LE LIKOUD DISPOSE D’UN SOCLE
INÉBRANLABLE
Par Jacques BENILLOUCHE
Les sondages, sous réserve qu’on y croit, montrent une certaine stabilité voire une progression des intentions de vote pour le Likoud caracolant en tête et laissant ses adversaires à plusieurs sièges derrière lui. Netanyahou se maintient malgré une coalition de partis qui se dressent contre lui. Plusieurs explications peuvent être données à ce phénomène inédit dans les pays occidentaux qui voient, les uns après les autres, leurs dirigeants contestés par leurs bases, rejoindre les tiroirs de l’Histoire.
Le seul moyen pour
fragiliser Netanyahou est de s’attaquer à son socle inébranlable. Comme un
immeuble bâti sur pilotis, il faut s’attaquer aux piliers qui le supportent et
en particulier à l’héritage de Menahem Begin. Ce leader de droite s’identifiait
à la caricature convenue du Juif ashkénaze triste et austère mais au fil du
temps, est apparue une personnalité tout en paradoxes avec son élégance
vestimentaire surannée, costume-cravate, qui le distinguait des autres
dirigeants sionistes à la chemise blanche ouverte. Il avait tout de l’homme
courtois dans ses rapports avec ses adversaires mais surtout, il savait
soulever les foules par son magnétisme d’orateur. C’était un homme simple tout
comme d’ailleurs Itzhak Shamir qui ont vécu chichement dans leurs deux pièces
de Tel Aviv, souvent de location.
Begin face à son évier de cuisine |
Mais Menahem Begin était déterminé avec une
fièvre intérieure qui le rendait parfois inquiétant parce qu’il arborait les
extrêmes en ne jurant que par Jabotinsky et par le révisionnisme qui l’entrainèrent
à se heurter violemment aux sionistes socialistes tout en faisant preuve d’une
retenue en tant qu’opposant responsable. Il avait une réputation d’homme rigide
et sectaire qui le rendit infréquentable. Mais il a su exploiter la chance
inespérée de l’usure des Travaillistes au gouvernement. Il avait compris que
pour arriver au pouvoir, lui l’ashkénaze froid, pur et dur, il devait s’appuyer sur
une communauté martyrisée et dédaignée, bonne à fournir une main d’œuvre à bon
marché après avoir été envoyée dans des contrées lointaines, aux portes du Néguev
en particulier, pour peupler les zones arides. À leur contact, il était alors entré
dans la peau d’un homme d’État plein de convictions.
Leaders des Black Panthers |
Begin avait décidé de rendre son honneur à cette communauté de travailleurs qui avait œuvré pour élever le pays au rang des pays occidentaux. Il avait donc fait d’un maçon d’origine marocaine, David Levy, un ministre des affaires étrangères et d’un lettré francophone, Yéhouda Lancry, maire d’un petit trou au nord du pays, un ambassadeur en France et à l’ONU. Ils n’ont pas fait rougir leur communauté ; au contraire ils l’ont boostée pour montrer qu’ils étaient des hommes capables, aussi efficaces que les créateurs historiques du pays.
David Levy et Madeleine Albright |
En conséquence les concurrents de
Netanyahou, en particulier Gideon Saar qui dispose de qualités intrinsèques
solides, doivent s’attaquer aux fondements du Likoud pour faire écrouler une
partie de l’édifice en puisant dans la représentation séfarade. Ils doivent
inclure dans leurs listes des «marocains» à des postes éligibles pour
vider le parti d’une partie de son essence, mais pas à travers la caricature vivante des
séfarades parvenus et grossiers. D’ailleurs, le Likoud a la liste la plus
remplie de Séfarades qui représentent la moitié de la population mais à peine
10% des dirigeants.
Marché Mahane Yehouda Jérusalem |
Saar doit descendre d’une marche de son piédestal
et s’adresser à l’électorat populaire du Likoud qu’il connait pourtant, les commerçants
du Souk Hacarmel et de Mahane Yéhouda, les chauffeurs de taxi et les petites
gens du sud du pays. Il doit exploiter la qualification de Bloomberg qui l’a
nommé parmi les huit meilleurs individus à surveiller en 2021.
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