VICTOIRE DU POPULISME FRANCAIS ET DE MACRON
Par Jacques BENILLOUCHE
Par Jacques BENILLOUCHE
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Les élections européennes de 2019 ont consacré la
victoire du populisme français. Le
populisme, doctrine toujours employée dans un sens péjoratif avec une connotation
de démagogie, désigne des discours et des courants politiques qui font appel
aux intérêts du «peuple». Il prône son recours en opposant les intérêts
du peuple à ceux de l’élite qu'il prend pour cible de ses critiques. Le
populisme s’incarne toujours à travers une figure charismatique soutenue par un
parti acquis à ce corpus idéologique.
Les populistes ont prospéré parce
qu’ils estiment que l’élite égoïste n’était pas capable de gérer et de traiter
les questions concernant les gens ordinaires, la majorité du peuple en quelque
sorte. À présent ils s’appuient sur la crainte et sur un racisme à peine
camouflé en prétendant que les gouvernements ne sont pas capables d’assurer à
leurs concitoyens la sécurité au moment où prospèrent les terrorismes en tout
genre, le terrorisme islamique en particulier.
La qualification de Marine le Pen comme populiste est récente sans
s’imposer d’emblée. Le FN était certes qualifié de fasciste ou d’extrême-droite
en raison des liens du parti avec les anciens collaborateurs de Vichy puis avec les nostalgiques de l’OAS et leurs discours
racistes. Mais à présent les électeurs, étant supposés issus majoritairement
des classes populaires, la désignation de parti populiste est justifiée. Le
populisme de Le Pen ne consiste pas à̀ valoriser le peuple, mais à se servir
de lui pour donner un semblant de légitimité́ sociale à une cause qui lui est
étrangère. En fait le RN (rassemblement national) est une nouvelle droite,
certes radicale, qui se qualifie de populaire par des discours «sociaux»
et anti-élites face aux victimes de la crise sociale et économique, de type
poujadiste.
Le populisme du FN s’est exprimé
dans les années 1990 lorsque l’analyse des résultats électoraux avait montré que
les classes populaires, constituées d’ouvriers, d’employés et de chômeurs,
avaient voté Le Pen. Le parti a alors rallié les factions sociales les moins valorisées socialement, les sans-diplômes et les faibles économiquement par
opposition aux plus riches protégés, par leur haute culture, de toute idée
xénophobe.
On se souvient d’ailleurs du match des populismes entre
Mélenchon et Le Pen. Mais ce populisme français a réussi à s’imposer lorsque
des «savants», des hommes politiques, et des intellectuels se sont
progressivement ralliés à cette vision d’un FN «populiste». La
conjoncture s'y prête puisque les groupes populaires n’ont plus tellement de
défenseurs collectifs ; le PCF est à̀ la dérive, le PS qui s’est adressé aux
classes supérieures s’est effondré, à la veille de disparaître, et la France
Insoumise est en déroute après avoir fait illusion. Les politiques gouvernementales
n’ont pas réussi à freiner la dégradation sociale des groupes populaires qui
sont enclins au pire.
Marine Le Pen a axé sa stratégie pour montrer que le parti frontiste des
années 1980 n’était plus un fascisme ou une extrême-droite au passé
sulfureux, mais une nouvelle droite radicale et populaire, que le RN avait
changé et qu’il était en rupture de filiation. Il tente de convaincre
l’opinion qu’il s’est acclimaté à la démocratie. Cependant les credo sont les
mêmes : les risques viennent du peuple lui-même, il faut exercer la «préférence
nationale», on doit stopper l’immigration et on critique le «dénationalisme»
qui transforme des nationaux en immigrés pour faire passer, avec un succès
certain, son idéologie antirépublicaine.
Cette élection européenne, comme
toutes les précédentes, est un défouloir contre le gouvernement en place. S’il
s’agit certes d’un coup de semonce politique, les conséquences nationales sont
faibles. Marine le Pen n’a pas d’alliés pour prendre le pouvoir en France et seule, elle n'y parviendra pas. Elle
ne fait qu’illusion pour concentrer sur elle toutes les aigreurs d'électeurs déçus. Mais elle
prouve la radicalisation de l’opinion française qui veut s’inspirer des
expériences européennes, à l’instar de l’extrême droite qui arrive en tête en
Italie et en Hongrie.
Dans la communauté juive de France et francophone d'Israël, Marine le Pen a des fans parce qu'elle cible les immigrés arabes et noirs. Elle arrive à convaincre mais c'est le propre de tous les populistes de faire rêver en imaginant la résolution des graves problèmes par une simple baguette magique. Cependant, la victoire de RN est toute relative; certes il arrive en tête avec 0,9% de voix en plus sur Lrem (23,3% contre 22,4%) mais il fait moins qu'en 2014 puisque le FN avait obtenu 24,86% des voix. Par ailleurs ils obtiennent le même nombre de députés : 23. Drôle de victoire! Donc la dramatisation est superflue, elle ne sert qu'aux médias pour faire des gros titres sur un phénomène qui n'est pas nouveau.
Mais cette victoire du populisme français ne doit pas masquer la réelle victoire d'Emmanuel Macron qui a réussi à éliminer tous ses adversaires politiques sérieux, les Républicains, les Socialistes et la France Insoumise. Ils sont presque éradiqués ce qui lui donne les mains libres pour figurer à la finale de la prochaine élection présidentielle, probablement face à Marine le Pen qui est pour lui une candidate de peu de poids. Macron a réussi à faire le vide politique autour de lui et n'a face à lui aucune opposition pouvant contrecarrer ses ambitions politiques. Le temps est trop court pour faire émerger un leader charismatique de droite, ou même d'une gauche unie. Ainsi la victoire de Macron est totale.
Mais cette victoire du populisme français ne doit pas masquer la réelle victoire d'Emmanuel Macron qui a réussi à éliminer tous ses adversaires politiques sérieux, les Républicains, les Socialistes et la France Insoumise. Ils sont presque éradiqués ce qui lui donne les mains libres pour figurer à la finale de la prochaine élection présidentielle, probablement face à Marine le Pen qui est pour lui une candidate de peu de poids. Macron a réussi à faire le vide politique autour de lui et n'a face à lui aucune opposition pouvant contrecarrer ses ambitions politiques. Le temps est trop court pour faire émerger un leader charismatique de droite, ou même d'une gauche unie. Ainsi la victoire de Macron est totale.
4 commentaires:
Cher monsieur Benillouche,
Je suis désolée de vous le dire, mais vous auriez allègrement pu vous passer d'écrire cet article, tant vous y enfoncez de portes ouvertes !
Je sais bien à quel point analystes et journalistes aiment à se gargariser de toutes sortes de mots en "iste" pour fustiger le peuple lorsqu'il ne vote pas comme il faut : extrémiste, fasciste, raciste, antisémite, vichyste... tout y passe !
Or en 2016, le géographe Christophe Guilluy attirait déjà notre attention sur le rejet sans précédent de la classe politique, de droite comme de gauche, qui s'est concrétisé dans les urnes aujourd'hui, qu'il nomme le "grand marronnage des classes populaires".
"Ce grand marronnage les conduit à s'affranchir peu à peu de leurs appartenances politiques et culturelles traditionnelles au rythme de leur sortie de la classe moyenne... Après plusieurs décennies de précarisation sociale, les classes populaires ne reconnaissent plus aucune légitimité, ni supériorité morale à la classe médiatique ou universitaire. Prise de court, la classe dirigeante se protège en ostracisant toujours plus la société populaire..."
Et c'est ce qu'à votre tour, vous vous êtes ingénié à faire aujourd'hui.
Très cordialement.
Là, Jacques, vous me décevez. Vous donnez du populisme une définition "soft", erronée. Le populisme ne consiste pas à défendre les intérêts du peuple. Le populisme consiste à se prétendre le porte-parole du peuple, à flatter ce peuple en lui désignant des boucs émissaires. Le populisme n'est rien de plus que la forme moderne de la démagogie.
L'extrême droite populiste, qui prône un régime autoritaire et chevauche le leitmotiv "tous pourris", a pris la place laissée vacante par l'extrême droite aristocratique ou royaliste, qui est passée de mode.
Le prototype du populisme moderne fut le fascisme italien, avec ses avatars que furent le nazisme allemand ou le peronisme argentin..
Madame Arnaud, l’article de Monsieur Benillouche est très pertinent, heureusement qu’il l’a écrit, j’ai d’ailleurs également posté un article sur mon mur FB, qui va dans le même sens, il a dit ce que personne hier soir après les résultats n’a dit sur tous les plateaux télé, à savoir :
- Non le RN avec Marine Le Pen, n’a pas fait mieux qu’en 2014, elle a perdu, non seulement en pourcentage, de 25 elle est passée à 23%, elle n’a donc même pas profité des crises populaires qu’à subies Macron après les 9 mois de manifestations si on ajoute aux Gilets Jaunes celles de la SNCF.
- Oui Macron sort grand vainqueur de ces élections, bien que tous les Partis réunis l’aient vilipendé depuis son élection, sincèrement, je pensais qu’il aurait, vu la situation, entre 15 et 20%, non seulement il a résisté, mais il a éliminé ses futurs adversaires, que ce soit les LR, et le PS, désormais c’est le nouveau leader de Droite, allié au Centre Droite et Gauche, si les écologistes le rejoignaient comme l’avait fait leur chantre Nicolas Hulot, ce serait très bon pour l’avenir du pays.
@serge Frati
« ....ce serait très bon pour l’avenir du pays. ».... plus d’opposition, plus de contestation, en quelque sorte vous voyez en Macron une réincarnation de Louis XIV!
La nostalgie d’une royauté toute puissante et la fin d’une démocratie!
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