MACRON, INVENTION DES MEDIA ET DES SONDAGES
Par
Jacques BENILLOUCHE
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Une
véritable folie s’est emparée de l’opinion publique française, manipulée par
les media et les sondages, pour pousser les électeurs à rejoindre le nouveau
gourou. Il faut savoir gré à Emmanuel Macron d’avoir compris le système
audio-visuel puisqu’il l’exploite au maximum. Les journalistes sont à ses pieds
parce qu’ils craignent de rater l’épisode sans lequel ils seraient ringardisés.
Comme s’ils n’avaient pas suffisamment d’informations à se mettre sous la dent,
ils suivent le parcours de la nouvelle coqueluche qui renverse les codes
établis.
Macron
agit comme un libérateur d’idées jusqu’alors sclérosées alors que rien de
nouveau ne passionne les électeurs. À voir la tristesse et l’inanité du débat
sur les primaires de la gauche, il comprend qu'il faut changer la donne pour impliquer les électeurs dans la politique nationale. Les partis
n’ont pas innové et ils ressassent les mêmes arguments éculés, les mêmes
diatribes, les mêmes invectives avec des discours trop longs qui désorientent
les Français, vite déconnectés.
Macron
s’est donc forgé une image du renouveau, faisant croire qu’il n’est pas un
homme des partis alors qu’il doit son existence politique à l’un d’entre eux. À
son actif, il a réussi à ringardiser tous les autres candidats, pourtant encore
jeunes, qui diffuse leur bouillie politique sans innover, sans coller aux thèmes
du nouveau siècle. La presse, avide de sensationnel, joue le jeu du candidat parce
qu’elle lui permet de développer ses ventes tout en donnant l’impression de
s’agenouiller devant le nouveau Dieu. Elle va très vite en besogne, ignorant la
réalité démocratique qui transforme en étoile filante les candidats sans assise
politique.
Macron à l'Elysée |
Il
attire parce qu’il est jeune mais il n’a dirigé aucun parti ; Il fait
croire qu’il dispose d’un programme élaboré alors qu’il ne s’agit que
d’incantations non chiffrées et qu’il ne peut se prévaloir d’une expérience des
affaires de l’État. Il n’a jamais été conseiller municipal et ni maire pour
toucher du doigt aux affaires de la Cité. Il n’a pas affronté les élections qui
tannent le cuir d’un homme politique. Il connaît certes les affaires financières
et la banque mais ne s’est pas distingué à son poste au ministère des finances
où nul ne se hasarderait à affirmer qu’il y a brillé.
On
compare Macron à Matteo Renzi alors qu’il s’agit d’une autre pointure qui a un long passé de militant. L’Italien
avait participé aux élections parlementaires de 1996 au Parti Démocrate qui lui
ont permis d’être élu président de la province de Florence en 2004 et de
devenir maire de la ville de Florence en 2009. Il a pris les fonctions de
secrétaire du PD avec mission, aux élections du mois de février, d’organiser
une grande coalition gouvernementale alliant la gauche, le centre et la droite. Il a occupé le poste de président du Conseil.
Alexis Tsipras |
On
compare Macron aussi à Alexis Tsipras, pour sa jeunesse certainement et non pas
pour son passé politique. Le Grec était tombé dans la marmite politique dès son adolescence. Il s’était engagé à la fin des années 1980,
dans les Jeunesses communistes grecques, au lycée où il fut membre influent du
mouvement lycéen. Il entra au bureau exécutif du syndicat des étudiants puis se
fit élire au comité central de l'Union nationale des étudiants de Grèce. De
1999 à novembre 2003, il devint le premier secrétaire politique de la section
de la jeunesse du parti Synaspismos, «Coalition de la gauche, des mouvements
et de l’écologie». Il participa à
toutes les manifestations internationales contre la mondialisation néo-libérale
et en décembre 2004, il fut élu membre du comité central du parti, puis au
secrétariat politique. Il participa aux élections locales de 2006 à Athènes
pour obtenir un poste de conseiller municipal.
Justin Trudeau |
Enfin
on compare Macron au canadien Justin Trudeau qui déjà, le 29 avril 2007, avait
été choisi par les militants du Parti libéral du Canada comme candidat dans la
circonscription de Papineau. Il remporta le siège puis fut réélu en 2011 et en
2015. Il devient chef du Parti libéral le 14 avril 2013 après avoir obtenu
80,1% des voix. Il a gagné les élections fédérales le 19 octobre 2015 et fut
désigné Premier ministre.
Ces
exemples auxquels se réfèrent les journalistes montrent que la politique est un
métier et non un casting pour un concours de beauté ou pour la une de Match. Il existe des étapes à
franchir avant de pouvoir aspirer aux plus hautes fonctions. Il est important
de passer par la case élections pour obtenir une certaine légitimité de la part
du peuple. Or ce n’est pas le cas de Macron. Confier l’avenir de la France à un
débutant fait courir au pays un grand risque, le même risque, pour d'autres raisons, que si Jean-Luc Mélenchon
ou Marine Le Pen étaient choisis. Par ailleurs il ne peut se prévaloir de
relais dans les institutions locales, les seules à relayer la parole du
candidat pour lui donner une assise politique.
Les
Français ne sont pas dupes et ils l’ont montré récemment à l’occasion des choix
auxquels ils étaient confrontés. Ils font joujou avec les media, la presse
people et les sondages en leur faisant miroiter des illusions mais réagissent
autrement devant l’urne, ce qui explique d’ailleurs les écarts entre les
sondages et les résultats finaux. Éric Fottorino, ancien directeur du Monde,
avait fait le bon diagnostic : «Les enjeux de pouvoir sont de ceux qui
vous font perdre des amis et gagner des courtisans». Macron s’est brouillé avec ses amis au
gouvernement et avec son mentor François Hollande. Il a perdu des amis et gagné
une multitude de courtisans dont les positions sont versatiles.
L’engouement
pour ce personnage risque de prendre l’eau lorsque la réalité s’imposera. La
bulle explosera très vite après ce petit moment de plaisir médiatique auquel
s’adonnent les Français. L’Histoire nous rappelle les rêves auxquels ont été
confrontés Édouard Balladur en 1994, et Alain Juppé en 2016, qui avaient
pourtant une expérience de haut niveau des affaires publiques. Très hauts dans
les sondages, ils se sont effondrés sur la dernière ligne droite parce qu'ils étaient une créature des media et malgré les articles laudatifs.
Cette
fougue derrière Macron a quelque chose d’irrationnel parce qu’elle n’est fondée
sur rien de concret. Les ralliements d’hommes politiques sont timides. Certes
Jean-Marie Cavada et Corine Lepage l’ont rejoint mais ce sont des habitués des changements de veste en fonction du sens du vent. Les soutiens de Macron ne le
jugent pas sur son programme mais ils adoubent un nouveau produit
médiatique, bien empaqueté et bien vendu mais qui au final décevra vite car la
politique n’est pas une illusion, un instant de délire, un espoir sans
lendemain.
Le
programme de Macron est l’auberge espagnole de ce qui peut plaire à tout le
monde, à savoir les libéraux et la gauche. Il propose une troisième voie
sans chiffrer sérieusement ses propositions. Il veut supprimer les cotisations
maladie et chômage payées par les salariés en augmentant la CSG qui touche les
actifs, les retraités et les revenus du capital. Il veut assouplir les 35
heures en proposant aux jeunes de travailler plus de 35 heures par semaine,
mais 30 à 32 heures seulement pour les seniors. Pour «doper l'esprit
d'entreprendre» il veut garantir le chômage aux indépendants, aux autoentrepreneurs
comme aux salariés s’ils décidaient de démissionner.
Macron
veut «protéger le pouvoir d'achat des petites retraites» en modulant l'âge
de départ à la retraite en fonction des métiers, en la faisant passer de 60 ans
minimum à 67 ans maximum. Il veut créer plus d’autonomie pour les
établissements et donner la priorité à l'éducation, et notamment à l'école
primaire. Il refuse le système d'école primaire unique, pour aider notamment
les écoles des quartiers en difficulté. Il prévoit une réforme administrative pour supprimer certains
départements situés dans les zones les plus urbanisées tout en les maintenant dans
les zones rurales. Enfin il veut
restaurer l'autorité de l'État en créant «10 .000 fonctionnaires de police
et de gendarmerie sur les trois premières années du quinquennat» et «en recréant
une nouvelle police de proximité».
Le
bateau Macron surfe aujourd’hui sur le désarroi des Français qui ont essayé la
droite puis la gauche, en vain. Mais ce bateau risque de ne pas éviter les obstacles
marins qui ramèneront à la raison l’électorat français. Macron aurait vraiment montré son courage politique s'il avait participé aux primaires de la gauche en candidat libre. Gagnant il aurait acquis une toute autre légitimité. Au final, les Français
reviendront à leurs fondamentaux en choisissant les valeurs sûres de la
politique, François Fillon ou le candidat de gauche, mais en éliminant sans
aucun doute Marine Le Pen. Ils ne sont pas encore prêts à l'aventure, guidés par un "gamin" de la politique.
«Le
bonheur se révélait aussi fugace qu'une étoile filante dans le ciel, et pouvait
disparaître d'un instant à l'autre», citation tirée de Un havre de paix
de Nicholas Sparks. L'étoile filante, telle sera la qualification de l'épopée Macron.
Macron est une pure créature des médias comme l'a été Segolaine Royal en 2006/2007.
RépondreSupprimerCeci étant, il faut peut être s'interroger sur l'effet "Trump" qui semble se répandre en Europe, et qui pourrait créer bien des surprises.
Et pour terminer, les sondages, qui se trompent lamentablement à chaque élection
Je ne suis absolument pas d'accord avec cette analyse. Il y a un grand nombre d’élus de droite comme de gauche qui ont rejoint Emmanuel Macron. Des spécialistes de l’économie comme Elie Cohen ou Ferry Pisani donnent au programme d'En Marche une crédibilité que vous lui niez. L’adhésion de plus de 140 000 électeurs pour leur majorité jeunes montre qu'il ne s'agit pas d'une étoile filante.Ceux qui connaissent le Parti Socialiste savent bien que c'est devenu une machine infernale. Le pays a besoin de reformes profondes qui nécessitent pour leur réussite un rassemblement allant bien au dela de la Droite ou de la Gauche, c'est pour cela que que Macron ira au bout.
RépondreSupprimerForce est de constater que la nouvelle idole des médias fait salle comble. De Paris à Lille en passant par Hénin Beaumont il séduit à gauche comme à l'extrême droite. Il est de bon ton d'aller applaudir la bête curieuse.
RépondreSupprimerIl se définit comme étant un candidat hors système mais multiplie les clins d'œil des deux côtés de l'échiquier politique tout en lorgnant vers le centre droit.
Le grand écart n'a qu'un temps et son programme fourre-tout ne séduira au final que les bobos en mal de nouveauté, toujours à la recherche de ce côté "in".
Bien cordialement
Cher monsieur Benillouche,
RépondreSupprimerSi je ne m'abuse, votre site en est au moins au quatrième article qu'il consacre à Emmanuel Macron ! Cela ne vous donne-t-il pas l'impression d'être, vous aussi, en quelque sorte, "à ses pieds" et de "jouer le jeu" de ce candidat ?
Très cordialement.
Chère Marianne,
RépondreSupprimerAvec la différence que mes articles ne sont pas très laudatifs à son égard.
J'ai décidé de ce dernier article sur lui après les nombreux mails qui cherchaient à me convaincre de le rejoindre.
Cordialement
Si on s'en tient à ce que disait déjà Léon Zitrone, journaliste "plénipotentiaire audiovisuel" selon Libération : "Qu'on parle de moi en bien ou en mal, peu importe. L'essentiel c'est qu'on parle de moi", peu importe que vos articles sur Macron soient ceci ou cela, l'essentiel est que vous en parliez.
RépondreSupprimerArticle courageux sinon téméraire.
RépondreSupprimerSi Macron parvient au second tour, IL battrait Fillon et écraserait Le Pen .
IL peut parfaitement éliminer le candidat PS et Melenchon et parier sur l'effondrement de Fillon ou de Le Pen pour être qualifié.
André M Tribune juive