L’IRAN AU SECOURS DE BACHAR AL-ASSAD
Par Jacques BENILLOUCHE
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Gardiens de la Révolution |
Qassem Soleimani |
Ce serait la première fois
que l’Iran interviendrait officiellement et directement dans la guerre en
Syrie. Téhéran avait évité jusque-là d’engager ses troupes à l’étranger. L'Iran avait fait exception en envoyant quelques troupes et des petites unités d’artillerie à Baïji, une
ville d’Irak située dans la province de Salah ad-Din pour déloger, sans succès,
le Daesh installé dans l’importante raffinerie éponyme.
La
stratégie syrienne consistait alors à utiliser les milices chiites locales en
les formant et en les équipant d’armement. L'Iran avait même fait venir des
mercenaires chiites du Pakistan et d’Afghanistan. Cette nouvelle intention syrienne a été
exprimée le 2 juin par le général Qassem Soleimani, commandant en chef des
forces iraniennes Al-Qods, groupe secret d'intervention à l’étranger. Il s’est borné à annoncer que des «développements
majeurs» sont prévus en Syrie sans donner plus de détail sur les mesures qu’il
compte prendre. Cette déclaration a été faite après son déplacement, le 31 mai à
Damas, pour s’entretenir avec les chefs militaires du Hezbollah sur la situation
effective et difficile sur le terrain. Il a tenu à se rendre compte de visu de l’avancement
des troupes ennemies en approchant la frontière irakienne dans la province d’Al-Anbâr.
Le
corps expéditionnaire des gardiens de la Révolution sera chargé d'atteindre deux objectifs. Il devra d’abord récupérer la ville de Jisr al-Choughour au nord-ouest
de la Syrie qui a été prise par les rebelles syriens sunnites soutenus par les
États-Unis, l'Arabie Saoudite, la Turquie et le Qatar. Le deuxième objectif consistera à reprendre la
ville de Palmyre qui a été envahie par les troupes de Daesh. Ces deux
reconquêtes représentent un symbole pour le gouvernement syrien car il doit protéger
les routes menant à Damas et surtout le port méditerranéen de Lattaquié. Il s’agit surtout du symbole de la survie du régime de Bachar al-Assad.
Le régime iranien tient à justifier son intervention en rappelant le pacte de défense mutuelle qu’il avait signé en 2006 avec la Syrie. La situation urge car l’armée syrienne, secondée par le Hezbollah en déroute, peine à résister aux forces rebelles et à Daesh qui ont écrasé les forces de la 52ème division syrienne dans la ville kurde Hasakeh. Les Kurdes avaient refusé de défendre cette ville en laissant, par tactique, l’armée syrienne subir un échec sanglant. En quelques semaines, trois villes sont tombées aux mains des rebelles : Hasakeh, Palmyre en Syrie et Ramādī en Irak avec le risque d’une chute prochaine de Mossoul. L’intervention iranienne devient donc indispensable devant l’effondrement à Deraa des 68ème et 13ème divisions syriennes qui ont déposé les armes face aux rebelles de la coalition. Les États-Unis ne font plus le poids avec leurs frappes homéopathiques puisque leur aviation n’a pas freiné l’avancée islamique.
Obsèques d'un miliciens du Hezbollah |
Zone en rose occupée par Daesh |
Les États-Unis et leurs
alliés européens sont «en retard d’une guerre». À terme, sans l’avouer
ouvertement, les Américains comptent sur les Iraniens pour le dénouement de
cette guerre. Ils sont convaincus que la signature fin juin d’un accord sur le
nucléaire permettra le départ du président syrien. Seule la France voit la situation
d’une autre manière mais elle n’est pas écoutée. Les Occidentaux sont les seuls
à qualifier l’embrasement de la région comme une seule et même guerre. L’État
islamique a créé son califat à cheval entre la Syrie et l’Irak. L’Arabie
saoudite joue sa survie, face à l’Iran son véritable ennemi.
L’Iran décide à
présent d’intervenir en lançant des dizaines de milliers d’hommes
supplémentaires. Sa présence active sur le terrain modifie l’équilibre
régional. Les Occidentaux n’entrevoient pas le risque que l’Iran puisse devenir
maître de l’Irak et de l’Iran. Dans ces gesticulations le régime syrien est devenu
pratiquement quantité négligeable. Israël, lui, observe ses ennemis se déchirer
et se contente de compter les points. Quel intérêt aurait-il à intervenir alors
que ses frontières restent calmes car tous les belligérants connaissent la
promptitude avec laquelle Tsahal peut intervenir si la sécurité du pays était en jeu ?
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