MAHMOUD ABBAS À RECULONS AUX
POURPARLERS DU CAIRE
Par Jacques BENILLOUCHE
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Le président égyptien Al-Sissi fait du forcing pour trouver une solution au conflit inter-palestinien. Il s’est personnellement impliqué dans la négociation pour une réconciliation entre le Fatah et le Hamas. Les émissaires des deux clans palestiniens se sont rendus au Caire pour entamer des discussions serrées, à huis clos pour ménager les susceptibilités après plus de dix ans de désaccords.
Majid Faraj en veste noire |
La délégation du Fatah comprend le chef des renseignements de l’Autorité, Majid Faraj, et Fayez Abou Eita, un responsable du parti à Gaza. Le Hamas a délégué son chef à Gaza, Yahya Sinwar, et Salah al-Arouri, cadre en exil tout juste désigné comme numéro deux officiel du mouvement. Il s’agit de négocier précisément les termes d’un accord sous l’égide de l’Égypte.
Le
président Al-Sissi compte sur l’épée de Damoclès d’un plan B qui serait imposé
d’office si les négociateurs échouaient. Mais bien qu’absent, Mahmoud Abbas
pose ses conditions qui risquent de faire capoter les négociations. Il exige le
désarmement total des troupes du Hamas pour que l’Autorité puisse mieux
contrôler la bande de Gaza. Pour lui il revendique «un État, un régime, une
loi et une force armée». En s’inspirant de la situation critique prévalant
au Liban, il refuse qu’une milice contrôle une partie de Gaza : «Je n’accepterai pas la reproduction à Gaza de
l’expérience du Hezbollah au Liban».
Hazem Kassem |
Le Hamas a certes accepté de dissoudre son comité
administratif et manifesté sa volonté d’organiser des élections législatives mais
son bras armé, les Brigades Azzedine Al-Kassem, ne se sentent pas concernées
par cet engagement. Le porte-parole du Hamas, Hazem Kassem, a bien précisé que «les armes de la résistance sont légitimes. Leur rôle est de protéger les
Palestiniens et de libérer leurs terres de l’occupation israélienne. Par
conséquent, cela ne devrait pas être une question à débattre». Il est donc
difficile d’imaginer que le Hamas abandonne ses armes pour la réconciliation
car pour lui, cela renforcerait «la domination autocratique du Fatah
sur la société et les institutions politiques palestiniennes». Le risque
existe qu'avec de l'armement, le Hamas expulse à nouveau de Gaza les partisans du Fatah.
Mais
l’Égypte entend soumettre le Fatah en compliquant la situation à Gaza. Elle a cautionné et même renforcé le blocus
israélien contrôlant totalement la circulation des personnes, des marchandises,
des médicaments, des aliments et des fournitures humanitaires dans et hors du
territoire. Tariq Dana, conseiller
politique du site palestinien Al-Shabaka, estime que : «Si le Hamas dépose
ses armes, il n’existera plus en tant que mouvement de libération et perdra
ainsi la popularité et la légitimité qui sont au cœur de son autorité». En
fait, la plupart des Palestiniens de Gaza, sont opposés au désarmement du
groupe parce qu’ils craignent d’être «la cible de plus d’agressions
israéliennes à tout moment». Il n’est pas question pour Abbas de permettre
une répétition des affrontements de 2007.
Sur le plan politique, Zulfiqar
Sweirjo, membre du Comité politique du FPLP marxiste (Front populaire pour la
libération de la Palestine) à Gaza, «soutient pleinement les efforts de
réconciliation car Gaza connaîtra une nouvelle guerre avec Israël si une
solution politique n’est pas trouvée pour soulager les souffrances de la
population assiégée. Si la paix s’impose, le Hamas acceptera de laisser ses
armes sous le contrôle du gouvernement d’union». L’Égypte sait que si les
Brigades al-Kassem conservent leurs armes, alors ils prendront la tête de la
résistance.
Dahlan et Abbas |
Mahmoud Abbas a raison de s’inquiéter
du rôle de l’Égypte dans ces pourparlers car en cas d’échec, elle mettra en
action son plan B consistant à un accord avec Mohamed Dahlan. Le Caire ne tente
même pas de dissimuler son soutien au Hamas et à Mohammed Dahlan avec une
intention marquée de se placer au centre du processus de paix au Moyen-Orient
car les Égyptiens sont motivés, dans ces efforts, par leurs propres intérêts.
En fait, depuis que Donald Trump a pris ses fonctions, son administration tente
d’amener les Palestiniens et les Israéliens à la table des négociations. Pour
cela il tente de faire jouer à l’Égypte le rôle de médiateur, supervisant
un accord de paix régional qui réunirait les pays arabes du Golfe, Israël et
l’Autorité palestinienne. Mais Mahmoud Abbas ne semble pas pressé.
Les chances de réussite des
pourparlers de réconciliation ne sont pas élevées. C’est pourquoi l’Égypte est prête à mettre en œuvre
un plan B à tout moment, à savoir abandonner la voie actuelle et soutenir les
efforts de réconciliation entre le Hamas et Dahlan. Les
Égyptiens sont déterminés à intervenir directement à Gaza, car ils tiennent à leur
zone tampon de sécurité avec Israël. Le plan B interviendra si Abbas refuse
d’assumer la pleine responsabilité de Gaza. En effet, depuis l’arrivée du
nouveau chef du Hamas, Yahya Sinwar, les relations entre le mouvement islamique
et l’Égypte se sont réchauffées au point que de hauts responsables du Hamas
affirment à présent que l’Égypte est devenue le «partenaire
stratégique» du groupe.
En effet, le Hamas et l’Égypte ont conclu un accord sécuritaire clé sur le Sinaï cette année. Les responsables égyptiens ont salué la coopération en matière de sécurité de Sinwar à son nouveau poste. Les Égyptiens révèlent que Sinwar a dénié être membre des Frères musulmans et qu’il se souciait seulement des intérêts de Gaza : «Sinwar s’intéresse au projet national palestinien, pas au projet des Frères musulmans».
Sinwar en chemise |
En effet, le Hamas et l’Égypte ont conclu un accord sécuritaire clé sur le Sinaï cette année. Les responsables égyptiens ont salué la coopération en matière de sécurité de Sinwar à son nouveau poste. Les Égyptiens révèlent que Sinwar a dénié être membre des Frères musulmans et qu’il se souciait seulement des intérêts de Gaza : «Sinwar s’intéresse au projet national palestinien, pas au projet des Frères musulmans».
Construction d'une zone tampon Egypte-Gaza |
Selon
l’accord conclu par Sinwar, le Hamas s’engageait à fournir à l’Égypte des
informations sur les groupes salafistes au Sinaï et à créer une zone tampon
frontalière pour empêcher les combattants salafistes d’entrer dans la péninsule
égyptienne ou d’en sortir. D’ailleurs, pour étendre sa zone tampon le long de la
frontière avec Gaza, l'Égypte a détruit 140 habitations dans un effort combiné avec
le Hamas pour empêcher les transferts d’armes et le passage de terroristes de
Daesh.
Par ailleurs Sinwar a conclu un accord similaire
avec Dahlan, l’ancien homme fort de Gaza, qui a promis pour Gaza d’importants versements
de fonds venant des Émirats. On comprend
les réticences de Mahmoud Abbas qui se sent à présent totalement isolé et on
lui prête l’intention de saboter les négociations. Mais Ahmad Yousif, ancien conseiller politique
d’Ismaël Haniyeh, a été clair : «Si le président Abbas n’accepte
pas l’initiative égyptienne cette fois-ci, Dahlan sera l’alternative. Si
cette série de pourparlers de réconciliation échoue, alors Dahlan sera le roi
de Gaza».
Alors que les pourparlers sur l’unité palestinienne se poursuivent, une délégation israélienne est arrivée au même moment au Caire. La rencontre entre responsables israéliens et égyptiens a duré quelques heures au sein même de l'aéroport. L'Égypte a proposé un nouveau plan pour l'échange de prisonniers entre Israël et le Hamas qui aurait accepté le nouveau plan égyptien. Wait and see.
Mise-à-jour du 12 octobre 2017
Un accord de réconciliation entre le Hamas et le Fatah a été
signé au Caire, le 12 octobre. Cet accord prévoit le déploiement de 3.000
policiers de l'Autorité palestinienne à Gaza, le long des frontières avec
Israël, y compris le passage de Rafah, le transfert du contrôle administratif
de Gaza du Hamas au gouvernement d'unité palestinien au plus tard le 1er
décembre. Mais aucune précision n'a été donnée sur l’avenir des hommes armés des brigades Azzedine
al-Kassem et sur leur éventuel démantèlement.
RépondreSupprimerJacques Benillouche explique pourquoi les « pourparlers » entre Fatah et Hamas sont difficiles, pour ne pas dire impossibles.
Le Fatah veut « désarmer » le Hamas qui refuse, arguant de La Défense de Gaza.
Le Président Égyptien a du pain sur la planche.
Quand deux idéologies liberticides ( fatah et hamas) se rencontrent, que peuvent-elles accoucher de bien ???.... Mais souhaitons tout de même paix à ces pauvres gens Arabes/palestiniens qui souffrent du fait de l'inconscience de leurs maîtres/dirigeants.
RépondreSupprimerPourquoi voulez-vous que ces gens là fassent la paix, La paix pour eux signifie la fin de leur pouvoir, sur un ensemble de personnes soumises et à genoux, l'arrêt du flot à jet continu de pétrodollars et d'Euros. Vous prenez ces gens là pour des imbéciles vous avez tort. Ils sont intelligents tout comme nous. Ils tirent leur enrichissement de la misère d'autres.coréligionnaires ! pourquoi, voulez-vous que cela s'arrête ?
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