Le président
des États-Unis l’a martelé. America is back ! Agé de 78 ans, il
veut marquer son passage à la Maison Blanche. Il avance au pas de charge et
fait de l’anti trumpisme sa marque de fabrique. Ses décisions sont contrastées.
À l’intérieur, lancement d’un énorme programme d’investissements, une réforme
du système social, une hausse des impôts tandis qu’à l’extérieur, il souffle le
chaud et le froid. L’Amérique semble à nouveau saisie par ses démons en
politique étrangère. On se souvient des déclarations du couple
Obama-Biden aux manettes, lors du franchissement de la ligne rouge en Syrie sur
l’utilisation des gaz toxiques. Deux pas en avant, trois pas en arrière. Résultat,
quelques dizaines de milliers de victimes et ce n’est pas terminé. Washington
n’a toujours pas la main en Syrie.
Chef de l'Otan |
Les États-Unis
ont forcé la main de leurs partenaires de l’Otan, sauf la Turquie, pour faire
monter la tension avec Poutine qui, à 56 ans, tient fermement les rênes du
Kremlin après la réforme qui lui permet de se représenter bien après le départ
de l’équipe Biden-Harris. La relation privilégiée que Berlin entretient avec
Washington débouche sur de nouvelles sanctions contre la Russie, tant contre
des personnes du régime peu suivies d’effets, qu’au plan financier
afin de rendre la situation économique du Kremlin difficile. Les investisseurs américains détiennent 7%
de toutes les obligations d'État russes émises en roubles, alors que la banque
centrale russe et son fonds d’investissement RDIF préparent une nouvelle émission
en juin.
Sur le
Donbass, le responsable en politique étrangère de l’UE, Josef Borrell, se
déchaine en déclarations menaçantes sur la présence de plus de 100.000 soldats à la
frontière de l’Ukraine. Elles resteront sans effet. L’Otan n’enverra pas un
seul soldat mourir pour l’Ukraine. Dans le même temps, Joe Biden a qualifié le
président russe de «tueur» (killer) ; il ne peut pas être plus
aimable alors que parallèlement, il lui propose une rencontre au sommet. C’est
prendre le président russe pour un amateur.
Le président J. Biden tend la main au président-tueur de Moscou W. Poutine |
Ces mesures
et de nouvelles menaces, inquiètent les milieux industriels allemands pour qui
le marché russe est très important, d’autant plus que l’on prétend également
faire la leçon à la Chine. Les industriels allemands et plus largement les Européens
ont tous été touchés par les sanctions contre l’Iran, dont ils se sont retirés
pour ne pas subir les sanctions américaines extra territoriales qui restent une
mesure unique en droit international. Les grandes banques françaises ont payé
très cher pour l’apprendre à leurs dépens. L'escalade se poursuit alors que Berlin cherche à
maintenir un certain degré de coopération avec Moscou dans l'intérêt de
l'industrie allemande. Cela concerne le gazoduc Nord Stream 2 achevé à 90% et
destiné aux besoins en hydrogène de l’Allemagne. Joe Biden veut en obtenir sa
neutralisation, rien de moins.
En outre, le
gouvernement allemand a récemment confirmé qu'il envisageait d'acheter le
vaccin russe Covid 19 Spoutnik V. Au Congrès américain, la pression bipartisane
sur l'administration va dans le même sens et réclame de nouvelles
sanctions. Des mesures sont donc en cours de discussion, directement
dirigées contre Nord Stream 2 AG, la société d'exploitation, dont les
investisseurs financiers incluent notamment British-Dutch Shell.
De plus, des sanctions
ne sont apparemment pas exclues si l’Allemagne ou d’autres Européens décidaient
d’acheter le vaccin Spoutnik V. La raison donnée serait qu'un institut
russe participant à son développement aurait une responsabilité dans
l’utilisation présumée d'armes chimiques par la Russie, selon Washington, mais
sans preuves. Ça semble être devenu une spécialité américaine. On n’oublie pas
l’extraordinaire démonstration du tandem G.W. Bush-Colin Powell au Conseil de sécurité
sur l’existence d’armes chimiques en Irak. La suite est bien connue, ce pays
vit dans le chaos depuis, les attentats succèdent aux attentats, les victimes en
sont toujours et encore les civils.
J. Biden et Colin Powell |
Ce n’est guère plus
encourageant en Afghanistan, où les Talibans qui eurent en leur temps le
soutien américain pour chasser les Russes, sont revenus en force. L’Amérique va
quitter ce pays le 11 septembre en laissant le gouvernement actuel face aux
Talibans.
Concernant le conflit
du Donbass, toutes les annonces auront fait long feu. Désormais il faut
accepter les réalités ; l’Ukraine comme la Biélorussie sont toutes deux
dans la zone d’influence russe. L’Ukraine ne rentrera pas dans l’Otan en dépit
des bonnes paroles diplomatiques prodiguées depuis des années. Le président-dictateur
Loukachenko est toujours en place. Le
groupe de Minsk, issu de l’OSCE composé de la Russie, de la France et des États-Unis
ainsi que le format de Normandie composé de l’Ukraine, de l’Allemagne, de la
Russie et de la France, ne servent à rien.
Sous l’autorité de Washington,
l’OTAN qui n’a eu de cesse de réaliser de très grandes manœuvres militaires sur
les frontières de la Russie dans le cadre de Defend Europe, exige, on se
demande avec quels moyens, que la Russie retire ses troupes qui manœuvrent sur
son propre territoire alors que l’Otan avait déployé en Europe des dizaines de
milliers de troupes américaines pour cet exercice. Ce qui est vérité d’un côté
du Dniepr ne l’est plus de l’autre semble-t-il. En revanche les fournitures
américaines à l’Otan représentent un marché de milliards de dollars, auxquels
les Européens sont abonnés pour longtemps avant d’être autonomes.
L’obsession américaine
de vouloir isoler et détacher la Russie de l’Europe se traduit par un
comportement proche d’une schizophrénie en politique étrangère, alors qu’en
même temps, la France du président Macron continuait à caressait le rêve du
général de Gaulle de 2003 de créer une Europe de l’atlantique à l’Oural, idée
née d’ailleurs dès 1950 (non de la France à la CED). L’Allemagne n’en veut pas
actuellement. Si les Verts accèdent au pouvoir après le départ d’Angela Merkel,
les Américains sont assurés de leur allégeance.
Dans ces conditions on
s’éloigne encore d’une UE qui ferait enfin le poids entre les deux grands
géants américains et chinois qui s’opposent, pendant que le grand géant
asiatique ébauche un rapprochement avec son voisin russe ; le fleuve Amour
qui les sépare, porte bien son nom. Quant à l’Iran, jusqu’où le président
américain subira t-il les conditions des Perses ? Entre temps il a intimé
à l’allié israélien l’ordre de se taire sur ce sujet. La montre tourne, il lui
reste cinq semaines au mieux.
Le président
américain court trop vite et en se tirant une balle dans le pied, il risque de
voir sa politique entrainer un retour à la guerre froide dont l’Europe paiera les
pots cassés. On n’affronte pas impunément la Russie de Poutine qui lui, a le
temps et en a vu d’autres. Comme Trump, Biden veut donner des leçons à la Chine
qui a l’éternité devant elle, mais pas lui. L’UE s’y met également avec ses 27
ministres des affaires étrangères, autant dire la cavalerie légère contre les
tanks. Irrésistiblement, on pense à la
fable de La Fontaine, la grenouille et le bœuf, mais c’est une autre histoire.
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