DONALD
TRUMP A SU CAPTER L’ÉLECTORAT JUIF
Par Jacques
BENILLOUCHE
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Non, je n’ai pas reçu de coup de poing
à l’estomac avec l’élection de Trump. Je n’ai
jamais pris position pour l’un des candidats puisqu’il s’agit surtout d’une
affaire américaine qui ne nous concerne pas. La victoire n’était certes pas prévisible, si l’on se référait aux sondeurs décrédibilisés, mais il est de la responsabilités des experts des équipes électorales d'envisager toutes les hypothèses. Cette victoire démontre que la décision finale appartient aux électeurs et que rien n'est acquis.
J’avais
cependant fait, le 21 juillet 2016, une analyse qui concernait le changement de
stratégie de Trump vis-à-vis de son électorat juif. Une simple constatation de faits, une sorte de mise en garde intellectuelle. Mais cet article avait été jugé à tort comme une
ode à ce candidat alors qu’il s’agissait uniquement de souligner un aspect de
la campagne qui avait été négligé par la candidate Clinton.
Trump
avait la réputation de ne pas aimer les étrangers et comme tout populiste, de
ne pas aimer les Juifs. Il n’était pas perçu forcément comme un antisémite mais
comme un anti israélien. Cette réputation l’avait empêché d’être reçu
officiellement en Israël durant la campagne électorale car aucun dirigeant
israélien ne voulait être accusé de lui faire la courte échelle alors que la
grande majorité des Israéliens penchait pour lui, le pourfendeur des
islamistes. Il s’est trouvé dans le même cas que Marine Le Pen qui reste
interdite dans les milieux gouvernementaux israéliens au même titre que son
père.
Mais
Donald Trump et ses conseillers avaient décidé de travailler cet aspect négatif
de sa réputation auprès de l’électorat juif qui représente six millions d’âmes
aux États-Unis. Paradoxalement Hillary Clinton a délaissé son électorat
habituel juif qui votait à 70% pour elle. Elle a préféré adopter une position
neutre sur le conflit israélo-palestinien. Or les chiffres parlent d’eux-mêmes puisque Hillary Clinton a obtenu 208.000 voix de plus que Donald Trump. Il est facile de constater qu’un transfert de voix des
Démocrates vers les Républicains a fait la différence. Les Juifs ont participé à ce transfert parce qu'on les avait caressés dans le bon sens du
poil.
On
entend déjà l’argument que la victoire de Trump est due à un basculement du
vote des Juifs en sa faveur. Effectivement ils sont très massivement présents
dans les zones urbaines ou péri-urbaines et vivent pour 43 % dans le Nord-Est
des États-Unis, 23 % dans le Sud et 23 % également dans l’Ouest du pays. Les
résultats montrent que ces États ont basculé vers Trump. Certains États,
historiquement démocrates, ont voté pour le camp des Républicains ;
l’exemple le plus typique est l’État de Floride où résident de nombreux Juifs.
Donald Trump s'est adjugé la Floride, un des États clés du scrutin de
l'élection présidentielle américaine. Il a ainsi remporté 29 grands électeurs
en plus en battant Hillary Clinton qui n’a réuni que 47,7% des voix contre 49,1%.
L’écart est faible mais suffisant pour faire la différence.
Ses conseillers avaient
compris que les candidats républicains avaient beaucoup de mal à être soutenus
par la communauté juive. Les statistiques, lors de la candidature de Mitt Romney
en 2012, situent à 30% le pourcentage de votants juifs pour les Républicains.
Il ne devait pas y avoir d’exception pour Donald Trump mais lui, contrairement
aux précédents candidats, bénéficiait d’un jugement favorable car il compte des
amis parmi les Juifs américains et surtout dans sa propre famille, faisant de
lui le seul candidat ayant des liens directs avec les Juifs.
Ce détail précis a été négligé par Hillary
Clinton qui était sûre que la communauté juive réagirait aux propos violents de
Trump parce qu'elle partage les mêmes problèmes que toutes les minorités. Les
prises de position radicales à l’égard des Musulmans et des réfugiés syriens pouvaient
choquer. La volonté d’interdire l’entrée des Musulmans aux États-Unis rappelait
amèrement le rejet de l’immigration juive durant les années sombres de la
Shoah. Trump avait par ailleurs montré de son côté beaucoup d’hésitation à
rejeter le soutien qu’il avait reçu du grand leader du Ku Klux Klan, David
Duke, promoteur de théories racistes et militant de la «suprématie blanche
et d'un nationalisme blanc». Le slogan de Trump «l’Amérique d’abord», à
connotation antisémite, avait été perçu comme une volonté d’attirer à lui tous
ceux qui militent pour la suprématie blanche.
Ivanka et le rabbin Haskel Lookstein |
Mais les temps avaient changé.
Donald Trump avait donc décidé de réorienter sa campagne vers la communauté
juive auprès de laquelle il avait un réservoir de nombreux électeurs indécis. En
effet, il se trouve à présent lié avec la religion juive car sa fille Ivanka
s’est convertie au judaïsme orthodoxe en 2009, sous la direction de l’influent
Rabbi Haskel Lookstein. Âgée de 34 ans, Ivanka occupe une place importante dans
la campagne électorale. Elle détient une position élevée à la fois dans la
famille, dans l’entreprise et même dans la campagne. Si Trump est élu, il sera
ainsi le premier président des États-Unis à être le père et le grand-père de
Juifs pratiquants.
Il compte dans son entourage de
nombreux Juifs ce qui n’était pas le cas pour les précédents candidats
républicains. Le monde juif n’est pas une inconnue pour lui. Il a même réussi à
débaucher des soutiens et des donateurs parmi les Démocrates. De nombreux Juifs
avaient toujours travaillé avec lui et il a pu en attirer d’autres par son
idéologie politique. Il en a côtoyé
beaucoup dans le monde des affaires mais ils étaient tous frileux à l’idée de
se «mouiller» en politique avec lui. Ce monde fermé pouvait
difficilement accepter ses excès de langage, son côté clown et ses déclarations
politiques à connotation antisémite. Mais ce n'est pas un hasard si les deux principaux
responsables de la campagne de Trump sont des religieux orthodoxes et s'il
compte à présent parmi son entourage politique de nombreux Juifs.
Jason Dov Greenblatt |
Jason
Dov Greenblatt travaille pour le
groupe Trump en tant qu’avocat spécialiste de l’immobilier et a rejoint
l’équipe électorale en tant que conseiller juridique et conseiller pour les
affaires juives et israéliennes. Il sert de liaison avec la communauté juive.
Greenblatt, 49 ans, n’était pas fait pour être conseiller présidentiel pour les
affaires du Moyen-Orient. Père de six enfants, vivant au New-Jersey, il porte
sa kippa au travail et est fidèle à Trump depuis 19 ans, traitant exclusivement
de l'immobilier et des questions de société avec le titre de vice-président
exécutif et directeur juridique.
Mais
il a un plus. Il suit de manière quotidienne les informations en provenance
d’Israël. Comme beaucoup de jeunes Juifs américains avant leur entrée à
l’Université, il a été étudiant d'école talmudique dans les années 1980, à la
Yeshiva Har Etzion située dans une implantation de Cisjordanie. Il a été de
ceux qui ont préparé en mars le discours de Trump à la conférence de l'AIPAC à
Washington, le lobby pro-israélien. Les positions de Greenblatt sur Israël sont
celles de son patron. Il soutient une solution à deux États, s’il s’agit du
seul choix des parties elles-mêmes, excluant ainsi toute solution imposée de l’extérieur,
les Nations-Unies en particulier.
Il
pense que Trump est capable de relancer les pourparlers de paix, quitte à
forcer les Palestiniens à s’asseoir à la table des négociations. Il prône, en
cas de refus, de geler le financement américain de l'Autorité palestinienne. Il
croit à l’argent roi comme incitation principale pour relancer le processus de
paix moribond. Paradoxalement, Greenblatt n’était pas inscrit chez les
Républicains et il a donc été privé de vote aux élections primaires. Élevé dans
un quartier orthodoxe de Queens, Greenblatt est un pur produit des écoles
orthodoxes juives. Il est allé à l'école secondaire de l'Université Yeshiva, à
l'Académie talmudique Marsha Stern, puis à Yeshiva College après une année
d'études dans la Yeshiva de Cisjordanie. Il a obtenu son diplôme en droit de
l'Université de New York.
Greenblatt
affirme que Trump est extrêmement compréhensif puisqu’il ne travaille pas
durant le shabbat et les jours de fêtes. Il a été attiré dans cette campagne
car il voulait jouer un rôle historique pour Israël : «Je suis dans cette
position étonnante unique où je pourrais être en mesure d'aider un pays comme
Israël que j'aime si profondément en étant là où je suis». Il a défendu
avec vigueur Donald Trump en écrivant dans le Washington Post que
«la meilleure réfutation de l'allégation d'antisémitisme consistant à dire
que Trump est quelqu'un qui encourage, tolère ou flatte le comportement
antisémite, est confortée par son soutien indéfectible pour des causes juives
et pour Israël». Il pense que l’accusation d’antisémitisme provient de
récits médiatiques déformés et relayés par la bigoterie anti-juive.
David M. Friedman |
Expert
en procédures de faillite des entreprises, David M. Friedman du cabinet
d'avocats Kasowitz, est chroniqueur régulier au site d’informations Israël
National News (Aroutz-7). Friedman travaille avec Trump depuis 15 ans et il
s’est occupé de régler les faillites d’entreprises liées au groupe Trump, à
Atlantic City. Dans la campagne, il conseille Trump pour les affaires
israéliennes. Certains le voit déjà occuper le poste d’ambassadeur en Israël en
cas d’élection de Trump. Il a des positions tranchées sur le conflit israélien
sachant qu’il est sceptique sur la solution à deux États. Il est président des Amis
américains de Bet-El, une implantation de Cisjordanie située au nord de
Ramallah, qui risque d’être restituée aux Palestiniens en cas d’accord général
de paix.
Friedman
est propriétaire d’un logement en Israël et a une approche ferme sur l’avenir
des implantations : «Quand Hillary Clinton et Barack Obama disent que les
colonies sont illégales, ce n’est pas une position neutre». C'est justement
lui qui a préconisé à Trump d’adopter une approche plus «neutre» dans le
conflit israélo-palestinien contrairement à Obama. Mais pour lui la «neutralité»
consiste à organiser des discussions de paix sans imposer des conditions
préalables à chacune des parties.
Michael Cohen |
Michael
Cohen est conseiller spécial de Trump
pour le groupe et vice-président exécutif. Il n’a pas voté pour lui aux
primaires de New-York car il était inscrit sur les listes démocrates. C’est une
autre recrue du camp adverse. Cohen est diplômé de l'Américan University et de
l’école de droit Thomas M. Cooley. Il avait voté pour Barack Obama en 2008 mais
il prétend avoir été déçu par lui.
Cohen,
qui vit à New York City, est une prise de guerre. Il est qualifié de «pitbull» de Trump
car il est toujours en première ligne pour défendre son patron : «Si
quelqu'un fait quelque chose que Trump n'aime pas, je fais tout ce qui est en
mon pouvoir pour le résoudre à l'avantage de Trump. Si vous faites quelque
chose de mal, je vais venir à vous, vous attraper par le cou, et je ne vais pas
vous laisser aller jusqu'à ce que je sois fini». Sous ses dehors violents,
ses opposants le traitent de «bon
gars» et «d’amateur» car il n’a aucune expertise politique bien
qu’il ne soit pas tout à fait novice. En 2003 il avait brigué un siège au Sénat
de New-York, en vain. Il dispose d’une fortune personnelle importante acquise dans
le bâtiment après avoir réalisé de nombreux projets en association avec Trump.
Cohen
a grandi à Long Island. Son père chirurgien avait échappé à un camp de
concentration nazi avec sa famille durant la Seconde Guerre mondiale. Cohen est
sans pitié quand il s’agit de ruiner la carrière de tous ceux qui s’en prennent
à la vie privée de Trump. Il aime confirmer le lien étroit de Donald Trump avec
le peuple juif qui date déjà du père, Fred Trump, promoteur immobilier à
Brooklyn : «Rien ne me met plus en colère que lorsque des médias libéraux
honteux traitent Trump de raciste. En tant qu’enfant d'un survivant de la
Shoah, le racisme n'a jamais été autorisé dans notre maison et je ne
travaillerai jamais pour quelqu'un qui a ces tendances. Ne peut pas être
raciste quelqu’un qui a assisté à la Bar-Mitsva et la Bat-Mitzvah de mes
enfants. Trump traite toutes les personnes exactement de la même façon sans
distinction de race, de religion, de croyance ou de couleur».
Jared Kushner |
Jared
Kushner, 35 ans, a épousé Ivanka
Trump en 2006, et est devenu l'un des meilleurs acteurs de la politique
américaine. En tant que proche conseiller stratégique de Trump, il gère la
campagne et organise des réunions de haut niveau. C’est lui qui a rédigé le
discours de Trump à la réunion de l’AIPAC, le lobby pro-israélien. Kushner est
également le propriétaire et éditeur du New York Observer. Il a tenu à orienter
la campagne Trump vers une direction plus sobre et plus respectable et pour
cela il a été impliqué dans la décision de virer Corey Lewandowski, l’ancien
directeur de campagne de Trump.
Charles
Kushner, né en 1954, est le père de
Jared. En tant que grande sommité dans la promotion immobilière, il représente
le plus grand donateur de la campagne sénatoriale d'Hillary Clinton. C’est dire
s’il s’agit d’une bonne prise.
Stevin
Mnuchin est président national de la
campagne de financement de Trump. Ancien de
Goldman Sachs, il dirige son propre fonds d’investissement. Les
documents publics attestent que Mnuchin est un ancien donateur d’Obama et de
Clinton. Mais il ne semble pas avoir la
même réussite avec les Républicains car Trump a récolté seulement 3 millions de
dollars en mai par rapport aux 72 millions de Mitt Romney en juin 2012.
Adelson et Netanyahou |
Sheldon
Adelson, né en 1933 à Boston dans une
famille d’origine juive ukrainienne modeste, est un milliardaire américain,
promoteur immobilier et propriétaire de plusieurs casinos. Il a évolué
politiquement car il n’avait pas soutenu Trump dès le départ; il penchait
plutôt pour Marco Rubio. Il avait rejoint la campagne de Trump le 13 mai. Ce n’est pas un inconnu en Israël puisque
c’est un inconditionnel de Benjamin Netanyahou qu’il soutient grâce
au quotidien gratuit
Israël Hayom, devenu le second quotidien le plus lu du pays. Il a rompu
avec l’AIPAC en 2008 sur la question du soutien à la solution à deux États. Adelson
est un grand philanthrope pour les institutions israéliennes, distribuant ses
millions de dollars au Mémorial de la
Shoah de Yad Vashem à Jérusalem, et à l’université d’Herzliya,
Interdisciplinary Center Herzliya (IDC). Il constitue donc un relais important
vis-à-vis des Israéliens.
Donald Trump disposera de tous les pouvoirs puisque la Chambre des Représentants et le Sénat sont à majorité républicaine. La question est de savoir s'il en fera un bon usage. Plus près de nous, François Hollande, s'était trouvé dans la même position mais trop de pouvoir l'a mené à l'échec.
Les Israéliens frétillent de joie et en particulier l'extrême-droite qui se met à rêver. Naftali Bennett pense que : "La victoire de Trump offre à Israël la chance de renoncer immédiatement au projet de créer un Etat palestinien". Qui vivra, verra. Nul n'est à l'abri de bonne ou mauvaise surprise.
Les Israéliens frétillent de joie et en particulier l'extrême-droite qui se met à rêver. Naftali Bennett pense que : "La victoire de Trump offre à Israël la chance de renoncer immédiatement au projet de créer un Etat palestinien". Qui vivra, verra. Nul n'est à l'abri de bonne ou mauvaise surprise.
D. Trump n'avait-il pas annoncé qu'il transférerait l'ambassade des Etats-Unus à Jérusalem ?
RépondreSupprimerDonald Trump a aussi su capter, Ben Carson, ce neurochirurgien de renom qui professe que c'est Joseph, fils de Jacob et arrière-petit-fils d'Abraham qui a bâti les pyramides d'Egypte pour en faire des silos à grain. Merveilleux , non ?
RépondreSupprimerLe complot juif qui repart; ces juifs qui l'entouraient étaient des partenaires pour les affaires et l'objet d'un article dans le journal " MISHPAHA" en décembre dernier et le journaliste avait déjà prédit la réussite de Trump et aussi de celle d'Arieh Dhery en Israel. Clinton avait la machine démocrate, le soutien du president, les votes des femmes et des latinos, des grands journaux et des généreux donateurs des milieux d'affaires.. Dans un vote, l’indécis donne son bulletin a l'opposition en pensant n'apporter aucun changement au résultat final.
RépondreSupprimermon cher Jacques
RépondreSupprimerl'environnement juif othodoxe de Trump n'a pas empeché ce dernier spot publicitaire du parti républicain d'être diffusé. Dans ce spot, Trump lui-même s'en prenait au " pouvoir globalisé ", qui, disait-il, " dépossédait notre classe ouvrière " de sa richesse pour la déposer " dans les poches d'une poignée de grandes entreprises et de leurs entités politiques ". Et le spot montrait les visages inquiétants de trois grandes figures de la finance : le financier George Soros, le patron de Goldman Sachs, Lloyd Blankfein, et la présidente de la Réserve fédérale, Janet -Yellen.Ce spot contenaient d'évidents relents d'antisémitisme. Mais Trump est incontrolable!!!!!
Lu dans le journal Le Monde cette semaine. D'après un sondage à la sortie des urnes, 71 % des juifs ont voté Clinton soit plus que les latinos 65 % seulement !
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