L’IMPRÉVISIBLE AVIGDOR LIEBERMAN
Par Jacques BENILLOUCHE
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Tous les
éditorialistes internationaux s’étaient élevés contre la décision de Benjamin
Netanyahou de confier «le portefeuille de la défense, le deuxième poste
ministériel le plus important dans le pays, à l’ultra-nationaliste Avigdor
Lieberman, chef d’Israël Beitenou. Ce n’est pas bon signe». Et pourtant,
depuis sa nomination, il s’est montré discret, à l’exception de son appel controversé
aux Juifs de France de quitter le pays, loin de ses propos impulsifs habituels
et de prises de position presque irresponsables.
On s’attendait à une
catastrophe au moment où les États-Unis discutaient de l’accord de coopération
militaire décennal. L’aide américaine a été signée à minima cependant puisqu’elle
passait de 33 à 38 milliards de dollars par an. L’augmentation de 15% ne couvre
pas l’augmentation du coût de la vie. Mais la rupture avec les Américains n’était
pas consommée par la faute de Lieberman.
La pratique du pouvoir
semble avoir bonifié le personnage qui a lissé son comportement politique. Le
pragmatique ministre des Affaires étrangères, qui se verrait bien Premier
ministre, a renoncé ouvertement au dogme du Grand Israël, a joué la carte des
pays arabes modérés et a relié, pour la première fois, le problème palestinien
aux citoyens arabes israéliens. Son plan n'a pas reçu l'aval de son gouvernement
et il a fait grincer des dents à droite. Il estime que la seule solution reste
la séparation, qui avait été préparée par Ariel Sharon avant sa mort et qu’il a
reprise à son compte, convaincu depuis lors que le Grand Israël était devenu un
leurre, une illusion pour quelques messianiques.
Lieberman est loin
d’être un gauchiste ni un repenti. Il veut la séparation avec les Palestiniens.
Il prône d’annexer les trois grandes zones d’implantations comprenant le Goush
Etsion avec les implantations israéliennes situées dans les monts de Judée, au
sud de Jérusalem et de Bethléem, la zone d’Ariel et la région de Maale Adoumim
au nord de Jérusalem ; ces trois groupes d’implantations ayant pour objectif de
défendre Jérusalem et les flancs centraux d’Israël. Les petites implantations
seraient évacuées pour être regroupées. Une mince bande de territoire le long
de la vallée du Jourdain serait consacrée à la surveillance et à la défense des
frontières israélienne et à celle du royaume de Jordanie. C’est en fait une
sorte de plan Alon bis, revu et corrigé en fonction de la situation nouvelle.
Ce nouvel État palestinien serait délimité par un mur de séparation, en partie
déjà existant, qu’il faudra déplacer à certains endroits.
En échange Israël
donnerait aux Palestiniens une bande le long de la ligne verte, délimitée par
les villes d’Oum El Fahm, Ara, Tira et Kfar Kassem. Lieberman voit ainsi l’occasion
de se débarrasser de villes arabes qui n’ont jamais joué le jeu de la création
d’Israël et qui sont des foyers du terrorisme.
Réunion monstre à Gaza |
Le ministre de la
défense vient à nouveau de prouver l’originalité de ses idées. Il envisage de
permettre à nouveau aux Palestiniens de Gaza de travailler en Israël. Sa bonté
est intéressée car Israël souffre de la pénurie de main d’œuvre qui a poussé le
gouvernement à autoriser «l’importation» de 6.000 travailleurs chinois. L’agriculture
israélienne manque de bras. Les dirigeants des Conseils régionaux israéliens
de Shaar Hanegev et d’Eshkol appuient cette idée car l’agriculture est leur
principale source de revenus. Ils ont poussé le gouvernement à accorder aux habitants
de Gaza le droit de travailler en Israël pour sauver leurs productions.
Ouvriers arabes à Ashkélon |
Les
travailleurs de Gaza ont un long passé en
Israël dans la construction, l'agriculture et l'industrie. C’était du
gagnant-gagnant : les entreprises trouvaient leur compte et chaque
travailleur faisait vivre au moins deux familles. Il semble que la crise économique à laquelle sont
confrontés les Gazaouis ait influencé la décision du ministre de la Défense.
Les services sécuritaires, à l’initiative
de Lieberman, ferment les yeux sur ce qui s'apparente à une parade pour braver l'interdiction d'entrer en Israël. Ils
utilisent le droit des entrepreneurs de se rendre en Israël pour leurs
affaires. Les travailleurs se transforment en «travailleurs indépendants» pour entrer en Israël comme commerçants. Mais on les voit ensuite à Ashdod et à Ashkelon attendre les entreprises israéliennes qui
leur proposent de petits boulots d'ouvriers du bâtiment ou d'usine, souvent mal payés d’ailleurs mais au double
des salaires de Gaza. Les observateurs en sont à se demander s’il n’y a pas un
assouplissement déguisé de la fermeture de la frontière pour tenter de réduire
la détresse économique de Gaza.
On explique en Israël que ces
ouvriers sont souvent des hommes d’affaires autorisés à commercer avec Israël
en utilisant leurs permis d'entrée pour arrondir leurs fins de mois avec des
petits boulots. Mais le paradoxe est qu’il s’agit souvent d’une certaine élite
économique qui ne voit plus d'avenir à Gaza. On se souvient en Israël de l’époque pionnière où les médecins
juifs de l’Est acceptaient n'importe quel travail, même dans la voirie. De nombreux constructeurs
israéliens regrettent ces ouvriers qui avaient acquis une expertise dans la
construction et qui font défaut en Israël. Ils s’élèvent contre l’amalgame qui
est fait entre les terroristes et les travailleurs qui ne songent qu’à nourrir
leurs familles. Certains ont d’ailleurs gardé leurs relations d’antan qui les
ont aidés à obtenir le permis spécial d’hommes d’affaires. Leur amitié leur
permet d’ailleurs de dormir chez l’agriculteur israélien avec qui ils ont
souvent grandi. Ils défendent ces échanges en expliquant que la crainte du Hamas
est grande et qu’ils sont désarmés face à une violence qu’ils condamnent.
Port à Gaza |
Avigdor Lieberman souffle le chaud
et le froid. Il menace le Hamas d’une annihilation totale du mouvement
islamique en cas de guerre et parallèlement il promet qu’en cas de calme il est
prêt à transformer Gaza en un îlot de prospérité. La ville en a les moyens. Il a déclaré au quotidien palestinien Al-Qods :
«Nous n'avons aucune intention d'engager une nouvelle confrontation, mais
s'ils imposent une nouvelle guerre à Israël, cela sera la dernière. Ce sera la
dernière confrontation parce que nous les détruirons totalement».
L'arrivée au ministère de la Défense
de cette personnalité détestée des Palestiniens avait fait craindre une
escalade. Or c’est le contraire qui s’est passé. Certains attribuent cette
nouvelle situation au langage ferme utilisé par Lieberman. L'armée israélienne
riposte plus vigoureusement aux tirs de roquettes venant de Gaza alors qu’elle
ne répliquait pas systématiquement. En fait il use du bâton et de la carotte
vis-à-vis des Palestiniens : répression accrue des violences contre une
amélioration des conditions de vie. Il va plus loin en annonçant que si le
Hamas cessait ses activités hostiles, «nous serons les premiers à investir
dans leur port, leur aéroport et leur zone industrielle. Gaza pourrait devenir
un jour une nouvelle Singapour ou une nouvelle Hong Kong».
Lieberman Dahlan |
C’est le pragmatique qui parle.
Contrairement à la majorité du gouvernement, il se dit favorable à une solution
à deux États, un palestinien et un israélien, et pour régler le conflit, il se
singularise en proposant un échange de territoires. Il n’aime pas du tout Mahmoud Abbas et il le
proclame : «Le problème, ce n'est pas l'extrémisme, c'est Mahmoud Abbas,
incapable de prendre les décisions difficiles, coupé de la population et à la
tête d'une direction gangrenée par la corruption». C’est d’ailleurs pour
cela qu’il a pris langue secrètement à Paris avec Mohamed Dahlan, l’opposant
farouche au président de l’Autorité. Il est convaincu qu’il pourrait rétablir
avec lui la confiance entre Israéliens et Palestiniens. Mais les amis de
Mahmoud Abbas ne veulent pas entrer dans ce jeu pacifique. Ils ânonnent,
toujours et encore, leur logiciel politique périmé, figé à 1967. Le ministère
palestinien des Affaires étrangères a en effet dénoncé «les vues racistes»
d'Avigdor Lieberman, pour qui le ministre israélien de la Défense affirme son
attachement à la solution des deux États, tout en «magnifiant l'occupation».
Le
pragmatique Lieberman a évolué. Il a adopté une attitude digne face au procès du soldat Azria en défendant Tsahal et ses chefs ce que beaucoup de ministres se sont abstenus de faire. Mais le Hong Kong palestinien n’est pas encore
pour aujourd’hui, ni pour demain par la faute de dirigeants palestiniens qui ne
veulent pas évoluer. Lieberman étonne parce qu'il sait adopter sa stratégie en fonction des événements sans se sentir figé par un militantisme stérile.
Excellent article dont JE vais recommander la lecture à mes amis. Évidemment, IL va dans le sens de mes idées mais je suis content de voir que l'on peut progresser .Il suffira que disparaissent les anciens au logiciel bloqué ! Bravo Jacques Benillouche !
RépondreSupprimerAndré M Tribune juive
L'hostilite totale des Arabes israeliens au plan de Lieberman a pour effet de renforcer encore plus l'hostilite des autres Arabes. Or, nous n'avons vraiment aucun interet a nous mettre a dos definitivement notre minorite nationale qui, meme si ils ne sont pas vraiment sionistes ( ;) ) , ont adopte massivement les tendances de la societe israelienne. a savoir l'enrichissement plus ou moins rapide et la jouissance de cet enrichissement.
RépondreSupprimerQuant au manque d'ouvriers du batiment, Israel vient de signer un accord avec la Chine qui, dans un premier temps, enverrait 6,000 ouvriers du batiment chinois, une veritable aubaine pour les entreprises israeliennes et les promoteurs immobiliers.
@André
RépondreSupprimerVous prouvez par-là que mes articles ne sont pas militants et qu’ils dénotent une indépendance totale vis-à-vis de toute idéologie.
Le plan de Lieberman est le meilleur et le plus rationnel : A savoir, échange de territoires avec population, je dis bien avec population !
RépondreSupprimerMais les arabes israéliens n'accepteront jamais de vivre dans un état palestinien.
Ils ont gouté à la démocratie et à une relative prospérité.
Leur secret espoir est d'anéantir l'état d'Israël de l'intérieur, de créer un grand état palestinien pour le diriger, eux, s'estimant plus qualifiés et évolués que les palestiniens des territoires...
À Jacques Benillouche,
RépondreSupprimerQuand je félicite, on accepte et quand je critique, on se fâche ! Je viens du FIGARO
Vous savez :
SANS LA LIBERTÉ DE BLÂMER, IL N'EST POINT D'ÉLOGE FLATTEUR Beaumarchais)
ANDRÉ M Tribune juive
RépondreSupprimer@André
Règle N° 4 figurant sur l'entête des commentaires :
4. Comme les chroniqueurs ne sont pas là pour se faire insulter, les commentaires agressifs et injurieux seront éliminés.
Donc les critiques du contenu des articles sont les bienvenus et publiés en priorité mais les insultes contre le chroniqueur sont censurés. Il y a une différence.
Croyez-vous que je puisse publier une horreur pareille : "Que valent l'opinion d'un Arie AVIDOR, paltoquet de la diplomatie de brousse, sans parler de Jacques benillouche prêt à tuer père et mère dès lors quil peut salir Israêl et les Juifs qui ne sont pas de son bord politique." L'auteur se reconnaitra.Et souvent vous n'êtes pas loin de ce genre de texte.
Je n'appelle pas cela de la critique sérieuse mais de l'insulte.
Imprévisible, oui, mais ses volte-face constants, qu'il applique selon le besoin du moment, minent toute crédibilité. Un personnage qui reste douteux, voire dangereux.
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