LE PEN COMPTE SUR L’APATHIE DES ÉLECTEURS POUR
GAGNER
Par Jacques BENILLOUCHE
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Ce qui était inenvisageable après le premier tour, devient
probable à présent. Face à un concours de circonstance précis, Marine le Pen peut
coiffer au poteau Emmanuel Macron, moins par soutien positif des Français dans leur
majorité mais en raison de l’apathie des électeurs. C’est une éventualité que
l’on ne peut plus exclure. Pointé dans les sondages à 60% des voix au terme du
premier tour, sur des hypothèses qui peuvent être démenties, Emmanuel Macron ne semble pas
avoir réussi à convaincre la gauche et l’extrême-gauche à voter pour lui.
Le 1er mai à Paris |
Deux
raisons concourent à craindre une issue dramatique. D’une part les électeurs
désabusés risquent de choisir l’abstention car ils refusent de choisir, selon
eux, entre la peste et le choléra ; cela sera pour eux l’occasion d’aller
à la pêche plutôt qu’au bureau de vote. D’autre part, pour marquer leur dépit de
ne pas voir leur leader au deuxième tour, les électeurs de gauche pourraient adopter
la politique du pire et du chaos mais avec un objectif précis, faire parler la
rue et bloquer le pays pour forcer un changement de gouvernance. Les
manifestations du premier mai et leurs violences sont un avant-goût de ce
qu’ils préconisent au lendemain du second tour.
Les
lycées et quelques universités ont été désertés le 27 avril par 3.000 élèves et
étudiants qui sont descendus dans la rue pour tenter de rééditer les
manifestations de 2002 après l’échec de Jospin. Ils n'ont pas été suivis par les Français. Les slogans en disaient long
sur leur pancarte : «Ni Patrie, ni patron, ils m'effraient, je
les trouve idiots». Mais il n’y a aucune commune mesure entre le risque
actuel et celui de 2002 où Jean-Marie Le Pen plafonnait à 18% et où l’on avait
vécu un réel Front républicain.
Jean-Luc
Mélenchon est conscient du danger mais cela entre dans sa stratégie de
reconquête du pourvoir par une révolution moderne ; il ne lève pas le
petit doigt pour Macron. Il prépare la revanche de la rue pour déstabiliser un
régime qu’il estime déjà faible alors qu’il n’est pas encore installé. Lui et
ses amis s’affichent sur les écrans de télévision sans prendre de position
précise pour montrer leur puissance malgré leur échec. Et pourtant l’autre
perdant, François Fillon, a adopté le service minimum en prônant clairement le
vote Macron. Certes Mélenchon exhorte ses
partisans à ignorer Le Pen : «Je dis à tous ceux qui écoutent : ne faites
pas l'erreur terrible de voter pour le Front national parce que vous poussez le
pays vers une conflagration générale dont les conséquences sont
imprévisibles», mais c'est une invitation à s'abstenir ou voter blanc au profit de Le Pen.
La
situation deviendrait critique si l’abstention atteignait des sommets. Selon un
sondage, seuls 40% des électeurs de Mélenchon acceptent de donner leur voix à
Macron, 19% à Marine le Pen tandis que 41% ne voteraient pas. Il risque donc de
manquer des voix à Macron pour gagner aisément.
L’exemple
de Trump est dans tous les esprits. Il démontre que les électeurs ne votent
plus en fonction de leurs convictions ou de l’idéologie de leur candidat mais selon
leur bonne ou mauvaise humeur, pour contester. Les ouvriers de Détroit, la
ville des constructeurs automobiles, ont basculé au profit de Trump malgré son programme
très libéral. Ils voulaient punir et se sont d’abord punis eux-mêmes en le faisant élire dans deux Etats où il était minoritaire. Marine Le
Pen rêve donc du syndrome Trump pour au moins gagner sur les sondages.
Macron au Mémorial |
Elle
est prête à tout, même à rendre un hommage discret aux victimes de la
déportation. Contrairement à tous ses déplacements et pour ne pas offusquer ses
militants antisémites, elle n’a pas convié la presse pour aller déposer, sans
déclaration, une gerbe devant une stèle à Marseille pour la journée nationale
du souvenir des victimes de la déportation. Il ne faut pas se mépendre sur cette attitude électorale; cela ne suffira pas à convaincre
les Juifs après sa déclaration sur le Vel’ d’hiv’.
Macron
était plus à l’aise et plus crédible dans sa démarche au Mémorial de
l’Holocauste, face au mur recouvert de 76.000 noms de Juifs déportés : «L'hommage
que je voulais faire aujourd'hui est ce devoir que nous devons à toutes ces
vies déchirées par les extrêmes, par la barbarie. Ce qui s'est passé est
inoubliable et impardonnable, il ne devrait jamais se reproduire». Il
s’est exprimé avec force et sans détour.
Les
manifestants du 1er mai qui ont défilé sous les ordres des syndicats
et qui ont mis en évidence la fracture sociale, pourraient peut-être inciter
les abstentionnistes à se réveiller pour voter afin d’éviter que
l’extrême-droite ne mette son plan du chaos en exécution. Macron espère que le syndrome
Trump ne contaminera pas les élections en France. Cela explique la prudence des
électeurs et des sondeurs.
Un
point important sur les incohérences du programme FN n’est pas suffisamment mis
en évidence par les media et n'est pas matraqué par l’entourage de Macron. Une certitude
confirmée par Marine Le Pen elle-même, 75% de son programme n’est réalisable
que si la France sort de l’Europe. Cette dernière comédie sur son hésitation sur
l’Europe est une illusion pour ne pas brusquer les partisans de Dupont-Aignan. Si
elle est élue, le Frexit se fera une fois l’élection terminée.
Le Frexit serait
pire que le Brexit, pour plusieurs raisons et la première, la Grande-Bretagne
n’a jamais adopté la monnaie euro. Dov Zerah, dans sa chronique de ce jour, vient de nous donner un aperçu des premières conséquences du Brexit. Si Marine Le Pen abandonne l’euro, elle
entraînera une crise existentielle pour l’Europe. Le Frexit aura un impact
économique sur les autres États membres. La France est un pays fondateur de
l’UE et ensemble avec l’Allemagne ils représentent les deux poids lourds.
L’absence de l’un désagrégerait l’ensemble.
Le
commissaire aux affaires économiques et financières de l'UE, Pierre Moscovici, ne
veut même pas imaginer une victoire de Le Pen. Il a averti qu'une sortie de
l’euro aurait des résultats chaotiques, allant des restrictions sévères aux
retraits d'argent aux banques françaises aux politiques d'austérité immédiate.
Après le
premier tour, le doute sur la victoire de Macron s’est installé malgré les
sondages qui le maintiennent entre 59 et 60%. Mais Marine le Pen est tenace et
toutes les ficelles, même les plus grosses, apportent chaque jour leur lot d’incertitude. Elle vient de discourir en utilisant le propre texte de François Fillon. La bataille n’est pas gagnée, il faut voter Macron, pour éviter que la lèpre brune ne s’installe en France pour ensuite
se répandre en Europe.
Les citoyens francais qui veulent s'abstenir pourraient donner la victoire a MLP. Un des pouvoirs du President est de donner les ordres a la "Grande Muette". Qui peut ne pas pretendre que le soir meme des resultats, tous les politiciens importants, les chefs des syndicats, les intellectuels, les opposants ne soient immediatement arretes? Erdogan l'a fait, MLP peut copier.
RépondreSupprimerEn un mois, tout serait regle, les legislatives reporteees aux calendes grecques et les ratonnades en plein boom.
Mr Kabi n'exagérons pas, Le Pen est dangereuse mais ne succombons pas à la paranoïa, elle ne pourrait pas déclencher une répression à froid. Par contre ce qui risque arriver, c'est une réaction violente de groupes d’extrême gauche à ses premières mesures prémice de guerre civile.
RépondreSupprimertrès bonnes analyses, en ce qui me concerne, je ne me sent pas concerné, l'Etat socialiste n'a pas répondu à ma longue lettre sur les spoliations de ma famille et a envoyé trois d'entre eux dans les camps de concentration il y a 70 ans, ma mère, né en 1939, fut une enfant cachée...l'Etat Français se fout totalement ce cette histoire et des Justes parmi les Nations qui l'ont sauvé..alors voter pour le rejeton Macron..rien à f.....la manipulation, le mensonge, et la trahison ont remplacé dans ce pays Liberté Egalité Fraternité, alors je continue à errer comme un Juif pauvre en 2017...
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