ÉLECTIONS EN IRAN : UN
SUCCÉDANÉ DE DÉMOCRATIE
Par Jacques BENILLOUCHE
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Tous les quatre ans on reparle des élections présidentielles en Iran comme s’il s’agissait d’un exercice de démocratie alors que le pays est verrouillé depuis la révolution de 1979. Il n’y a aucune comparaison entre l’élection en France et celle de l’Iran. C’est presque une mascarade de démocratie liée à la nature même du régime et à sa structure. Les trois pouvoirs classiques, le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire sont détenus par un seul homme omnipuissant.
Khamenei et Rohani |
Le
guide suprême, Ali Khamenei, occupe la fonction de chef de l’État et de chef suprême du
régime. Il ne se borne pas à inaugurer les chrysanthèmes, au contraire. Désigné
par l'Assemblée des experts composée de 80 religieux, il fixe, avec le Conseil
de discernement, les orientations du régime. Il est partie prenante dans le
processus législatif du pays puisqu’il le contrôle à travers le Conseil des
gardiens de la Constitution. Il accapare le pouvoir judiciaire en nommant
lui-même les plus hautes instances de la justice. Il est maître de tous les
pouvoirs militaires et policiers et contrôle en plus une puissante garde
prétorienne affectée à son service exclusif.
Le président de la République est élu au suffrage universel direct pour un maximum de deux mandats de quatre ans. Hassan Rohani vient d’être réélu pour un deuxième mandat. Mais cette élection ne permet pas à tout citoyen de s'y présenter. Un filtre est effectué par le Conseil des gardiens de la Constitution qui décide des candidatures selon ses critères stricts. Le guide suprême doit par ailleurs ratifier la candidature, ce qui laisse un doute sur la liberté d’action et de pensée du candidat.
Le président, chef du pouvoir exécutif et du gouvernement composé de membres du Parlement, n’a aucun pouvoir sinon virtuel puisque le guide suprême dispose d'un droit de regard et du droit de bloquer toute décision présidentielle. C’est pourquoi la qualification de «modéré» ou de «réformateur» est abusive pour un homme politique sous contrôle total.
Le président de la République est élu au suffrage universel direct pour un maximum de deux mandats de quatre ans. Hassan Rohani vient d’être réélu pour un deuxième mandat. Mais cette élection ne permet pas à tout citoyen de s'y présenter. Un filtre est effectué par le Conseil des gardiens de la Constitution qui décide des candidatures selon ses critères stricts. Le guide suprême doit par ailleurs ratifier la candidature, ce qui laisse un doute sur la liberté d’action et de pensée du candidat.
Le président, chef du pouvoir exécutif et du gouvernement composé de membres du Parlement, n’a aucun pouvoir sinon virtuel puisque le guide suprême dispose d'un droit de regard et du droit de bloquer toute décision présidentielle. C’est pourquoi la qualification de «modéré» ou de «réformateur» est abusive pour un homme politique sous contrôle total.
Le Conseil des gardiens de la Constitution, composé de 12 membres désignés
pour 6 ans, comprend 6 religieux nommés par le guide suprême et 6 juristes élus
par le Parlement. La principale fonction du conseil est de veiller à la
compatibilité des lois du Parlement avec les principes de la Constitution et de
l'islam. Il dispose des pouvoir du Conseil Constitutionnel en France. Les lois votées
par le Parlement (Madjalis) passent par le filtre du Conseil des gardiens de la
Constitution qui décide de leur application ou pas.
Conseil de discernement |
Le
Conseil de discernement de l’intérêt supérieur du régime a été créé en 1988
par l’imam Khomeiny pour arbitrer les litiges entre le Parlement (Madjalis) et
le Conseil des gardiens de la Constitution. Il est composé de juristes, de
politiciens élus et de membres désignés par le guide suprême. Le conseil
comprend six membres religieux du Conseil des gardiens ainsi que les chefs des
pouvoirs législatif et judiciaire, le président de la République et une dizaine
d'autres personnalités. Il peut imposer des solutions de son cru aux problèmes
portés devant ses instances. Le guide suprême, intervenant directement dans le processus
des nominations au conseil, il est évident qu’il reflète l'ensemble de ses
volontés.
L’Assemblée des Experts, présidée par Ahmed Jannati, est composée de 80 religieux élus au suffrage universel direct pour une durée de 8 ans. Elle désigne le guide suprême et chef de l'État avec le pouvoir de le démettre de ses fonctions. Mais son rôle est purement théorique puisque le Guide suprême est nommé à vie.
Ahmed Jannati |
L’Assemblée des Experts, présidée par Ahmed Jannati, est composée de 80 religieux élus au suffrage universel direct pour une durée de 8 ans. Elle désigne le guide suprême et chef de l'État avec le pouvoir de le démettre de ses fonctions. Mais son rôle est purement théorique puisque le Guide suprême est nommé à vie.
Le
Parlement (Madjalis) représente le pouvoir monocaméral. Les 290 députés qui
composent le Parlement sont élus pour 4 ans au suffrage universel direct. Le
Parlement dispose des droits de voter les lois ainsi que d'approuver ou de
renverser les gouvernements et le président. Mais il n’a aucune emprise sur les
décisions relevant du guide suprême ou des organes sous son contrôle. Le Madjalis
est étroitement sous la surveillance du Conseil des gardiens et du Conseil de
discernement.
Cette
structure du régime iranien montre que le président élu n’a aucune latitude
pour agir librement. Lors de sa première élection, les commentateurs
internationaux ont été unanimes pour nous annoncer l’arrivée d’un «réformateur» à la présidence de l’Iran, qui promettait du changement et une autre méthode
de gouvernance. Mais à l’usage, à l’exception d’une modération dans sa
sémantique, le nouveau président Rohani suit les traces de ses prédécesseurs,
mais avec un turban blanc en plus.
Les
signes d’ouverture n’ont pas été visibles à l’occasion de son investiture du 4
août 2013 puisque les États-Unis n’avaient pas été invités à sa cérémonie
contrairement aux autres pays, Grande-Bretagne incluse. Il a utilisé la même
dialectique fanfaronne qu’Ahmadinejad vis-à-vis d’Israël : «Cela nous
fait rire. Qui sont-ils, ces sionistes pour nous menacer. La réaction promise
par l'Iran dissuaderait Israël». Il est vrai que Benjamin Netanyahou
n’avait pas fait dans la dentelle en qualifiant Rohani de «loup en peau de
mouton qui se rapproche de la ligne rouge mais qui ne l’a pas encore franchie».
Hossein Moussavi |
On
nous avait prédit qu’il serait le disciple des «modérés», de la lignée
des Rafsandjani et Khatami mais il n’a toujours pas élargi les figures du printemps iranien, parmi lesquels Mohamed Hossein Moussavi, qui
sont toujours en résidence surveillée. Il démontre en fait qu’il n’a pas les
mains libres et que ses prérogatives sont limitées. Certains l'assimilent même
à une marionnette présentable aux mains des véritables maîtres de l'Iran. S'il a gagné contre les Conservateurs, on ne voit pas de différence dans la politique qu'il a menée. A la rigueur un seul aspect positif de son élection : l'accord
nucléaire historique signé avec l'administration Obama et d'autres puissances
mondiales en 2015 ne sera pas remis en cause pendant son mandat.
Certes
l’Histoire ne bégaie pas mais les ayatollahs d’Iran n’ont pas tous été
nuisibles pour leur pays. Rohani aurait pu prendre exemple sur les ayatollahs
progressistes et clairvoyants qui ont influencé la vie politique de l’Iran. En
particulier, l'ayatollah Abdullah Behbahani a été un des acteurs notables de
la révolution constitutionnelle en Iran de 1906. Il s’était allié dès la
première heure au mouvement d'opposition contre le Shah, qui pourtant le
consultait sur les problèmes politiques du pays. Il s’était permis d’adresser
un message au Shah, resté célèbre : «Vous pouvez m'assassiner mais vous
devez me respecter». Il avait un véritable charisme et une proximité avec
le peuple.
Les
optimistes, qui avaient jugé Rohani intelligent, instruit et d’une certaine
manière progressiste, espéraient le voir marquer l’histoire de l’Iran en axant
sa politique sur l’amélioration du niveau de vie de ses compatriotes. Or il a
préféré continuer la course aux armements et aux machines de mort. Ils
espéraient aussi le voir réorienter la politique iranienne vers une approche
laïque pour réduire l’influence des idéologues islamistes et pour éviter le
gâchis socio-économique. Après quatre ans, l'objectif n’a pas été atteint.
Liesse dans Téhéran |
Il
n’a pas compris que les grandes idéologies n’ont plus cours dans notre monde de
plus en plus matérialiste et attaché au bonheur terrestre. Ceux qui n’ont pas
pris ce virage sont condamnés à l’échec. La Chine a compris qu’il fallait plus
de souplesse dans son idéologie communiste et elle est devenue le symbole du
succès. La Russie a refusé d’appliquer réellement le changement et elle
symbolise aujourd’hui l’échec d’une politique. Le nouveau président iranien ne
pourra gagner le pari de l’avenir de l’Iran que s’il rétablit le pluralisme et
s’il conduit son pays vers une laïcité juridique sinon, à moyen terme, le
système implosera comme tous les systèmes totalitaires qui imposent l’arbitraire.
Il lui appartient donc de choisir la bonne direction mais il en prend-il le
chemin ?
C'est vrai, il y a contradiction entre "Iran" et "Démocratie".
RépondreSupprimerLes Candidatures sont "filtrées", les seuls Candidats sont des Religieux.