RT France
NORMALISATION DES RELATIONS ENTRE ISRAËL ET LES
EMIRATS
Jacques BENILLOUCHE au micro de
Samantha RAMSAMY
Benjamin Netanyahou a
annoncé une «nouvelle ère» à l’occasion de la normalisation des
relations diplomatiques entre Israël et les Émirats Arabes Unis. Ce n’est pas
une grande surprise car cette décision était attendue depuis plusieurs mois
déjà. Des délégations des deux pays se rencontreront afin de préparer les
modalités d'ouverture d'ambassades. Yossi Cohen, le patron du Mossad, le vrai promoteur de l'accord, sera à la tête de la délégation. Il profitera de signer des accords bilatéraux
dans les domaines du tourisme, du transport aérien, de la sécurité, de l'énergie
ou de l'environnement.
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L’inconnu reste de savoir le lieu de l’Ambassade sachant
que les Émirats éviteront la provocation de choisir Jérusalem. En échange de
cette décision, le gouvernement israélien a accepté de suspendre son projet
d'annexion d’une partie des implantations de Cisjordanie ce qui fait la joie de
l’extrême-droite. En effet l’annexion était conditionnée par la création d’un État
palestinien qui ne verra pas le jour pour l’instant.
Sept Émirats, situés entre le
golfe Persique et le golfe d'Oman, sont regroupés en un État fédéral créé en
1971 avec pour capitale la ville d'Abou Dhabi. Le dirigeant de facto est le
cheikh Mohamed ben Zayed Al-Nahyane (MBZ). Sur le plan politique, le Conseil de
coopération du Golfe (CCG) regroupe six monarchies du golfe Persique : l'Arabie
saoudite, Oman, le Koweït, Bahreïn, les Émirats arabes unis et le Qatar. Mais
l’alliance a été brisée et le Qatar exclu en raison des relations étroites qu'il entretient avec l'Iran chiite.
Israël était persuadé que le
Qatar serait le premier pays avec lequel il aurait des relations. Des relations
secrètes ont toujours été maintenues au plus haut niveau et pour preuve, l’émir
du Qatar, cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani, s’était rendu en visite secrète en Israël, en
mars 2010, et avait été reçu par Tsipi Livni, ancienne ministre des affaires
étrangères et chef de l’opposition. La télévision israélienne avait filmé
l’événement et avait rapporté, officiellement, que la réunion avait pour but d’aborder
l’aide que pouvait fournir Israël en matière d’agriculture. Il est certain
que le problème de l’Iran avait été discuté. Mais bien que le Qatar soit un
allié des États-Unis et qu’il abrite la plus grande base militaire américaine
dans la région, il entretient des liens étroits avec l'Iran, avec qui il
partage le plus grand gisement de gaz au monde. Israël collabore actuellement avec le Qatar
pour l’aide à Gaza.
Alors que l'Arabie saoudite,
Bahreïn, les Émirats arabes unis et l'Égypte avaient rompu leurs relations
diplomatiques et économiques avec le Qatar en 2017, plusieurs pays du Golfe se
sont discrètement rapprochés d'Israël, face à l'ennemi commun iranien. MBZ aura
été celui qui a franchi le pas le premier. Formé dans la célèbre académie militaire
britannique de Sandhurst, dont il est sorti en 1979, il a rapidement gravi les
échelons des forces armées pour devenir commandant des forces aériennes et enfin chef d'Etat-major en janvier 1993. Il a le grade
de général et assume de fait le commandement des forces armées.
Il a tenu à tisser des liens avec
presque toutes les capitales occidentales. Il peut compter sur la richesse
d'Abou Dhabi, qui détient 90% des réserves pétrolières des Émirats. MBZ n’est
cependant pas un pacifique car il avait envoyé en 2015 des troupes émiraties au
Yémen, dans le cadre d'une coalition menée par l'Arabie saoudite contre les
rebelles Houthis, soutenus par l'Iran. Il s’est opposé à la Turquie en Libye
car ils ne soutiennent pas le même camp.
MBZ s’entend très bien avec le jeune et ambitieux prince héritier saoudien, Mohammed ben Salman (MBS). D’ailleurs MBZ est le mentor de MBS, avec lequel il partage une profonde hostilité envers l'Iran et les Frères musulmans. Cela préfigure que le prochain pays à nouer des relations sera certainement l’Arabie saoudite.
MBZ s’entend très bien avec le jeune et ambitieux prince héritier saoudien, Mohammed ben Salman (MBS). D’ailleurs MBZ est le mentor de MBS, avec lequel il partage une profonde hostilité envers l'Iran et les Frères musulmans. Cela préfigure que le prochain pays à nouer des relations sera certainement l’Arabie saoudite.
Cet accord, qualifié par Abu
Dhabi de victoire et par Benjamin Netanyahou d'historique pour
l'État d'Israël, est un pas significatif pour la paix au Moyen-Orient. Cela va
certainement redorer le blason du président américain car, jusqu’à présent, ses
différentes initiatives sur le dossier israélo-palestinien n'avaient guère été
couronnées de succès. Il avait poussé
les Émirats à nouer des relations non officielles avec Israël pour se prémunir
contre un islam politique envahissant. Le projet israélien d’annexion d’une
partie de la Cisjordanie n’a pas entamé la volonté des Émirats de se rapprocher
d’Israël ni empêché l’ambassadeur des Émirats à Washington, Yousef al-Utiyeva,
de publier pour le principe, un éditorial en hébreu dans Yediot Aharonoth afin
de critiquer l’annexion : «Nous aimerions croire qu'Israël est une
opportunité, pas un ennemi. Un énorme potentiel pour des liens plus étroits».
Projet abrahamique : une tour par religion |
Les relations entre Abou Dhabi et Jérusalem n’ont pas qu’un but
géostratégique et commercial mais elles se fondent sur des politiques
idéologiques. Ce réchauffement est dû à l’influence grandissante des 3.000
Juifs vivant à Abou Dhabi et Dubaï, disposant de la double nationalité et
expatriés des pays occidentaux. Cela est original dans la mesure où cette
région n’avait jamais abrité de Juifs. Ceux qui y vivent sont généralement des
travailleurs contractuels d'Amérique du Nord et d'Europe occidentale.
Par
ailleurs, les Émirats sont très sensibles aux bonnes relations avec toutes les
religions. D’ailleurs, ils ont construit un projet appelé «projet de maison
de famille abrahamique», afin de refléter l'histoire des trois religions du
pays. Ce nouveau complexe fera fonction à la fois de mosquée, d'église et de
synagogue. De plus en plus d’hommes d’affaire juifs s’y installent. Depuis 2015
un diplomate à l'Agence internationale des énergies renouvelables est installé aux
Émirats. Un bureau diplomatique avait été ouvert à Abu Dhabi mais il avait été
précisé à l'époque qu’il ne s’agissait d’aucune
présence consulaire.
Depuis
2009, les Émirats veulent défier l’Iran et depuis peu la Turquie qui cherche à
recréer l’Empire ottoman. Ils craignent les Frères musulmans qui avaient pris
le pouvoir en Égypte et qui risquent de donner des idées à quelques
contestataires tandis que la révolution islamique est devenue leur problème
majeur de sécurité.
Abdullah bin Zayed |
Ce rapprochement n’est pas
nouveau. En 2012 déjà, Netanyahou et le ministre des Affaires étrangères des
Émirats, Abdullah bin Zayed, s’étaient rencontrés dans un hôtel de New York
lors de l'Assemblée générale des Nations Unies afin de prendre une position
commune contre l’activité iranienne. L’attaque iranienne contre les
infrastructures pétrolières saoudiennes avait définitivement convaincu les
Émirats qu’ils ne pouvaient plus compter sur le parapluie américain et qu’ils
devaient dorénavant demander la protection israélienne face à l’ennemi commun.
MbZ et MbS |
La réponse ambiguë du président
américain Donald Trump, aux récentes attaques de pétroliers et à la destruction
d'un drone, préoccupe Abou Dhabi qui craint de devoir supporter seul le
principal fardeau du conflit si les choses devaient s'intensifier. Mais si
l’Iran inquiète les Émirats, les printemps arabes ont déstabilisé le
monde musulman. MbZ a exprimé ouvertement de vives réserves quant aux élections
libres au Moyen-Orient, affirmant qu'une plus grande démocratie dans la région
donnera beaucoup de légitimité aux
Frères musulmans, au Hamas et au Hezbollah.
Cette théocratie ne dérange pas
les Occidentaux qui sont convaincus que les Arabes doivent vivre sous un régime
autoritaire pour une meilleure stabilité. Israël a également contribué à
l'essor des Émirats en tant que puissance régionale de cyber et d'information
tandis que les liens commerciaux avec Israël se développent dans le transport
maritime avec Zim Integrated Shipping Services, la plus grande ligne de
conteneurs en Israël, dans les investissements et à présent dans le combat
contre le coronavirus. Zim a fait des investissements dans le port de Dubaï en
achetant deux douzaines d'opérations de terminaux.
De nombreuses entreprises
israéliennes fournissent des capacités de cyber-espionnage pour pirater des
téléphones, recueillir des renseignements et surveiller des islamistes, des
dissidents arabes et des dirigeants du Golfe. Des spécialistes militaires et de
sécurité israéliens, ayant quitté leur service, ont été embauchés à titre privé
pour travailler au sein des sociétés militaires et de sécurité privée
émiraties.
De son côté MbZ veut faire échec
à la menace islamiste. Observateur avisé, il assiste à l'effondrement des
États-Unis en tant que puissance organisatrice au Moyen-Orient. Face à un
Erdogan très actif, il pense être le nouveau dirigeant de la région. Avec ses
forces armées et celles d’Israël, les plus compétentes de la région, face aux
préoccupations communes concernant le terrorisme et l'agression, et une
relation profonde et longue avec les États-Unis, les Émirats et Israël
pourraient former une coopération en matière de sécurité plus étroite et plus
efficace. Grâce à deux économies, les plus avancées et les plus diversifiées de
la région, l'expansion des relations commerciales et financières pourrait
accélérer la croissance et la stabilité à travers le Moyen-Orient. MbZ ne cache
pas son ambition de transformer son petit État en un autre Israël.
Armée des Emirats |
Israël et les Émirats ont une
portée militaire et économique qui s'étend bien au-delà de leurs frontières et
au cœur de l'Afrique. Si Israël a montré qu'il a un bras long, les Émirats ont
également montré leur bras long en Libye, en Turquie et en Syrie. Proches des
intérêts occidentaux, ils ont des ennemis communs, l'islamisme, la Turquie et
l'Iran. Ils ont une stratégie commune pour contrôler la région. Les deux plus
grands défis régionaux pour les Émirats et Israël sont respectivement la
Turquie et l'Iran.
Les Émiratis n’hésitent pas à
affronter de front le président turc Recep Tayyip Erdogan. Certaines rumeurs
prétendent qu’ils ont financé la tentative de coup d'État de 2016. Abdulkhaleq
Abdullah, conseiller de la cour royale des Émirats, a révélé que les Émirats
avaient attaqué des batteries de défense aérienne turques dans la base aérienne
libyenne d'Al-Watiya pour «donner une leçon aux Turcs»
Pour avoir collaboré avec elle
et fourni des armements de haute technologie, Israël considère l'armée turque
comme sa principale menace. Yossi Cohen, le patron du Mossad, lors d'une
réunion de diplomates de l'Arabie, des Émirats et de l'Égypte dans une capitale
du Golfe, avait estimé que l'armée turque était plus capable et moins facile à
contenir que celle de l'Iran.
Hazem Qassem |
Les groupes palestiniens ont
critiqué l'accord Israël-EAU, affirmant
qu'il ne faisait rien pour servir la cause palestinienne et ignorait les droits
du peuple palestinien. Le Hamas, par la voix du porte-parole Hazem Qassem, a
condamné l'accord, qui, selon lui, était un «coup de poignard perfide dans
le dos» : «Cet accord ne sert absolument pas la cause palestinienne, il
sert plutôt le discours sioniste. Cet accord encourage l'occupant à continuer
de nier les droits de notre peuple palestinien, et même à continuer ses crimes
contre notre peuple». Le mouvement Fatah a déclaré que les EAU «bafouaient
leurs devoirs nationaux, religieux et humanitaires» envers la cause
palestinienne». Hanan Ashrawi, membre du comité exécutif de l'OLP, a
déclaré que «les Émirats avaient révélé au grand jour leurs relations
secrètes avec Israël».
Les
Palestiniens estiment qu’il «devrait y avoir d'abord un règlement du conflit
israélo-arabe avant toute normalisation, c'est donc un bouleversement majeur
par rapport à ce qui a été la pensée explicite de la politique arabe jusqu'à
présent». Enfin Mahmoud Abbas rejette l'accord et appelle à une «réunion
d'urgence de la Ligue arabe» dont les décisions ont toujours été stériles. Les Palestiniens n'ont jamais manqué de rater l'occasion d'un occasion.
Excellente analyse et compte rendu des événements presque complet . Ce qui fait défaut c’est « l’oubli » du rôle de Netanyahu ! Je sais qu il est déchirant pour un opposant de signaler une victoire aussi importante du « corrompu de Balfour « ! Mais elle est là cette avancée capitale pour Israël et Yossi Cohen doit être félicité mais également celui qui lui a confié la mission et l’a mise au point et réussie grâce à Donald TRUMP !
RépondreSupprimerAndré Simon Mamou
Tribune juive