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dimanche 26 juin 2016

L'influence du Brexit sur Israël



L’INFLUENCE DU BREXIT SUR ISRAËL

Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps

           



          Les Britanniques ont voté et ont décidé de quitter l’Europe ; c’est leur choix et c’est leur responsabilité. Le résultat a été clair : 52% ont choisi la sortie de l’Europe. Pour la deuxième fois dans l'histoire de l'UE, un État membre va quitter le bloc ; le Groenland a été le premier pays à le quitter en 1985. La Grande-Bretagne a voté pour le Brexit pour trois raisons principales: le coût financier élevé pour faire partie de l’UE, le scepticisme quant aux avantages économiques d’une adhésion à la zone euro en difficulté, et le désir d'un plus grand contrôle sur l'immigration. La démocratie implique que les décisions du peuple seront appliquées. Mais selon les premières statistiques les «vieux» ont voté en majorité pour le Brexit alors que les jeunes ont fait le choix de l'Europe car ils craignent les conséquences sur leur avenir.



          Après ce vote, il faut saluer la vigueur de la démocratie anglaise et le sens des responsabilités de ses dirigeants. Le premier ministre David Cameron a endossé l’échec du referendum et a décidé de démissionner de son poste en octobre, pour laisser le temps à son parti de lui trouver un successeur. Ce n’est pas le genre d’acte que l’on voit en France où en Israël où les élus s’accrochent à leur poste pour finir par en être exclus par la force. 
          La sortie de la Grande-Bretagne de l’Europe prendra un certain temps, deux ans au moins, car le processus est long et les négociations difficiles. À terme, l’incertitude régnera. De nombreux fonctionnaires européens se trouveront au chômage ainsi que les députés anglais au parlement européen. Les Anglais devront s'habituer à vivre seuls avec leur livre sterling.
          Le Brexit affectera certainement Israël mais les conséquences ne sont pas totalement encore tracées. Le doute sur le résultat avait entraîné les dirigeants israéliens à être discrets durant la campagne et à ne pas s’immiscer dans le débat anglais. Ils voulaient considérer le Brexit comme une affaire strictement interne au Royaume-Uni.

          Mais Israël est directement concerné en raison de la décision de l’Union européenne d’approuver l’initiative de paix de la France qui devrait être tranchée par une conférence de paix internationale devant se tenir avant la fin de l’année. Le ministère israélien des affaires étrangères avait condamné cette initiative et comptait sur les Anglais pour en atténuer les effets : «Les conférences internationales comme celles des ministres des Affaires étrangères de l'UE ne font que repousser la paix encore plus loin car elles permettent aux Palestiniens d’éviter les négociations directes et les compromis». Israël voit donc une voix modérée en sa faveur quitter l’Europe. En effet les liens étroits entre les États-Unis et la Grande-Bretagne pèsent pour un a priori favorable aux thèses israéliennes. Les Britanniques sont les seuls capables de faciliter les efforts américains pour permettre à Israël de trouver une autre issue à celle des Français dans le processus de paix. 
Une certaine vision du Brexit

          L’Union européenne est un partenaire commercial important pour Israël tandis que la Grande-Bretagne est un leader actif au sein de l’Otan, en particulier en ce qui concerne la lutte contre le terrorisme. Le Brexit risque d’affaiblir l’Europe dans sa lutte contre les menaces islamiques ce qui fera certainement l’affaire de Vladimir Poutine. David Cameron est un ami sincère d’Israël et il l’a prouvé en développant depuis son arrivée au pouvoir des liens sur le plan de la défense et du renseignement militaire. Il avait tout fait en 2014 pour empêcher une condamnation de la campagne de Gaza. 
          Israël perdra un défenseur plus prudent quand il s’agit de l’avenir des implantations considérés par l’Union européenne comme un obstacle à la paix. En revanche, certains observateurs veulent y voir un aspect positif car le départ des Britanniques affaiblira l’Union européenne qui serait alors dans l’impossibilité de multiplier ses actions anti-israéliennes. Le Brexit jouerait sur le sentiment nationaliste en évolution en Europe ce qui serait bon pour Israël qualifié de pays nationaliste. 

          Les Palestiniens pensent que le Brexit n’aura aucun impact sur eux car l’Europe a montré depuis longtemps ses sympathies pour la cause palestinienne. Ce n’est pas le sentiment des Jordaniens qui craignent beaucoup cette sortie de la Grande-Bretagne de l’Europe : «Il y a une longue relation historique et un sentiment que les Britanniques ont une compréhension de la région et de sa géographie et de l'histoire. Beaucoup estiment que le régime jordanien a été créé et maintenu par la Grande-Bretagne. L'UE sans la Grande-Bretagne serait un inconnu, un point d'interrogation ; il y a un sentiment d'incertitude sur ce qui se passerait, et qui dirigerait l'UE».
          Le Premier ministre britannique David Cameron avait déclaré le 20 juin à un groupe de Juifs britanniques qu’Israël avait besoin du Royaume-Uni au sein de l'Union européenne pour lutter contre les menaces de BDS (Boycott, Désinvestissement et Sanctions : «Avec le Brexit, je vois tout le contraire de ce qui a fait que notre pays est grand. Je suis fier que la Grande-Bretagne soit le foyer de personnes qui ont fui la persécution, y compris ceux qui ont fui les nazis ou les pogroms russes». 
          Le Brexit aura des conséquences pour Israël, que ce soit directement ou indirectement. Israël avait un intérêt à la composition actuelle de l' UE, bien que très affaiblie en interne. A l’instar de plusieurs organismes internationaux, l'UE s’affiche contre Israël en interférant dans ses affaires intérieures en appliquant des normes doubles comme son exigence d'étiquetage des produits venant de la Cisjordanie et du Golan. L'instabilité en Europe résultant du Brexit pourrait créer des inconvénients pour Israël. En effet l'UE impose des règles générale qui limitent l’action de certains pays en jouant parfois le rôle de modératrice. 
Jérémy Corbyn

          Le Brexit permettrait de libérer le Royaume-Uni des engagements lui imposant d'agir en conformité avec les politiques globales de l'UE. Or en cas d’alternance, un gouvernement travailliste serait libre de ses décisions face à Israël qui peut tout craindre de l’arrivée au pouvoir du «gauchiste» Jeremy Corbyn qui aurait les mains libres et qui inclue le Hamas et le Hezbollah parmi «ses amis». C’est une éventualité à ne pas exclure car le Brexit a fracturé le parti conservateur avec pour conséquence le risque de leur faire perdre les prochaines élections. Dans ce cas, de nombreux postes gouvernementaux seraient confiés à des ennemis avérés d'Israël. L’UE avait un rôle contraignant pour le Royaume-Uni et cela ne sera plus le cas.

          Il ne faut pas négliger non plus le sort des milliers de jeunes Juifs vivant au Royaume- Uni qui ont à craindre du Brexit. Cette colonie croissante de Juifs français qui, ces dernières années, ont quitté la France pour la Grande-Bretagne d’une part pour des questions d’intérêt professionnel mais aussi en raison d’une ambiance antisémite générée par les milieux islamistes. Ils devront certainement passer par un processus bureaucratique pour garder le droit de vivre et de travailler au Royaume-Uni ; certains pourraient même être expulsés du territoire.

          Nul n’est capable de prévoir ce qu’il adviendra de l’Europe lorsque les Anglais l’auront quittée dans deux ans. Nul n’est capable non plus de prévoir ce que sera l’économie anglaise qui booste l’UE. Israël sera entre les mains de puissances européennes qui ne lui sont pas favorables. Il devra dès à présent préparer sa diplomatie pour en atténuer le choc.

7 commentaires:

Max Semory a dit…

Je veux risquer un commentaire qui peut paraitre tres audacieux aujourd'hui mais qui pourrait refleter la realite dans certaines circonstances.En effet, les resultats du referendum n'obligent en rien le gouvernement britannique a invoquer l'article 50 du Traite de Lisbonne et entrer en negociation sur le Brexit avec l'Union Europeenne. David Cameron a decide de ne pas demissionner immediatement mais de rester a son poste jusqu'en octobre, parce qu'il savait que les consequences du Brexit seraient desastreuses aussi bien pour le Royaume Uni que pour le reste de l'Europe et qu'un delai de 3 mois permettrait a tous les protagonistes de se resaisir. Je pense donc que l'Union Europeenne va tout faire pour revoir les traites europeens dans un sens permettant de rassurer les eurosceptiques sur toutes les questions qui les preoccupent, notamment l'immigration, l'equiibre entre le pouvoir national et le pouvoir europeen, la puissance de la Commission Europeenne etc. et proposer au Royaume Uni un arrangement permettant son maintien dans une UE renovee. Par ailleurs, le Brexit cree deja des forces centripetes au sein du Royaume Uni et l'UE est interessee a ce que ce pays conserve son integrite territoriale et ne provoque pas de velleites secessionistes dans d'autres regions de l'Europe. Pour toutes ces raisons, je suis d'avis qu'en fin de compte le Royaume Uni ne quittera pas l'Union Europeenne mais qu'un arrangement sera trouve dans le cadre d'un reamenagement des traites europeens.

Michèle Mazel a dit…

Enfin quelqu'un qui rappelle que la Grande Bretagne n'est pas le premier pays à quitter l'Union européenne
...

Marianne ARNAUD a dit…

Cher monsieur Benillouche,

Je n'avais pas connaissance que l'âge des électeurs figurât sur les bulletins de vote ! Mais puisque "les statistiques" l'affirment...
Si nombreux sont ceux qui admirent et envient le niveau de la démocratie britannique, vous ne trouverez personne pour plaindre ces "fonctionnaires européens" et ces "députés anglais au parlement européen" qui se trouveront au chômage, car chacun sait comment ces personnages ont la capacité, quelles que soient les circonstances, de retomber sur leurs pieds !
Je ne crois pas que les Anglais aient jamais - et à juste titre - douté de leur livre sterling. C'est même leur attachement indéfectible à leur monnaie qui explique, en partie, la facilité avec laquelle ils ont décidé de sortir d'une UE à laquelle ils n'ont jamais adhéré que partiellement.
Israël a eu cent fois raison, contrairement à Obama, Merkel et toute la clique, de ne pas s'imiscer dans les affaires de la Grande Bretagne, il n'aura donc pas à subir l'humiliation de cette défaite politique de grande ampleur. Qu'importe ce que Cameron aura dit aux Juifs durant sa campagne électorale, car personne ne nous fera croire que la Grande Bretagne, qui a inventé le commerce moderne, serait empêchée de faire du business avec qui bon lui semble !
Et pour finir, qu'Isräël n'oublie jamais que c'est à lord Arthur Balfour qu'il doit d'avoir pu, pour le meilleur et pour le pire, installer l'État juif au coeur de la Palestine.

Très cordialement.

Jacques BENILLOUCHE a dit…

Chère Marianne,

Pour être plus précis, il s'agit de statistiques sorties des sondages de différents instituts.

Certes la fiabilité peut être mise en cause.

Max Semory a dit…

Je souhaite renforcer mon opinion concernant l'improbabilite d'une relle sortie du Royaume Uni de l'Union Europeenne. Une des possibilites de reforme des traites europeens, a meme de satisfaire les eurosceptiques, serait une UE a deux ou plusieurs vitesses.Le Marche Commun original de 1957,elargi en 1973, etait compose de 9 pays de niveau economique comparable. Par la suite, ormis l'elargissement de 1995 a la Suede, la Finlande et l'Autiche, tous les autres ont concerne des pays moins developpes, incapables de suivre le rythme de l'integration europeenne. En particulier, concernant un des sujets sur lesquels implose l'UE,a savoir l'immigration, les anciens pays de l'Est ont toujours pretendu que leur refus d'appliquer les quotas etait fonde sur leur incapacite d'absorption du point de vue economique.Je pense que les gouvernements de l'UE ont maintenant compris ce probleme et il est significatif a ce sujet, que la premiere reunion "post vote Brexit" aura lieu cette semaine entre les seuls six partenaires du Marche Commun original.

Véronique ALLOUCHE a dit…

Après un tel vote britannique , il semblerait logique que le président de l'UE, Jean-Claude Juncker, démissionne de son poste. Il est urgent que le couple franco-allemand reprenne en main la situation européenne et se concentre de toute urgence sur l'harmonisation fiscale et sociale, trouvent une solution rapide à l'immigration qui a beaucoup joué sur le NON. Une vraie politique commune s'impose plus que jamais. Et puisque l'Angleterre a choisi le Brexit, qu'ils assument les migrants bloqués à Calais!
Veronique Allouche

andre a dit…

Les Anglais ne se sont jamais trompés et ils ont toujours su avant les pays du Continent ce qu'il convenait de faire .L'Union européenne est une construction monstrueuse où il est interdit aux pays dépassés économiquement de regagner de la compétitivité en dévaluant leur monnaie,, où il suffit d'entrer par une ville de l'Europe de l'Est pour avoir le droit de circuler librement jusqu'à Brest! Tant qu'on n'aura pas redonné de la souveraineté aux États qui en font partie, tant que les migrants pourront envahir n'importe quelle partie de l'espace Schengen, les peuples consultés répondront non . Sauf peut être l'Allemagne qui vit le rêve de Bismarck. Mais le scénario de Max Semory est assez probable. Le Brexit peut entraîner la réforme de l' Union européenne qui sera bénéfique et alors nos amis anglais décideront de rester avec les peuples du Continent . En tout cas, le Royaume-Uni aura fait une œuvre salutaire.
Andre M Tribune Juive