LE LIBAN PREND AU SÉRIEUX LA MENACE ISRAÉLIENNE
Par Jacques BENILLOUCHE
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Général Joseph Aoun |
Le Liban semble mesurer le danger de l’activisme du Hezbollah influant sur la situation sécuritaire au Moyen-Orient. Dans une sorte de réponse à notre article de Temps et Contretemps [1], le commandant en chef de l'armée libanaise, le général Joseph Aoun, a exhorté ses troupes à «rester en alerte le long de la frontière-sud» estimant que la «stabilité sécuritaire actuelle est le résultat des actions contre les cellules terroriste».
Le général Aoun a lancé son ordre du jour à la troupe :
«En ces temps de bouleversements et de grands conflits internationaux,
restez en alerte le long de la frontière-sud entre le Liban et Israël, afin de
déjouer les plans et menaces de l'ennemi israélien et ses tentatives de prendre
le contrôle d'une partie de notre territoire et de nos ressources pétrolières».
Il a appelé les militaires à «poursuivre leur mission et défendre leur
terre et leur peuple, en coopération avec la Force intérimaire de l'ONU au
Liban Finul».
La Finul et ses 11.400 soldats, ont été installés depuis 1978 par le Conseil de sécurité de l'ONU pour compenser le
retrait des troupes israéliennes du sud du Liban. En 2006, elle avait été chargée
par le Conseil de Sécurité de contrôler la cessation des hostilités. Le 30 août
2017, le Conseil de sécurité de l'ONU avait renouvelé son mandat pour une année
supplémentaire, sans en changer les prérogatives, alors que les Etats-Unis et
Israël souhaitaient que les soldats de l'ONU puissent être chargés de rechercher
les caches d’armes du Hezbollah. Israël et le Liban ont peu de contentieux à l’exception des
quelques arpents de terre des fermes de Shabaa et des collines de Kfarchouba
convoités par les deux pays.
Le chef d’Etat-major libanais semble vouloir se
dédouaner vis-à-vis d’Israël, malgré la capacité de nuisance du Hezbollah, en
saluant les efforts menés par l'armée régulière dans la lutte contre le
terrorisme et en rappelant la bataille lancée en août 2017 contre les djihadistes installés dans les hauteurs de Ras Baalbeck
et Qaa, deux localités de la Békaa proches de la frontière syrienne : «Vous avez expulsé les terroristes et éloigné le danger qu'ils représentaient et
maintenant, vous avez pu vous déployer le long des frontières nord et est du
Liban afin d'empêcher l'infiltration de groupes terroristes. La stabilité
sécuritaire qui prévaut actuellement à l'intérieur du pays est le résultat de
vos actions continues pour débusquer les cellules terroristes et les démanteler».
Le Liban lance l'opération "l'aube des Jurds pour chasser Daesh hors de ses frontières / |
Pour prouver son activisme contre le terrorisme, il a rappelé que le 19 août 2017, l'armée libanaise avait
lancé l'opération «Aube des Jurds à l'issue de laquelle
elle était parvenue à chasser les djihadistes de Daesh qui sévissaient sur les
hauteurs des villages chrétiens de Ras Baalbeck et Qaa. Le général Aoun a affirmé «qu'il n'y a aucune place
au Liban pour ceux qui mettent en péril la sécurité, et l'armée est déterminée
à protéger le citoyen des malveillances de ces criminels et du fléau que
représentent les drogues, qui menacent notre société». En fait, il
s’agit de donner un point de bonne conduite à l’armée libanaise qui ne doit pas
être accusée de laxisme, encore moins de vouloir attaquer son voisin du sud. Le général souhaite être
déchargé de responsabilité à l’égard de toute opération militaire israélienne.
Qassem Soleimani et ses adjoints |
Israël vise le Hezbollah car il cible indirectement
les Iraniens qui ne dérogent jamais à leur stratégie d’agir par procuration. En
effet, le général Qassem Soleimani, chef de la Force Al-Quds, groupe secret
d'intervention extraterritoriale des Gardiens iraniens de la révolution, a mis en place plusieurs milices locales
pro-iraniennes, à l’instar du Hezbollah, pour la conduite d'opérations
synchronisées sur plusieurs fronts. D’ailleurs, Benjamin Netanyahou avait
accusé le Hezbollah d’avoir installé des missiles en plein quartier résidentiel
dans la banlieue sud de Beyrouth et le long de la route de l’aéroport. Il avait
dévoilé à la tribune de l’ONU des photos aériennes des missiles. Le ministre
des Affaires étrangères, Gebran Bassil, s’était inquiété des conséquences au
point de se tourner vers tous les diplomates étrangers accrédités au Liban pour
leur prouver que les allégations israéliennes étaient fausses.
Gebran Bassil |
L’inquiétude avait été portée à son paroxysme lorsque
Israël avait prévenu par SMS tous les habitants de la banlieue sud de Beyrouth leur
signifiant que Tsahal se réservait le droit d’intervenir contre les caches de
missiles dans les quartiers populaires. Hassan Nasrallah avait alors accusé
Israël de guerre psychologique israélienne sous prétexte de préparer le terrain à une attaque
israélienne imminente dans le but de détruire ces missiles. Des émissaires occidentaux ont été envoyés
au Liban pour alerter le gouvernement libanais que les menaces israéliennes
devraient être prises au sérieux.
Les responsables libanais se sentent, à tort, à l’abri
d’une frappe israélienne contre le Hezbollah car depuis la chute de l’avion
russe à Lattaquié en septembre, les Russes ont interdit l’usage de l’espace aérien syrien sans leur
autorisation et ont installé un système de défense anti-aérien S-300. Ils sont
persuadés que l’espace aérien libanais est à présent couvert par ces missiles. Israël peut bombarder les positions du Hezbollah en évitant les zones
contrôlées par les Russes et les Syriens.
Il est vrai que l’espace aérien libanais, jusque-là contrôlé par les Américains, vient de passer sous le contrôle des radars russes ce qui limite la liberté d’action israélienne. Mais l’aviation de Tsahal a plus d’une solution dans ses cartons pour viser le Hezbollah, sans faire de dommages collatéraux. C’est pourquoi les dirigeants libanais sont très inquiets car ils savent que les menaces israéliennes ne sont pas lancées à la légère, surtout lorsque la sécurité d’Israël est en jeu.
Il est vrai que l’espace aérien libanais, jusque-là contrôlé par les Américains, vient de passer sous le contrôle des radars russes ce qui limite la liberté d’action israélienne. Mais l’aviation de Tsahal a plus d’une solution dans ses cartons pour viser le Hezbollah, sans faire de dommages collatéraux. C’est pourquoi les dirigeants libanais sont très inquiets car ils savent que les menaces israéliennes ne sont pas lancées à la légère, surtout lorsque la sécurité d’Israël est en jeu.
Par ailleurs, le gouvernement libanais devrait se
méfier des cris de victoire lancés par le Hamas après le lancement de 400
roquettes contre le sud israélien, ayant conduit à la démission du ministre de
la défense Avigdor Lieberman. Il ne devrait pas interpréter cela comme une
attitude de faiblesse mais comme une volonté de laisser la porte des
négociations ouverte. L’acceptation de la trêve était au contraire un
signification de force car Tsahal refusait d’exploiter à fond sa supériorité
militaire face à des miliciens, certes déterminés, mais militairement
défavorisés et temporairement ménagés par Netanyahou. L’armée avait conseillé
aux dirigeants politiques d’accepter la demande du cessez-le-feu formulée par
le Hamas pour des raisons stratégiques mais également pour des raisons
tactiques et opérationnelles. Les Israéliens n’auraient eu aucun mérite à
détruire l’infrastructure militaire du Hamas et du Djihad islamique en quelques
jours. Ils savent que le danger vient certainement du Nord, et qu’ils
pourraient décider d’une attaque contre le Liban sans s’inquiéter des menaces
d’esbroufe proférées par le secrétaire général du Hezbollah.
Le général Joseph Aoun s’inquiète à juste titre de la
situation qui menace son pays tenu pour responsable des représailles du
Hezbollah. Ses dernières déclarations devraient plutôt
s’adresser à la milice libanaise qui a gangrené tout le pays avec le risque
d’une nouvelle libanisation du Liban.
4 commentaires:
Le comportement du gouvernement lors des derniers événements au sud n est il pas tout simplement liealune politique de dissuasion interne plutôt qu extérieure ?
On va dormir tranquille pendant que le libaLsud et gaza renforcent leur armement !
S'ils pouvaient être raisonnables et souhaiter vivre en paix... ils ne seraient plus menacés.
Le Liban et Israël n'ont aucune raison d'être ennemis.
Oui mais le Liban "chasse gardée de la France" disait de Gaulle, permettez moi d'en rire- est entre les mains du Hezbollah...donc de l'Iran qui attendent leur heure.
Cher monsieur Be,illouche,
Où en est la guerre secrète d'Israël contre l'Iran dont le Liban semble devoir faire les frais ?
https://www.les-crises.fr/la-guerre-secrete-disrael-contre-liran-selargit/
Très cordialement.
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