Marcel Proust |
Le premier temps proustien est le temps perdu. Ce furent donc les
tenants du rétroviseur qui tirèrent les premiers. Le négatif, comme souvent, en
tête. La vedette revint tout naturellement au grand envahissement. Non pas celui,
hystérisé et surmédiatisé d’un surfeur politique sur une vague xénophobe
franchoulliarde. Mais, à tout saigneur tout honneur dit l’un d’eux,
l’invasion mondiale du corona, ou de la covid selon qu’on préfère le masculin
ou le féminin. 2021, année pandémique. Le coup de grâce donné par l’omicron
consolidant la première place du podium. Derrière, pas si loin en fait,
présenté surtout par les femmes, fustigeant en passant la folie des hommes,
toutes les formes de violence.
À commencer par les guerres. Régionales mais terribles.
Afghanistan, Soudan, Yémen. Avec leurs cohortes de morts et estropiés civils,
de camps de réfugiés misérables, de destructions. Sur la troisième marche, mais
revendiquant la première, la menace climatique, avec à ses côtés, la débâcle
écologique. Vint aussi, démontrant ainsi l’acceptation lassée du fait accompli,
la perpétuation du conflit israélo-palestinien, et de son redoutable ressort du
«action-réaction», «attentats-répression». Puis suivirent, en amalgame,
la hausse de la faim dans le monde, des inégalités, la dérive populiste de la
démocratie.
Face au temps perdu, il y a également, le temps retrouvé. Les
optimistes réagirent dans l’immédiate foulée. C’est vrai la pandémie
s’éternise. Mais, en regard, l’innovation technologique stimulée et mobilisée,
a fait faire à la recherche médicale un bond historique. La technologie ARN,
dans un premier temps, permet la définition et la production en un temps non
pas perdu mais jamais vu, de vaccins successifs. Ouvrant dans un deuxième temps
un champ nouveau à la recherche de solutions pour de nombreuses autres
maladies. Et puis, la surprise Biden. En remplacement d’un, non pas imprévisible,
mais très prévisible président américain car toujours décidant pour le pire.
Biden, dans la difficulté, mais remettant sur pieds une démocratie mise en
danger.
Surprise complétée par l’autre divine surprise. La mise hors de son
jeu diabolique, d’un maintenant ex-premier ministre israélien. Et
l’instauration d’un gouvernement, certes hétéroclite, mais réinstallant lui
aussi une vraie gouvernance démocratique. Traitant enfin, des innombrables
sujets laissés en jachère. A commencer par un encadrement budgétaire, un
rééquilibrage égalitaire, une prise en considération des minorités. Et puis,
encore, l’espace. Une nouvelle étape de cette conquête, si symbolique et si
fantastique.
Une autre partie de l’honorable assemblée, fit alors valoir à l’ami
libraire, déjà ravi, qu’il ne fallait pas s’arrêter là. La petite madeleine de Proust peut aussi
générer, spontanément, le surgissement d’un temps futur. Et quoi de plus
adéquat que le basculement d’une année sur l’autre ? La période des vœux,
justement. En première urgence, faire que dans la bataille «pandémie-innovation»,
le second terme sorte vainqueur. Ça ferait tellement plaisir de casser la
figure à tout virus, covid ou autre, qui se présente. Ne laissant plus qu’une
discipline sanitaire apprise, libérant des masques, confinements et autres
joyeusetés. Rompre la chaine absurde et dévastatrice des guerres régionales,
sous l’égide d’une ONU enfin efficace. Interrompre en particulier le cercle
vicieux de l’affrontement sans fin d’Israël et de la Palestine. Peut-être, non
plus en subordonnant l’économie et le social à la politique, mais à l’inverse,
la politique à l’économie et au social. Libérer les freins à l’application du
programme de rénovation également économique et social préparé par Joe Biden.
Développer et rendre populaire l’Europe, face aux deux grands empires américain
et chinois. Limiter la surpuissance des Gafam sans limiter leur impulsion
créatrice Poursuivre la libération de la femme, sans tomber dans l’idéologie
castratrice……
Jonathan proposa d’arrêter le déversement des vœux, la place
risquant de manquer sous les branches du sapin. Permettant ainsi au libraire,
tout émoustillé de cette lecture originale de son idole, de reprendre la main. Si
Proust avait pu vous entendre, il vous aurait sans doute dit que vous veniez
d’en faire la démonstration. Il y a un
temps pour tout. Et que nous vivons tous, sans le savoir, sur les ailes du
temps. Merci de m’avoir fait passer du bon temps.
Unanimes, tous saluèrent le libraire, le temps présent et la
défunte année, au cri de Adios 2021.
Proust titre son dernier tome de « À la recherche du temps perdu » par « Le temps retrouvé », ce qui nous laisse un peu d’espoir sur l’avenir en souhaitant revenir au passé d’avant la pandémie.
RépondreSupprimerTrès bonne année à vous.
Bonne
RépondreSupprimerMerci et bonne année à vous pour un temps inventé