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dimanche 1 septembre 2019

Lacunes et forces de la liste démocratique


LACUNES ET FORCES DE LA LISTE DÉMOCRATIQUE

Par Jacques BENILLOUCHE
Copyright © Temps et Contretemps

Elizabeth Garreault, Nitzan Horowitz et le docteur Eric Setton

Nitzan Horowitz président de Meretz, a été invité à une réunion privée avec des militants, des soutiens et des francophones non adhérents pour présenter le programme de la liste du parti démocratique. La réunion a été courte, une heure, insuffisante pour aborder avec précision les questions les plus sensibles. Cela laisse un goût d’inachevé et un survol incomplet d’un programme pourtant bien élaboré. Cela ressemblait à ces émissions de télévision où les orateurs n’ont que quelques minutes pour exposer leurs idées.



Horowitz, ancien journaliste correspondant à Paris de Haaretz et ancien député Meretz pendant sept ans, était très à l’aise dans un excellent français pour un Israélien. Nous n’avons pas entendu d’informations inédites mais certaines confirmations dont on se doutait un peu. 
La première révélation, qui n’en est pas une, est liée au refus d’Amir Peretz de fusionner la liste travailliste avec celle de Meretz pour des raisons qui ne sont pas du tout idéologiques. L’explication rejoint celle que nous avons déjà publiée bien que démentie mollement par le chef travailliste qui s'est engagé à créer un «filet de sécurité pour Netanyahou si ce dernier s'engageait dans des efforts de paix». Il ne s'agit pas de rumeur mais d'une déclaration à la radio israélienne. Certes pour l’instant, il ne compte pas entrer dans son gouvernement, mais «s'il n’était pas l’objet d’accusations de corruption, nous négocierions avec lui». C'est clair et limpide; une simple trahison pour le camp de gauche.
Si Benny Gantz ne parvient pas au sommet, Peretz veut laisser la porte ouverte à sa participation à une coalition Netanyahou en échange de deux ministères, dont l’un social dévolu à Orly Levy-Abecassis mais surtout en échange de l’appui à une candidature en juin 2021 d’Amir Peretz au poste de président de l’État. Cette possibilité n’est réalisable qu’avec le soutien total à la Knesset du parti Likoud.

Pour Horowitz, Ehud Barak qui s’est associé à Meretz est un dirigeant important qui a occupé les plus hautes fonctions en Israël et qui compte encore beaucoup dans le spectre politique israélien. Mais il ne décolle pas dans les sondages, bien que non fiables, car la liste oscille entre 6 et 7 députés. Il n’intervient que pour assurer la survie de la liste Meretz à la limite du seuil électoral. C’est faible mais suffisant pour un homme politique du passé que certains accusent d’avoir fait son temps. D’ailleurs son positionnement à la 10ème place ne lui assure nullement sa réélection à la Knesset.

Horowitz a été accusé d’être à la tête d’une liste élitiste, de grands intellectuels idéologues situés à plusieurs encablures de l'Israélien moyen. Elle respecte certes la parité hommes-femmes mais ne comporte que très peu de séfarades et encore moins de représentants de la périphérie ou des classes défavorisées. Elle ne représente pas l’ensemble des classes sociales mais pour se distinguer des autres listes, elle comporte deux candidats arabes dont l’un en position éligible. 
Il est vrai que les relations avec les Arabes en Israël et en Cisjordanie sont l’ossature du programme du parti car Meretz milite pour la création d’un État palestinien et pour l’émancipation des villages arabes israéliens. En revanche nous n’avons pas eu une réponse claire, non ambiguë, sur l’intérêt pour le parti de la visite à la Mouquata de la petite-fille de l’ancien premier ministre Rabin, posant auprès de Mahmoud Abbas comme l’avait fait en avril 2019 Tamar Zandberg. Cela donne l’impression que Meretz exige, à chaque élection, l’imprimatur du président palestinien pour récupérer quelques voix arabes mais en perdant de nombreux votes juifs.

Meretz, qui milite contre la coercition religieuse et pour un régime laïc, sans être anti religieux, n’envisage pas de coalition avec les orthodoxes car ce serait contraire à sa conception de la laïcité. Il n’envisage pas non plus une coalition avec le Likoud, même épuré de la présence de Netanyahou. Là est le dilemme d’autant plus que le laïc Avigdor Lieberman n’est pas en odeur de sainteté au Meretz. On ne voit donc pas avec qui pourra gouverner Benny Gantz qui a affirmé par ailleurs qu’il ne ferait pas appel à la liste arabe sauf à réserver un poste ministériel à un ministre arabe.
La question du contour d’une coalition de gauche reste donc floue pour Nitzan Horowitz. On sait avec qui il ne veut pas gouverner et les candidats sont nombreux mais on comprend qu’il lui est difficile de se projeter avant la lecture des résultats électoraux définitifs qui pourraient avoir raison de son intransigeance. Il rêve les yeux ouverts mais c’est le rôle attendu pour un dirigeant minoritaire. En discutant avec les participants nombreux à cette réunion, on sent qu’il n’a pas convaincu. Il est resté dans les hautes sphères alors qu’on attendait de lui qu’il descende sur terre pour côtoyer le petit monde, celui qui lui permettrait de grappiller quelques voix supplémentaires afin de mieux exister.
Yossi Sarid

Il a donné l’impression d’être encore le journaliste de l’élite israélienne, celui de Haaretz qui a une réputation notoire à l’étranger comme journal de référence mais qui garde son identité sulfureuse à l’intérieur parce que ses articles sont destinés à des lecteurs sélectionnés, les seuls à comprendre son vocabulaire châtié. Horowitz a beaucoup de courage politique mais le courage ne remplit pas les urnes. Cependant il est bon d’avoir encore des idéologues convaincus dont l’action est indispensable au pays pour l’empêcher de tomber dans une dictature déguisée, à la fois de la part du Likoud mais plus grave encore, de la part des partis religieux orthodoxes. Le pays a besoin de dinosaures politiques de ce calibre, rassurés qu’ils incarnent le vrai Israël historique, celui de Ben Gourion et de Yossi Sarid, le meilleur ministre de l’éducation que le pays ait jamais connu.

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