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dimanche 5 juillet 2020

Mystère de l'explosion dans la centrale nucléaire iranienne



MYSTÈRE DE L’EXPLOSION DANS LA CENTRALE NUCLÉAIRE IRANIENNE

Par Jacques BENILLOUCHE
Copyright © Temps et Contretemps
            
Natanz

          Les autorités iraniennes ont été contraintes de réagir officiellement à l’explosion du 1er juillet 2020 qui s’est produite dans le principal complexe nucléaire iranien car toute la région est sous l’œil des satellites occidentaux, voire israéliens. Il leur était donc difficile de camoufler cet incident dont l’ampleur n’est pas totalement définie. Cette centrale nucléaire avait fait beaucoup parler d’elle lorsque les Israéliens avaient attaqué et détruit toutes les centrifugeuses avec le virus Stuxnet [1].
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Les concepteurs de ce virus n’avaient pas seulement réussi à attaquer spécifiquement le système interne de contrôle des ordinateurs Siemens (PLC) qui gèrent le programme nucléaire iranien. Ils ont surtout permis au virus d’identifier précisément ses cibles grâce à leur identification informatique et de bloquer la fabrication de combustible enrichi sans créer de risque d'explosion ou d'incident majeur.
            L’explosion du 1er juillet, qui a eu lieu à 2 heures du matin et qui a touché une installation de production de centrifugeuses récemment construite à Natanz, pourrait être due à un acte de sabotage. Selon les Iraniens aucune perte de vie n’a été constatée. De nombreux experts sont persuadés que l’usine a été l’objet d’une cyberattaque. Natanz, dans la province centrale d'Ispahan en Iran, abrite la principale installation d'enrichissement d'uranium du pays. Là, les centrifugeuses font tourner rapidement l'hexafluorure d'uranium gazeux pour enrichir l'uranium. L'AIEA (Agence internationale à l’Énergie Atomique) affirme que l'Iran enrichit l'uranium à environ 4,5% de pureté, au-dessus des termes de l'accord sur le nucléaire, mais bien en dessous des niveaux de qualité militaire de 90%.

Les flammes de l'incendie consécutives à l'explosion auraient été suffisamment brillantes pour être détectées par un satellite américain. Évidemment, les responsables iraniens, qui ne peuvent pas nier l’incident, tentent de le minimiser en prétendant qu’un «hangar industriel» hors-sol a été touché, ne faisant pas partie de l’installation d’enrichissement. Les spécialistes américains, qui disposent d’images satellites précises, sont persuadés qu’il s’agit bien d’une nouvelle installation de production de centrifugeuses. Ils sont aussi persuadés que le projet nucléaire iranien, utilisant des centrifugeuses, sera impacté.  
            Il semble que le sort poursuive les Iraniens. Cet incident à Natanz est le troisième en une semaine. Le 26 juin, une grande explosion s'était produite près du complexe militaire de Parchin, dans l'est de Téhéran, dans un tunnel souterrain cachant des sites de production de missiles. Des habitants des banlieues environnantes ont filmé les flammes de l'explosion. L'Iran a affirmé qu'il s'agissait d'une explosion d'un réservoir de gaz.
Vue aérienne de l'étendue de l'explosion de Parchin

Une autre explosion de gaz s'était produite le 30 juin dans une clinique médicale privée qui avait fait 19 morts. Les autorités expliquent l’accident par le fait que l’établissement aurait reçu de nombreux avertissements de la ville concernant des problèmes de sécurité. Il faut aussi préciser que la principale installation d'enrichissement d'uranium est située à  250 kilomètres au sud de Téhéran dans des installations souterraines, recouvertes de plus de sept mètres de béton pour être protégés contre les frappes aériennes. Il est évident que l’Iran connaîtra d’autres accidents de ce genre s’il ne met pas fin à son programme nucléaire.
Selon les experts américains l'incident du 1er juillet était un acte de sabotage provoqué par une bombe, probablement posée à l'intérieur de l'installation, qui a causé des dégâts importants.
Le président américain Donald Trump et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou ont à maintes reprises juré de ne pas laisser l'Iran obtenir une bombe nucléaire. Cependant, la République islamique semble résolue à obtenir un arsenal nucléaire. L'agence de surveillance nucléaire, l'AIEA à Vienne, a récemment rapporté que ses inspecteurs s'étaient vu refuser par Téhéran l'accès à au moins deux sites suspects et s'est dit préoccupée par les travaux dissimulés.
La plupart des analystes estiment que l'Iran a amassé cette année suffisamment d'uranium faiblement enrichi pour produire au moins une arme nucléaire par des violations successives de l'accord sur le nucléaire de 2015, signé avec six puissances mondiales. Dès lors que les États-Unis se sont retirés unilatéralement de l'accord sur le nucléaire,  l'Iran s’estime en droit de dépasser les limites de production fixées par l'accord.
Yossi Cohen

Le chef du Mossad Yossi Cohen, à qui on prête de nombreuses opérations extérieures, a fait de l’Iran son objectif principal en se distinguant de tous ses collègues sécuritaires et en soutenant la stratégie de Netanyahou contre l’accord nucléaire, n’excluant pas l’usage de la force. Tous les chefs militaires et sécuritaires israéliens s’étaient jusqu’à présent prononcé ouvertement contre toute frappe contre les installations nucléaires iraniennes parce qu’ils estimaient que Benjamin Netanyahou avait volontairement exagéré la menace iranienne. Mais, Yossi Cohen n’aura de cesse que de neutraliser totalement le programme nucléaire iranien par tous les moyens dont il dispose.
C’est pourquoi, les Iraniens évoquent «un sabotage perpétré par Israël. La République islamique essaie toujours d’empêcher toute escalade, mais elle pourrait bien changer de ton et d'attitude, si des pays hostiles, en particulier le régime sioniste et les États-Unis, franchissent les lignes rouges fixées par l'Iran».
Natanz

Le service en langue persane de la BBC, la radio-télévision publique britannique, avance une autre hypothèse : celle d'une action menée contre la centrale nucléaire de Natanz par un mystérieux groupe iranien. Les Britanniques indiquent avoir reçu un communiqué d'un groupe se faisant appeler «Les Guépards de la Patrie». Ces «guépards» se présenteraient comme des «dissidents au sein de l'appareil sécuritaire iranien» mais on ignore précisément ceux qui se cachent derrière l'organisation. Il est certain qu’Israël verrait d’un bon œil tous ceux qui peuvent freiner le programme nucléaire iranien. Le coronavirus n’est pas la seule plaie qui touche l’Iran des mollahs.


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