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vendredi 23 avril 2021

Joe BIDEN, l'homme pressé par Francis MORITZ

 

JOE BIDEN, L’HOMME PRESSÉ


Par Francis MORITZ

 


Le président des États-Unis l’a martelé. America is back ! Agé de 78 ans, il veut marquer son passage à la Maison Blanche. Il avance au pas de charge et fait de l’anti trumpisme sa marque de fabrique. Ses décisions sont contrastées. À l’intérieur, lancement d’un énorme programme d’investissements, une réforme du système social, une hausse des impôts tandis qu’à l’extérieur, il souffle le chaud et le froid. L’Amérique semble à nouveau saisie par ses démons en politique étrangère. On se souvient des déclarations du couple Obama-Biden aux manettes, lors du franchissement de la ligne rouge en Syrie sur l’utilisation des gaz toxiques. Deux pas en avant, trois pas en arrière. Résultat, quelques dizaines de milliers de victimes et ce n’est pas terminé. Washington n’a toujours pas la main en Syrie.



Chef de l'Otan

Les États-Unis ont forcé la main de leurs partenaires de l’Otan, sauf la Turquie, pour faire monter la tension avec Poutine qui, à 56 ans, tient fermement les rênes du Kremlin après la réforme qui lui permet de se représenter bien après le départ de l’équipe Biden-Harris. La relation privilégiée que Berlin entretient avec Washington débouche sur de nouvelles sanctions contre la Russie, tant contre des personnes du régime peu suivies d’effets, qu’au plan financier afin de rendre la situation économique du Kremlin difficile. Les investisseurs américains détiennent 7% de toutes les obligations d'État russes émises en roubles, alors que la banque centrale russe et son fonds d’investissement RDIF préparent une nouvelle émission en juin.

Sur le Donbass, le responsable en politique étrangère de l’UE, Josef Borrell, se déchaine en déclarations menaçantes sur la présence de plus de 100.000 soldats à la frontière de l’Ukraine. Elles resteront sans effet. L’Otan n’enverra pas un seul soldat mourir pour l’Ukraine. Dans le même temps, Joe Biden a qualifié le président russe de «tueur» (killer) ; il ne peut pas être plus aimable alors que parallèlement, il lui propose une rencontre au sommet. C’est prendre le président russe pour un amateur.

Le président J. Biden tend la main au président-tueur de Moscou  W. Poutine


Ces mesures et de nouvelles menaces, inquiètent les milieux industriels allemands pour qui le marché russe est très important, d’autant plus que l’on prétend également faire la leçon à la Chine. Les industriels allemands et plus largement les Européens ont tous été touchés par les sanctions contre l’Iran, dont ils se sont retirés pour ne pas subir les sanctions américaines extra territoriales qui restent une mesure unique en droit international. Les grandes banques françaises ont payé très cher pour l’apprendre à leurs dépens. L'escalade se poursuit alors que Berlin cherche à maintenir un certain degré de coopération avec Moscou dans l'intérêt de l'industrie allemande. Cela concerne le gazoduc Nord Stream 2 achevé à 90% et destiné aux besoins en hydrogène de l’Allemagne. Joe Biden veut en obtenir sa neutralisation, rien de moins.

En outre, le gouvernement allemand a récemment confirmé qu'il envisageait d'acheter le vaccin russe Covid 19 Spoutnik V.  Au Congrès américain, la pression bipartisane sur l'administration va dans le même sens et réclame de nouvelles sanctions. Des mesures sont donc en cours de discussion, directement dirigées contre Nord Stream 2 AG, la société d'exploitation, dont les investisseurs financiers incluent notamment British-Dutch Shell.

De plus, des sanctions ne sont apparemment pas exclues si l’Allemagne ou d’autres Européens décidaient d’acheter le vaccin Spoutnik V.  La raison donnée serait qu'un institut russe participant à son développement aurait une responsabilité dans l’utilisation présumée d'armes chimiques par la Russie, selon Washington, mais sans preuves. Ça semble être devenu une spécialité américaine. On n’oublie pas l’extraordinaire démonstration du tandem G.W. Bush-Colin Powell au Conseil de sécurité sur l’existence d’armes chimiques en Irak. La suite est bien connue, ce pays vit dans le chaos depuis, les attentats succèdent aux attentats, les victimes en sont toujours et encore les civils.

J. Biden et Colin Powell


Ce n’est guère plus encourageant en Afghanistan, où les Talibans qui eurent en leur temps le soutien américain pour chasser les Russes, sont revenus en force. L’Amérique va quitter ce pays le 11 septembre en laissant le gouvernement actuel face aux Talibans.

Concernant le conflit du Donbass, toutes les annonces auront fait long feu. Désormais il faut accepter les réalités ; l’Ukraine comme la Biélorussie sont toutes deux dans la zone d’influence russe. L’Ukraine ne rentrera pas dans l’Otan en dépit des bonnes paroles diplomatiques prodiguées depuis des années. Le président-dictateur Loukachenko est toujours en place.  Le groupe de Minsk, issu de l’OSCE composé de la Russie, de la France et des États-Unis ainsi que le format de Normandie composé de l’Ukraine, de l’Allemagne, de la Russie et de la France, ne servent à rien.

Sous l’autorité de Washington, l’OTAN qui n’a eu de cesse de réaliser de très grandes manœuvres militaires sur les frontières de la Russie dans le cadre de Defend Europe, exige, on se demande avec quels moyens, que la Russie retire ses troupes qui manœuvrent sur son propre territoire alors que l’Otan avait déployé en Europe des dizaines de milliers de troupes américaines pour cet exercice. Ce qui est vérité d’un côté du Dniepr ne l’est plus de l’autre semble-t-il. En revanche les fournitures américaines à l’Otan représentent un marché de milliards de dollars, auxquels les Européens sont abonnés pour longtemps avant d’être autonomes.

L’obsession américaine de vouloir isoler et détacher la Russie de l’Europe se traduit par un comportement proche d’une schizophrénie en politique étrangère, alors qu’en même temps, la France du président Macron continuait à caressait le rêve du général de Gaulle de 2003 de créer une Europe de l’atlantique à l’Oural, idée née d’ailleurs dès 1950 (non de la France à la CED). L’Allemagne n’en veut pas actuellement. Si les Verts accèdent au pouvoir après le départ d’Angela Merkel, les Américains sont assurés de leur allégeance.

Dans ces conditions on s’éloigne encore d’une UE qui ferait enfin le poids entre les deux grands géants américains et chinois qui s’opposent, pendant que le grand géant asiatique ébauche un rapprochement avec son voisin russe ; le fleuve Amour qui les sépare, porte bien son nom. Quant à l’Iran, jusqu’où le président américain subira t-il les conditions des Perses ? Entre temps il a intimé à l’allié israélien l’ordre de se taire sur ce sujet. La montre tourne, il lui reste cinq semaines au mieux.

Le président américain court trop vite et en se tirant une balle dans le pied, il risque de voir sa politique entrainer un retour à la guerre froide dont l’Europe paiera les pots cassés. On n’affronte pas impunément la Russie de Poutine qui lui, a le temps et en a vu d’autres. Comme Trump, Biden veut donner des leçons à la Chine qui a l’éternité devant elle, mais pas lui. L’UE s’y met également avec ses 27 ministres des affaires étrangères, autant dire la cavalerie légère contre les tanks.  Irrésistiblement, on pense à la fable de La Fontaine, la grenouille et le bœuf, mais c’est une autre histoire.

 

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