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mercredi 14 novembre 2018

En Israël, le monde des officiers sans nom et sans visage



EN ISRAËL, LE MONDE DES OFFICIERS SANS NOM ET SANS VISAGE

Par Jacques BENILLOUCHE
Copyright ©  Temps et Contretemps



            

          Dans le cadre d’une opération des forces spéciales israéliennes, le 11 novembre à Gaza, le lieutenant colonel de réserve M. est tombé sous les balles du Hamas. Son nom et sa photo sont censurés par l’armée et cela rappelle l’histoire du lieutenant-colonel Moreno, franco-israélien mort au Liban, en 2006, dont le visage n’a pas été publié à ce jour. Ces officiers discrets agissent au-delà des frontières israéliennes, dans le cadre de missions confiées directement par le gouvernement. La structure sécuritaire de Tsahal est totalement dépendante de ces mystérieux militaires, toujours disponibles, souvent des réservistes rappelés pour une mission ponctuelle.


Tombe de E. Moreno

            Ces hommes sont condamnés à rester anonymes parce que leur visage pourrait révéler certains contacts secrets et mettre en danger des collaborateurs arabes efficaces. Le premier ministre, qui a écourté son voyage à Paris, a rappelé «la dette énorme envers ce soldat tombé au combat. Le jour viendra où nous pourrons dire tout ce qu’a été sa bravoure». Le ministre de la défense, Avigdor Lieberman, a confirmé que les contributions du lieutenant-colonel M, mort «lors d'une mission de collecte de renseignements qui a mal tourné, pourraient ne jamais être publiquement connues».
            C’est le drame de ces héros, toujours prêts à se sacrifier pour leur pays, qui acceptent de vivre dans l’anonymat sans faire les unes des médias, ce qui est en quelque sorte contraire à la véritable nature humaine qui aime les podiums, les honneurs et les médailles.

            L'autre héros, toujours dans les mémoires, est sinon méconnu, toujours mystérieux car aucune de ses missions n’a jamais été révélée. Ce franco-israélien, Emmanuel Moreno, né en France en 1971, s’était installé avec ses parents en 1972 à Jérusalem. Il a intégré la prestigieuse «Sayeret Maatkal», l’unité d’élite de reconnaissance de l’État-Major, dont le rôle n’est pas de combattre, à la rigueur se défendre, mais de collecter des renseignements militaires dans le cadre d’opérations secrètes au-delà des frontières d’Israël, souvent dans des pays ennemis. 

Moreno et Bennett

          Il avait atteint le grade de lieutenant-colonel qui avait fait dire à son chef que «si Tsahal est la meilleure armée du monde et Sayeret Maatkal la meilleure unité de Tsahal, alors Emmanuel est le meilleur soldat du monde». Il est tombé en 2006 au Liban à l’occasion d’une opération secrète dont le public ignore encore la teneur. Emmanuel Moreno avait crapahuté en même temps que le ministre actuel de l’Éducation, Naftali Bennet, leader des sionistes religieux.
            Le lieutenant-colonel M. qui est tombé à Gaza dans la nuit du 11 novembre 2018 est un soldat de la même trempe qui, redevenu «civil», a gardé ses attributions pour des missions secrètes. Il est mort en réserviste de l’armée. Toujours volontaire pour servir Tsahal, il était toujours prêt à mettre son expérience de combattant pour aider son armée et son pays.

L’unité Sayeret Maatkal est considérée comme la meilleure unité de combat de l’armée israélienne, et l’une des meilleures unités de forces spéciales au monde. L’unité n’est rattachée à aucun commandement régional, ne répond aux ordres que de l’État-major israélien et fait partie de la Branche des Renseignements de l’armée. Un candidat sur 100 est sélectionné car, en plus des qualités physiques et intellectuelles, il doit faire preuve de sang-froid, d’initiative, de motivation, d’abnégation, de solidarité vis-à-vis de ses soldats, de capacité rapide de jugement et bien sûr de courage. Ils disposent d’un équipement technologique de haut-niveau. La formation dure près de deux ans. Après un entraînement de quatre mois parmi les parachutistes, ils suivent un entraînement spécifique à base d’épreuves physiques intenses. Par la suite, ils entament une formation spécialisée comprenant 15 semaines de navigation dans le désert, des exercices de repérage, des exercices anti-terroristes, une formation de tireur d’élite de Tsahal, une préparation psychologique  et des séances de camouflage.

Bien que les missions soient toutes secrètes, on connaît quelques épopées de cette unité. On se souvient de la libération des otages d’Entebbe, dans la nuit du 3 au 4 juillet 1976, à la suite du détournement du vol Air France par un commando composé de membres du FPLP. Le raid, baptisé Opération Tonnerre, avait été planifié et exécuté par le frère du premier ministre, le colonel Jonathan (Yoni) Netanyahou, seul soldat israélien tué au cours du raid.
Une autre opération de Sayeret Maatkal a frappé les esprits, l’Opération Printemps de la Jeunesse ou Opération Colère de Dieu, visant à éliminer les auteurs du massacre des 11 athlètes israéliens commis pendant les Jeux olympiques de Munich en 1972.
Nour el-Deen Baraka,

Selon le Hamas, les forces de Tsahal sont entrées, le 11 novembre 2018, dans la bande de Gaza et ont tué Nour el-Deen Baraka, le commandant de la brigade Khan Yunis de la branche armée des brigades Ezzedine al-Kassem. Six autres membres du Hamas ont été tués lors de l'opération dont le but, resté secret, n'était pas de tuer des Gazaouis. Selon des sources sécuritaires palestiniennes, les affrontements se sont produits à l'est de Khan Younès. 
C'est parce que le commando israélien, qui circulait dans un véhicule civil, a été découvert que des coups de feu ont été échangés. L'équipe israélienne n'avait pas pour mission d'affronter des Gazaouis mais d'installer du matériel électronique de surveillance de haute technologie. Pour permettre au commando d'être exfiltré, des avions et des hélicoptères israéliens ont tiré plus de 40 missiles dans la région. D'autre part les photos diffusées montrent le véhicule israélien entièrement calciné par l'aviation de Tsahal pour détruire le matériel électronique qu'il contenait avant qu'il ne tombe entre les mains du Hamas. On ne saura jamais plus au sujet de cette mission.



Tous ces jeunes, qui engagent leur vie pour servir, méritent notre respect et notre reconnaissance parce qu’ils assurent, par le sacrifice de leur vie, la sécurité du pays.  

1 commentaire:

David a dit…

Un grand respect et une infinie reconnaissance pour ces soldats d'élite parmi les meilleurs au monde.