebboune voulant placer la question
palestinienne au centre des discussions du sommet.
Abbas-Tebboune-Haniyeh |
Mahmoud Abbas et Ismail Haniyeh pouvaient difficilement refuser de
se serrer la main en raison du soutien constant et inconditionnel témoigné par
l’Algérie à la cause palestinienne, soutien accompagné d’une nouvelle aide financière
de 100 millions de dollars, un montant non négligeable. Pourtant les chances de
concrétisation de cet accord sont nulles. Et pour cause : le Hamas
s’apprête à rejoindre le camp irano-syrien. «La Palestine ne constitue plus
une priorité. Certes, la cause demeure très puissante comme symbole, mais elle
sert souvent de couverture pour servir un objectif, un programme, voire une
posture. Ainsi, pour la plupart des pays arabes, la cause est entendue. La
Palestine n’est plus une priorité, face à de nouveaux impératifs qui s’imposent
avec acuité : restaurer l’État national en Libye et en Irak, préserver
l’unité nationale en Syrie, survivre en Somalie, éviter un engrenage du chaos en Tunisie,
pérenniser l’État au Koweït, assurer le fonctionnement des institutions au Liban,
s’imposer comme puissance régionale pour l’Arabie saoudite». [2]
Le Maroc et Israël
La coopération sécuritaire nouée par le voisin marocain avec Israël après
la normalisation de leurs relations a exacerbé les tensions entre les deux
frères ennemis du Maghreb, déjà vives en raison de profonds désaccords sur le
Sahara occidental, ayant conduit à la rupture de leurs relations diplomatiques
en août 2021, à l’initiative d’Alger.
Le chef d’Etat-major de l’armée israélienne, Aviv Kohavi , au quartier général des Forces armées royales (FAR), à Rabat, le 19 juillet 2022. |
L’été 2022 a été ponctué par les visites successives de responsables
israéliens de premier plan : le chef d’État-major de l’armée, Aviv Kohavi, le chef de la police, Yaakov Shabtai… Le
royaume a fait l’acquisition du système de défense aérienne et anti-missiles
Barak MX (contrat à 500 millions de dollars), une flotte de drones
destinés à la surveillance, ou encore des intercepteurs de drones Skylock.
La Syrie devra attendre
Bachar al-Assad |
Alger a tenté de faire réintégrer la Syrie au sein de la Ligue arabe. Le
pays en avait été exclu fin 2011 au début de la révolte contre le régime de Bachar al-Assad. Les pays du Golfe voient mal le
renforcement de la présence militaire iranienne en Syrie et au Liban et sa
mainmise sur la politique intérieure irakienne. Devant cette opposition, La
Syrie a renoncé à son siège, pour l’instant. Selon Pierre Boussel, chercheur
associé à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS) en France, «le
retour de la Syrie au sein de la Ligue arabe était pourtant un souhait de la
Russie, alliée de Damas mais aussi d’Alger».
Beaucoup d’absents
Ainsi, le sommet de la Ligue arabe s’ouvre sans le roi du Maroc, le
prince héritier saoudien ou les dirigeants des Émirats Arabes Unis et de Bahrein.
La déclaration de clôture
Les dirigeants arabes et leurs collaborateurs se sont livrés à des acrobaties
diplomatiques dans la formulation des résolutions finales – adoptées à
l’unanimité – pour éviter de froisser tel ou tel pays. Asharq Al-Awsat a obtenu une copie de la déclaration de clôture du
sommet d'Alger dont voici les points le plus significatifs : Des pays comme l'Algérie, le Maroc, l'Égypte et le
Liban, dépendent grandement de l'importation de céréales d'Ukraine et de Russie ;
d'où la volonté des États arabes d'adopter une nouvelle stratégie agricole
qui consiste à produire localement le blé.
La sécurité hydrique est abordée avec la proposition de l'Égypte de
discuter du conflit du barrage de la renaissance et le partage des eaux du Nil
avec l'Éthiopie. L’Arabie saoudite et les Émirats
arabes unis sont félicités pour leur engagement dans le respect du droit
international.
Concernant l'Iran, la déclaration a
critiqué son ingérence dans les affaires intérieures des pays arabes qui
alimente les conflits sectaires. Elle condamne l'Iran pour son soutien aux
groupes qui alimentent ces conflits, en particulier dans la région du Golfe.
Téhéran est accusé d'alimenter le sectarisme visant à déstabiliser le royaume
et de former des groupes terroristes entraînés et financés par les Gardiens de
la révolution iraniens. L’Iran est aussi condamné pour son ingérence dans la
crise syrienne.
Infractions turques
La déclaration appelle à adopter une
position arabe unie contre les violations turques de la souveraineté irakienne,
exige qu'elle retire ses forces des territoires irakiens conformément à une
résolution de la Ligue arabe de 2015 et condamne les attaques turques contre la
Syrie.
Israël - Palestine
Elle souligne que la résolution du conflit palestino-israélien restait
essentielle pour le monde arabe. Le conflit devant être résolu conformément aux
résolutions internationales et à l'Initiative de paix arabe de 2002, qui
stipule la création d'un État palestinien selon la frontière de 1967 et ayant
Jérusalem-Est pour capitale. La déclaration soutient le plan de paix proposé
par le président Abbas qui appelle à la création d'un mécanisme international
pour parrainer des négociations de paix crédibles.
La situation en Libye est à l'ordre du jour du sommet arabe d'Alger. La
question de la tenue d'élections législatives et présidentielle en Libye sera
tranchée par des dirigeants arabes, malgré quelques réticences de la partie
égyptienne sur la représentativité du gouvernement de Tripoli. Considérée comme
inquiétante, la situation actuelle du Soudan a été abordée par les chefs d'État
arabes pour soutenir un retour à l'ordre constitutionnel au moment où le pays
connaît des manifestations pour réclamer «un pouvoir civil». Concernant le Yémen, condamnation des Houthis. La déclaration a
souligné l'attachement à l'unité du pays, sa souveraineté, sa sécurité et sa
stabilité
le 31ᵉ sommet arabe |
Conclusion
Nous avons là un chapelet de vœux pieux, de formules qui n’engagent
à rien, de déclarations redondantes, souvent sans effet sur le terrain. «De
plus, les résultats se traduisent rarement par un réel renforcement de la
coopération et de la coordination interarabe, surtout dans le domaine
économique qui gagnerait à être efficacement développé, au regard des bénéfices
partagés qu’il peut générer. Enfin, les clichés de certains dirigeants arabes
somnolant durant les séances d’ouverture en disent long sur le climat
désinvolte généralisé». [3]
Seule la tenue de ce sommet qui a été
reporté à plusieurs reprises «est déjà un exploit en soi tant les divisions sont
profondes au sein du Monde arabe», mais l’idée d’un «sommet unificateur et
inclusif» vantée par le président algérien Abdelmadjid Tebboune «ressemble
de plus en plus à un mirage». Les titres de la presse arabe sont
cruels : «Sommet arabe d’Alger : beaucoup
d’ambitions, peu d’illusions», «Le sommet des Etats Arabes à Alger ce
1er Novembre : une cacophonie»
Le drapeau national algérien flotte parmi d'autres drapeaux des pays participant au Sommet de la Ligue arabe. |
[2] Abed Charef, Jeune Afrique, 1 novembre 2022
[3] Ici Beyrouth 2 aout 2022
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