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mardi 26 janvier 2021

L'illusion de la réussite économique de Trump

 

L’ILLUSION DE LA RÉUSSITE ÉCONOMIQUE DE TRUMP

Par Jacques BENILLOUCHE

Copyright © Temps et Contretemps  


           Après quatre années de présidence de Donald Trump, le bilan économique a été en trompe-l’œil. Il faut tordre le cou aux informations qui présentent son mandat comme une réussite exceptionnelle. Les inconditionnels de Trump, qui regrettent son départ, tentent d’utiliser des arguments forts pour vanter l’excellence du bilan économique du président américain. Les néophytes, peu curieux de la véracité des faits, peuvent se satisfaire d’arguments non justifiés et reprendre comme des perroquets le thème d’une réussite inégalée. Même certains journalistes, souvent militants ou engagés, se bornent à diffuser une information tronquée. Mais les professionnels doutent sérieusement de la qualité de ce bilan. L’illusionniste américain a jeté un flou sur son héritage économique en faisant croire qu’il était le meilleur depuis plusieurs présidents dans les domaines du chômage, de la croissance et des cours boursiers. Les Américains vont à présent juger à sa juste mesure l’impact des décisions de Trump durant son mandat du 20 janvier 2017 au 20 janvier 2021. Seuls les chiffres et les indicateurs puisés auprès des instituts officiels de statistiques peuvent attester de la réalité économique d’une manière incontestable.



            Chômage : peu de changements

Selon les statistiques officielles, Barack Obama avait pris ses fonctions en 2009, après la crise des subprimes de 2007/2008, avec un taux de chômage de 9,3% qui a été réduit chaque année durant ses deux mandats successivement à 9,6%, 8,9%, 8,1%, 7,4%, 6,2%, 5,3%, 4,9% et en 2017, à son départ, à 4,4% ce qui correspondait à un plein emploi. Donald Trump a hérité d'un chômage tombé à 4,4%, son plus bas niveau depuis neuf ans, grâce à l’élan donné par Obama. Il s’est ensuite stabilisé de manière linéaire pour atteindre 3,9%, sans que Trump n’ait pu modifier de manière tangible la tendance et sans qu’il puisse se targuer d’être le seul père du plein emploi. Il n’a pas fait mieux, contrairement à ses affirmations. Il a simplement maintenu l’élan lancé par Obama.



Croissance économique  

La croissance, après l’année noire de 2009 avec moins 2,5%, a connu une certaine stabilité de 2010 à 2018 avec successivement des chiffres positifs 2,6%, 1,6%, 2,2%, 1,8%, 2,5%, 2,9%, 1,6% et 2,2% au départ d’Obama en 2017. Après trois années de présidence Trump, l’économie américaine a atteint 2,9% en 2018 et 2019, la plus longue expansion de son histoire sans pour autant marquer d’accélération mais plutôt une simple stabilité. On ne peut pas parler de rupture tangible. Trump a suivi le mouvement engagé par Obama.



Déficit public

Alors que le déficit budgétaire s’était creusé de 2009 à 2012 à 6% puis réduit par Obama de 2013 à 2016 successivement négatif de 4,1%, 2,8%, 2,4% et 3,2% en 2016, la situation s’est aggravée à partir de 2017 avec des dépenses supérieures aux recettes -3,5%, -4,2% et -4,6% en 2019. Les déficits budgétaires se sont donc détériorés au cours du mandat de Trump. Le déficit public s’est accentué de 4,4% du PIB en 2016 à 6,3% en 2019. Ce résultat budgétaire est lié à la réforme fiscale adoptée à la fin de l'année 2017 (Tax Cuts and Jobs Act of 2017), faisant passer le montant de l'impôt sur les sociétés de 35% à 21%. Par ailleurs l’impôt sur les revenus des ménages les plus aisés a été réduit. Cela a alourdi le poids de la dette publique qui est passée de 106,6% du PIB en 2016 à 108,7% en 2019. D’ailleurs le FMI a calculé que les baisses d’impôts ont entrainé un coût budgétaire cumulé de 10% du PIB sur la période 2018/2027.



Dette publique.

La dette publique augmente à chaque fois qu'une dépense publique (investissement ou fonctionnement) est financée par l'emprunt plutôt que par l'impôt, lorsque l'équilibre des comptes publics est en déficit. La dette publique qui était de 11.909 milliards de dollars en 2009 et était passée à 19.573 en 2016. En 2017 à l’arrivée de Trump elle s’est envolée à 20.244 puis 21.516 en 2018. La dette nationale américaine a atteint aujourd'hui 22.000 milliards de dollars, un record historique sous Donald Trump, soit l'équivalent du PIB américain pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale.

Compte tenu de ces chiffres irréfutables venant de source officielle, les quatre années de présidence Trump n’ont pas changé de manière notable l’économie américaine comme on l’entend souvent de la part de ses partisans. Il n’y a pas eu de rupture nette mais, au contraire, dans certains domaines il y a eu aggravation. Certes il est trop tôt pour tirer un bilan de ces quatre années car l’impact des mesures prises par l’administration Trump, notamment fiscales, continuera à se faire ressentir dans les années à venir. Mais certaines performances économiques masquent des indicateurs sociaux dégradés, à commencer par le niveau de pauvreté et d’inégalités. Les mesures fiscales prises sous Trump vont se traduire par une aggravation des inégalités. Un constat inquiétant pour la cohésion de la société américaine déjà mise à mal par les quatre années du mandat de Donald Trump. 

Bref la réussite économique est une réussite en trompe l’œil, elle permet aux inconditionnels de Trump de justifier leur idolâtrie à l’égard d’un personnage populiste qui a divisé le pays et les communautés. Les historiens auront le temps de mesurer l'effet désastreux du mandat d'un président qui n'était pas fait pour la fonction. On ne s'improvise pas dirigeant de la plus grande puissance mondiale.

2 commentaires:

MIKO a dit…

OBAMA C ETAIT PAS TERRIBLE NON PLUS.

Elie BENICHOU a dit…

A la lumière de cet article à charge contre D. Trump (un de plus, dirons-nous, dans la presse francophone), j’aimerais bien que l’on m’explique pourquoi Trump a-t-il augmenté de 10 millions de voix son score à l'élection. Et c’est vrai notamment auprès de la population Latinos et Noire. Est ce parce que ces deux catégories ont particulièrement bénéficié de l’essor économique durant l’ere Trump ?? (chose qu’on lit rarement, bien évidemment).