MANUEL VALLS EN ISRAËL
Par Jacques BENILLOUCHE
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Manuel
Valls était l’invité d’Israël et à ce titre, il méritait le respect qu’on doit à
tout dirigeant de son rang. Il représente la politique de son pays et assume la
responsabilité de ses ratés, comme à l’occasion du dernier vote à l’Unesco. Il
serait temps que chacun comprenne en Israël que les pays choisissent leur
politique en fonction de leurs intérêts propres et non pas selon ceux
de l’État juif. Ce serait naïf de le croire et même dangereux car on se risque
alors à de sérieuses désillusions. La morale n'existe pas en politique, c'est
la morale du dollar et de l'euro. 200 millions de clients valent mieux que 8
millions de grincheux. C'est un fait qui ne souffre d'aucune exception. Le secrétaire d'État américain Henry Kissinger étaient
de ceux qui affirmaient que «les États n'ont pas d'amis, rien que des
intérêts».
Réception à l'ambassade de France à Tel-Aviv
Israël
a le choix d’accepter cet état de fait ou de se refermer à l’intérieur d’une
bulle stérile. Il n’y a plus à s’étonner puisque la politique suivie date de
1958, après une idylle de dix ans entre la France et Israël. Elle avait été
instituée par le ministre des affaires étrangères Couve de Murville sur les
instructions du général de Gaulle. Tous les premiers ministres français qui ont
suivis, même les grands amis d’Israël, ont fait ce qu’ils pouvaient pour
atténuer les rigueurs d’une telle politique toujours qualifiée de pro-arabe.
Claude Goasguen |
Lors
d’une interview, Claude Goasguen député de Paris et grand ami d’Israël, nous
avait parfaitement décrit la problématique vue à travers l’œil d’un membre du
Parlement : «En réalité, la politique étrangère en France est réservée à une
poignée d’individus sans contrôle. Le Président de la République, un petit peu
le ministre des Affaires Étrangères qui n’a pas grand pouvoir et le Quai
d’Orsay. L’Assemblée nationale ne connaît rien de la politique étrangère de la
France. En tant que député j’apprends tout par la presse comme vous. Nous
sommes le seul pays à avoir un homme et un seul, à l’Élysée, avec le secrétaire
général du Quai d’Orsay, qui décide de tout et qui est par nature en dehors de
toute responsabilité politique». Et cela vaut pour les gouvernements de
droite comme de gauche.
C’est
pourquoi les circonvolutions du premier ministre pour expliquer le vote à l’Unesco
paraissent laborieuses; il lui était
difficile de justifier un texte qu’il n’a certainement pas cautionné ;
mais la solidarité ministérielle et diplomatique impose le respect des décisions votées. La résolution votée n’a qu’un
impact psychologique et une conséquence politique limitée à terme. Elle est
bien sûr maladroite mais, en politique, il faut savoir engranger la rancune
surtout quand il est difficile d’éxiger un amour exclusif.
Manuel Valls s'est excusé, il ne pouvait pas faire mieux, il ne pouvait pas faire plus. Dans beaucoup de cas
il faut laisser la diplomatie agir dans le secret des alcôves et permettre aux
diplomates de métier le soin d’arrondir les angles. Les attaques féroces contre
la France par certaines officines qui relaient «la voix de son maître»
causent beaucoup de tort. Et il vaut mieux ne pas parler des messages dans les
réseaux sociaux qui dénotent soit la haine, soit l’inculture politique. D’ailleurs
souvent, ces mêmes individus prompts à condamner la politique de la France, sont
les premiers à se presser pour immortaliser une photo avec le premier ministre.
Si
l’on veut dénier aux dirigeants politiques étrangers le droit à la sincérité,
autant rompre tout lien avec eux et continuer à vivre dans notre petit village
romain, ou plutôt juif, en autarcie comme si on pouvait se le permettre. Le processus
de paix est bloqué et il semble qu’Israéliens et Palestiniens ne soient plus en
état de le faire d’avancer seuls. Toute aide extérieure est alors la bienvenue
si elle est désintéressée et neutre et si l’on n’accuse pas a priori la France «d’impartialité».
Ne pas penser comme le chef du gouvernement israélien est une tare.
Pour
l’instant, le gouvernement de Benjamin Netanyahou, malgré ses déclarations, n’envisage
pas un réajustement de sa politique avec les Palestiniens. La conférence
internationale organisée par la France semble plombée dès le départ et pourtant
Manuel Valls avait tout fait pour rétablir la confiance en écartant la menace
lancée naguère par Laurent Fabius : «les Français sont lucides,
déterminés et modestes. Dire aujourd'hui quand nous reconnaîtrons l'État
palestinien, c'est acter par avance l'échec de notre initiative». Mais il
est systématiquement critiqué parce que certains gardent vivaces leur sentiment
anti-arabe. Tous ses actes sont scrutés au microscope et parce qu’il rend
visite à l’Autorité palestinienne, il devient suspect a fortiori lorsqu’il fleurit
la tombe de son leader. On exige un amour exclusif. C’est les Palestiniens ou
nous.
Un
ami doit être franc et c’est d’ailleurs à cela qu’on le reconnaît. Il analyse
et il conseille parce que parfois le raisonnement des autres est bloqué. Franc
ou pas, Manuels Valls se présente comme un ami et il faut lui reconnaître cette
volonté même s’il sait manier la franchise : «L'arrêt de la
colonisation est un impératif. Car on ne peut pas vouloir à la fois discuter de
la paix, être sincère dans la négociation et continuer dans le même temps à
pratiquer le fait accompli sur le terrain». Nombreux sont ceux en Israël
qui sont sceptiques sur l’avenir d’une conférence internationale qui devrait se
réunir avant le départ de Barack Obama. Libre à Israël de refuser de participer
mais les absents ont toujours tort.
Cependant la politique n’est pas la seule à être traitée au cours de ce voyage. Israël a besoin
de relations d’affaires au moment où la Banque d’Israël lance une alerte pour
une probable récession dans les mois qui viennent. Le chômage commence à
frapper le pays qui a fini de manger son pain blanc. Nous avons rencontré à l’ambassade
beaucoup de chefs d’entreprises français intéressés par l’ouverture à un marché
dynamique et surtout aux techniques israéliennes. Tout le monde y trouve son
compte. Il ne faut surtout pas se voiler la face ; l’économie d’Israël est certes solide mais elle
est fortement dépendante des États-Unis et de l’Europe.
Alors ceux qui font œuvre
de démolisseur des relations bilatérales se trompent et ils ne rendent pas
service au pays : «Les mensonges, la délégitimation et la
désinformation doivent cesser immédiatement. Nous devrions dire à nos amis et
alliés Français que leur conduite est inadmissible et qu’ils ne pourront jamais
être des intermédiaires sincères si dès le départ ils portent préjudice et
veulent dicter d’une manière obsessionnelle un processus de paix conclu à
l’avance avec les Palestiniens» (Cape-Jérusalem).
Manuel Valls est venu pour
tenter de convaincre Netanyahou sur l'intérêt de faire évoluer sa politique mais certains perroquets francophones nationalistes persistent à saper l’avenir d’Israël.
À lire les énormités proférées à son encontre, par une communauté française aux
ordres de quelques gourous, on ne peut que pleurer parce qu'il est criminel d'attaquer et de décourager les amis sincères des Juifs.
6 commentaires:
Jacques Benillouche, j'espère que la majorité silencieuse est derrière cette idée là.
L'avenir d'Israël n'appartient pas à la moitié des israéliens seulement.
Elle appartient à 16.000.000 de juifs.
Et Valls est solide dans ses convictions. Aidons le en développant nos partenariats avec la France.
Faudra rendre une partie de la Judee Samarie.
Faudra accepter de l'appeler Palestine.
Faudra surtout pas hériter de 4.000.000 de "voisins" crachant sur nos droits en brûlant nos forêts (?) et cherchant leur paradis dans notre mort violente.
Israel est européen pour longtemps.
Aidons l'Europe à nous aider.
Je partage entierement cet article. J'ai toujours ricane sur ces naifs qui croient que les relations avec les pays sont identiques aux relations conjugales. Israel s'etait donne a la France. On apprenait le francais a l'ecole en Israel, la librairie Alcheh a Tel Aviv etait le lieu de rencontre des intellectuels francophones et meme la gastronomie francaise etait representee par un restaurant celebre qui ferma ses portes au debut des annees 70. Mais il y a eu pire: les Juifs se donnerent a la France, que ce soit en Algerie ou dans la metropole. Ils payerent de leur vie cet amour monstrueux.
Effectivement tout doit être tenté en faveur de la paix. La sincérité de Valls ne fait aucun doute mais il est bien seul face à un quai d'Orsay dont on connaît l'état d'esprit concernant Israël. Si la résolution votée à l'Unesco est une erreur, elle peut se rattrapée puisqu'elle doit être rectifiée cet automne et Hollande a promis d'être extrêmement vigilant et de la regarder Personnellement. On peut quand même s'étonner de la faiblesse de ce gouvernement qui n'a pas semblé être mis au courant de l'initiative en question à la veille d'une conférence sur la paix impliquant un semblant de neutralité. Ami d'Israël oui, mais Valls saura-t-il convaincre Netaniahou du bien-fondé de cette conférence après un tel impair diplomatique? Pour autant il ne faudrait pas que Bibi en profite pour remettre en question toutes les bonnes volontés en faveur de la paix. A lui de voir et à nous d'en juger.
Bien cordialement
Véronique Allouche
Au niveau des amis déclarés nous n'avons pas à nous plaindre nous avons eu entre autre Mitterand, Sarkozy et maintenant Valls. Est ce qu'il ne vaut mieux pas avoir un ennemi avec qui faire la paix plutôt qu'un ami qui mettra ses intérêts en avant et pas toujours en relation avec les nôtres.
@Herve23
Quant à L'avenir d'Israël il n'appartient pas uniquement à la moitié des Israéliens, encore moins au 16.000.000 de juifs. Mais bien à ceux qui peuvent et doivent émettre un vote lors des élections.
Rappel de la pensée de Shlomo Sand pour qui le droit du sol prévaut.
Bernard Meyer
Excellent article, mais je crains que nos "ayatollahs" n'aient ni l'ouverture d'esprit ni les neurones permettant d'aller au delà du 3eme paragraphe ..
Bon article empreint d'honnêteté intellectuelle et de lucidité.
Jusque une remarque simpliste : "pour faire la paix il faut être deux"
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