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jeudi 30 janvier 2020

Un expert iranien des missiles nommé adjoint de la force Al Qods


UN EXPERT IRANIEN DES MISSILES NOMMÉ ADJOINT DE LA FORCE AL QODS

Par Jacques BENILLOUCHE
Copyright © Temps et Contretemps
            
Hejazi

          Après la mort de Kassem Soleimani, son adjoint Esmail Ghaani a été désigné pour le remplacer à la tête de la force Al-Quds du CGRI (Corps des Gardiens de la Révolution iranienne). Le poste d’adjoint vient d’être pourvu avec la nomination de Mohammad Hossein-Zadeh Hejazi. Cette nomination s’imposait d’elle-même car les mollahs ont choisi un officier très expérimenté au sein de la force Al-Quds, une sorte de continuité de Soleimani. Peu connu sur le plan international, il a été un acteur important au Liban car il était chargé d’accroitre la précision des missiles du Hezbollah. Mais son rôle à présent consiste à mettre en œuvre les missions de la Force Al-Quds sur le front ouest de l'Iran (Afghanistan et Pakistan), qui étaient de la responsabilité précédente de Ghaani.



            Mohammad Hossein-Zadeh Hejazi est né à Ispahan en 1956 et avait un long passé révolutionnaire. Ses antécédents incluent des liens avec le MEK (Moudjahidines du peuple), organisation basée sur l’idéologie marxiste et islamique, fondée en 1965 et engagée dans un conflit armé avec la dynastie Pahlavi dans les années 1970. Le MEK avait contribué au renversement du Shah pendant la révolution iranienne. A l’instar de son frère plus âgé, Ahmad tué pendant la guerre avec l'Irak en 1982, il s’était engagé dans l'activisme politique avant la révolution de 1979. Il avait été emprisonné pendant un certain temps ce qui lui avait valu une expulsion de son université. Il tenait à s’engager dans des activités terroristes au point d’emprunter de l’argent pour suivre une formation de guérilla dans les camps de l’OLP (Organisation de libération de la Palestine) au sud du Liban à la fin des années 1970.

Basij
            Après la révolution de février 1979, il avait rejoint le CGRI à Ispahan et avait pris ses distances avec le MEK de plus en plus marxiste. Il avait ensuite été envoyé dans les provinces du Kurdistan et de l'Azerbaïdjan pour réprimer les séparatistes kurdes, puis avait été chargé de mobiliser des volontaires pour le front dans la guerre contre l'Irak. À ce titre, il s'était rapproché de Mohammad Ali Rahmani, chef de la milice Basij (mobilisation en persan). Cette grande organisation paramilitaire omniprésente aux rôles multiples, agit comme les yeux et les oreilles du régime islamique. Elle est présent dans les écoles, les universités, les institutions publiques et privées, les usines et même parmi les tribus.
            Au départ, Hejazi était classé comme extrémiste tant sur le plan intérieur qu’extérieur. Pour lui, les Iraniens qui contestaient lors des manifestations : «pas à Gaza, pas au Liban, ma vie est pour l'Iran», nuisaient au sentiment religieux et à la pensée révolutionnaire du peuple. Il avait en outre affirmé que ces manifestants visaient à empêcher l'exportation de la révolution iranienne au-delà des frontières du pays, et servaient les ennemis de l'Iran en Occident dont les objectifs consistent à affaiblir la révolution.

Manifestations étudiants 1999

            Les dirigeants du régime ont utilisé Hejazi lors des manifestations étudiantes de juillet 1999, qui ont éclaté à la suite de la fermeture du journal réformiste Salam. Les forces de l'ordre du gouvernement sont restées passives face à ces troubles. Les Basij, sous le commandement personnel de Hejazi et d’Ansar-e Hezbollah, ont été envoyés sur le campus pour réprimer violemment les manifestations, tuant soixante-dix étudiants. Au-delà de leurs fonctions anti-émeutes, les Basij et Ansar-e Hezbollah se sont ouvertement impliqués dans la politique sous Hejazi qui avait un long passé militaire.
            Il avait occupé plusieurs commandements pendant la guerre Iran-Irak de 1980 à 1988. Après la fin de la guerre, il avait été nommé commandant adjoint de la branche Basij puis commandant de 1998 à 2007, chef du CGRI de 2007 à 2009, chef adjoint des forces armées iraniennes de 2009 à 2014, responsable de la logistique et de la recherche industrielle.


            Le 29 août 2019, Tsahal avait révélé qu’Hejazi, qui servait en tant que commandant du Corps libanais dans la Force Al-Quds, était chargé avec deux autres officiers iraniens, à accroître la précision des missiles du Hezbollah. Les deux autres officiers sont Ali Asghar Nowroozi, chef de l'aile logistique des Gardiens, responsable du transport de l'équipement et des composants logistiques de l'Iran vers la Syrie et le Liban. L'autre officier le colonel Majid Nuab, ingénieur spécialisé dans les missiles surface-surface, est chargé des composantes technologiques.


            Un missile à guidage de précision est un projectile équipé d'un système de navigation très avancé lui permettant de frapper sa cible avec une précision de quelques mètres. Au départ le projet de conversion des missiles se réalisait en Syrie mais à la suite des nombreuses frappes israéliennes, l’Iran avait décidé de transférer au Liban cette fabrication.  En utilisant trois itinéraires pour acheminer les composants nécessaires à la fabrication des missiles : un itinéraire terrestre passant par la frontière syrienne, une ligne maritime et une ligne aérienne passant par l'aéroport international de Beyrouth.
            Le Hezbollah veut acquérir ces missiles pour menacer de tirer des roquettes sur Israël depuis le Liban. S’il arrivait à acquérir des missiles à guidage de précision, il aurait la capacité de viser directement les civils israéliens, les villes et même les ressources stratégiques nationales.
            L'Iran et le Hezbollah cherchent à entraîner le Liban dans un conflit avec Israël. Leurs tentatives de constituer des armes à l'intérieur des centres urbains, de cacher leurs armes dans les maisons et de creuser des tunnels d'attaque des villes du sud du Liban vers les villes du nord d'Israël, menacent non seulement la vie des Israéliens, mais la vie des civils libanais en armant les zones urbaines où des civils libanais vivent.       
            De 2013 à 2015, l'Iran avait tenté de transporter des missiles guidés de précision prêts à l'emploi de l'Iran, via la Syrie, à destination du Hezbollah au Liban. La plupart de ces efforts ont été contrecarrés en raison des frappes israéliennes qui ont empêché le Hezbollah d'acquérir des missiles guidés.
Missiles guidés du Hezbollah

            De 2016 à 2018, l'Iran et le Hezbollah ont changé de stratégie, passant de la contrebande de missiles guidés de précision complets à la tentative de contrebande de parties de missiles guidés de précision pour les assembler au Liban. Des éléments de missiles ont été transférés d'Iran au Liban par voie terrestre (via la Syrie), par avion (en utilisant des vols civils vers l'aéroport international Rafiq Hariri de Beyrouth) et par voie maritime (via le port de Beyrouth). Le programme de l'Iran et du Hezbollah pour convertir des missiles n'a pas réussi à gagner du terrain.   
            En 2019, l’Iran et le Hezbollah ont intensifié leurs efforts pour produire des missiles à guidage de précision au Liban, avec des installations de fabrication et de conversion construites dans un certain nombre de sites au Liban, sous le commandement de Qassem Soleimani. C’est à ce moment qu’intervient Muhammad Hussein-Zada Hejazi, agent de la force iranienne Qods, qui a pris la direction du projet iranien de missiles à guidage de précision au Liban et qui commandait directement le personnel iranien stationné au Liban.
            Il faut s’attendre à ce que cette nomination de Hejazi intensifie de manière notable l’activisme de la milice libanaise et que contrairement à Soleimani qui s’intéressait à l’aspect militaire de sa fonction, le Hezbollah va s’orienter vers un développement de haute technologie de son matériel militaire.

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