AUX ÉTATS-UNIS, PROTÈGE-MOI
DE MES AMIS…
Par Jacques BENILLOUCHE
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En Europe et en Israël, nous avons une vision déformée de ce qui se passe dans le monde juif aux États-Unis. On pense que l’opinion publique est favorable à Israël mais on ignore que les campus universitaires abritent la fine fleur des étudiants antisionistes. Mais le plus grave est que de nombreux juifs se joignent à présent à cette vague qui critique de plus en plus Israël. Ce phénomène, qui prend une ampleur à laquelle on ne semble plus avoir prise, démontre s’il en était besoin la faiblesse de la communication politique israélienne (la Hasbara). Une dizaine de campus américains ne se cachent plus pour afficher une hostilité vis-à-vis d’Israël, en frisant souvent un antisémitisme virulent.
Rashid Khalidi |
L’Université de Columbia, située au nord de Manhattan à New York, abrite quelques-uns des professeurs antisémites les plus connus tels que Rashid Khalidi et Joseph Massad, accusés de harceler les étudiants juifs à plusieurs reprises. Elle s’est distinguée en invitant à l’université le fondateur du BDS, Omar Barghouti, ainsi que le professeur antisémite Steven Salaita. On ne compte plus les manifestations anti-israéliennes.
Steven Salaita |
Le 10 mars 2014 fut organisée la semaine contre l’apartheid israélien, le 11 septembre 2014 une manifestation pour le soutien à Gaza ; En novembre 2014 un théâtre de rue simulait les contrôles de sécurité organisés par les forces de police israéliennes. Le 19 novembre 2014, le président avait invité Steven Salaita qui a fait de nombreuses déclarations fanatiques au sujet des Juifs et des Israéliens. Le 2 décembre 2014 le président Omar Barghouti a parlé face à une salle comble, durant deux heures, en étant pour la première fois de l’histoire de l’Université interrompu par des salves d’applaudissements.
Tour de l'université de Cornell |
L’université de Cornell est située dans la petite ville d'Ithaca dans l’État de New York et dans la ville de New-York, et dispose également d’une annexe au Qatar. Le groupe SJP (Students for Justice in Palestine) a utilisé la force ouverte pour intimider les étudiants juifs et pro-israéliens sur le campus en érigeant des dizaines de pancartes anti-israéliennes et en perturbant l’organisation de réunions d’étudiants en procédant au simulacre de check-points israéliens.
À partir d’avril 2014, de nombreuses manifestations BDS ont été organisées avec une volonté systématique de perturber toutes les réunions d’étudiants. Le 29 août 2014, ils ont organisé la lecture publique avec haut-parleurs, des noms des victimes de l’opération «bordure de protection» à Gaza. En automne 2014, des militants anti-israéliens ont poursuivi des étudiants en les intimidants pour renoncer à afficher leurs posters. Enfin, le 19 novembre 2014, un étudiant pro-israélien a été agressé dans le campus.
Campus George Mason |
L’université George Mason, située en Virginie, comprend des étudiants très actifs au SJP et au BDS. Ils militent pour une solution à un seul État avec à la clef la disparition de l’État d’Israël. Des manifestations anti israéliennes sont sponsorisées par le département Moyen-Orient. Mais ce qui est le plus troublant est le parrainage d’organismes arabes : the Trans-Arab Research Institute, the Arab Studies Institute, New Century College, and Global Programs.
Miko Peled |
Le 25 mars 2014 Miko Peled, fils du général Mattityahu Peled, qui s’est radicalisé à l’extrême gauche, y a fait une intervention remarquée dans le campus. Peled a décrit le gouvernement israélien comme «un régime radical sioniste», et Israël comme une nation où «la moitié de la population vit dans ce qu'il pense être une démocratie occidentale tout en gardant l'autre moitié emprisonnée par un appareil de défense impitoyable qui est de plus en plus violent chaque jour». Le 7 avril 2014, le président de l’université a invité l’activiste anti-israélien Ali Abunimah qui a accusé Israël de «pratiquer un nettoyage ethnique et une tentative de génocide». Le 20 octobre 2014, un séminaire de discussion a été organisé pour déterminer si Israël a commis des crimes de guerre le rendant passible du tribunal international.
La liste est longue de toutes les universités américaines qui permettent à une frange extrémiste de dominer trop de discours et d’agir en violation des règles internes. Il en est ainsi de l’université Loyola de Chicago, de la Portland State University, de la San Diego State University, de la San Francisco State University, de la Temple University, de University of California Los Angeles et du Vassar College. Ils diffusent des films anti-israéliens qui diabolisent l’armée israélienne, tout en mettant en évidence les mauvais traitements infligés aux Palestiniens.
La nouveauté dans ces campus réside dans le virage anti israélien de nombreux Juifs américains. L’exemple révélateur est celui du professeur de l’Université Berkeley qui a toujours été très proche d’Israël. Daniel Boyarin, philosophe est un spécialiste de l'histoire des religions. Il se définit lui-même comme un juif orthodoxe. Depuis 1990, il enseigne la culture du Talmud au département d'études proche-orientales de l'Université de Californie à Berkeley. À l’âge de vingt ans, il avait passé son année junior à l’université hébraïque de Jérusalem avant d’entrer à l’Université américaine. C’est là qu’il avait été tardivement piqué par le virus du Talmud.
À 70 ans il est une autorité de classe mondiale dans son domaine, à la fois dans son pays mais aussi en Israël. Pratiquant la religion avec ferveur, il est devenu un savant antisioniste. Malgré sa réputation académique internationale, il reste boudé par sa communauté de Berkeley car c’est un partisan de Jewish Voice For Peace et du mouvement anti israélien BDS (boycott, désinvestissement et de sanctions). Il se considère ouvertement anti sioniste : «Il a fallu des années avant que je puisse prononcer les mots antisioniste. J’avais peur que ma langue ne se colle à ma bouche».
Et pourtant Boyarin est issu d’une famille lituanienne historique (Litvaks) et a milité au mouvement de jeunesse sioniste Dror Habonim. Il a rencontré sa femme israélienne à Jérusalem. Après ses études, il est entré au Jewish Theological Seminary of America à New York, l'école rabbinique du mouvement conservateur, sans pour autant devenir rabbin mais pour sa simple culture. Depuis il a alterné ses séjours en Israël et aux États-Unis. Il a à nouveau rejoint la faculté de l'Université Ben Gourion, puis l'Université Bar-Ilan. Le déclic de son virage s’est passé en décembre 1987 à l’occasion de la première intifada qui mit en évidence sa désillusion avec le sionisme : «Quand j'ai entendu Yitzhak Rabin dire qu’il fallait briser les bras et les jambes, j’ai pensé que ce projet était pourri». Il devint alors actif dans l’organisation anti sioniste Matzpen et l’ONG Alternative Information Center, créée pour diffuser des informations sur le conflit. Et pourtant ses deux enfants ont terminé leur service militaire en Israël.
Dans un essai paru en 2003, il poussa le bouchon loin en écrivant : «Il a été dit par beaucoup de Chrétiens que le christianisme est mort à Auschwitz, Treblinka et Sobibor. Je crains - à Dieu ne plaise - que mon judaïsme puisse mourir à Naplouse, Daheishe, Beteen (Beth El) et al-Khalil (Hébron)». Boyarin bénéficie d’une large reconnaissance dans le monde savant non-juif. Il est l'un, sinon le seul, érudit des études juives dont les étudiants en littérature ont entendu parler. Mais ce savant de renommé mondiale est à peine connu dans sa communauté en raison de ses positions anti israéliennes : «Je suis très marginal en termes de la vie communautaire juive. D'une certaine façon ça ne me dérange pas parce que je l'ai choisi, mais d'une autre manière, il n’est pas facile d'être aussi attaché aux Juifs et à la vie juive et à ce qu'on appelle le judaïsme, et d'être aussi sans lien avec la communauté que je suis ».
Des personnalités aussi importantes, disposant d’un passé juif sans reproches, arrivent à attirer à eux de nombreux Juifs et non-Juifs. Elles ont une influence déterminante , a fortiori quand elles se disent orthodoxes ce qui les rend inattaquables. Quand on pense que la France est critiquée pour s'être laissée "envahir" par les musulmans, voire par les islamistes, et que l'on confie la formation des jeunes américains aux meilleurs universités dont une dizaine au moins est noyautée par des d'extrémistes, on peut douter du sérieux de cette critique à l'égard de la France. Les Etats-Unis devraient d'abord balayer devant leur porte.
Les autorités américaines laissent faire en raison du sacro-saint principe de la démocratie, étant entendu aussi que les universités sont privées. Mais elles ne se rendent pas compte qu’elles deviennent le terreau de la mouvance islamique sous l’alibi de la défense des Palestiniens. La Hasbara israélienne est prise en défaut, certainement parce que l’on a trop négligé le terrain américain que l’on croyait conquis aux thèses israéliennes. Les temps changent, la Hasbara doit revoir ses fondamentaux.
Les autorités américaines laissent faire en raison du sacro-saint principe de la démocratie, étant entendu aussi que les universités sont privées. Mais elles ne se rendent pas compte qu’elles deviennent le terreau de la mouvance islamique sous l’alibi de la défense des Palestiniens. La Hasbara israélienne est prise en défaut, certainement parce que l’on a trop négligé le terrain américain que l’on croyait conquis aux thèses israéliennes. Les temps changent, la Hasbara doit revoir ses fondamentaux.
Malheureusement la Hasbara d'Israel continue d'etre mediocre. Cela a toujours ete le probleme. On etait tellement surs de tenir la verite, que l'on n'a jamais pris au serieux la propagande Arabe et Palestiniene.. Maintenant, le seul qui, vraiment fait quelque chose, c'est Yair Lapid.
RépondreSupprimerTres bon article. Quelques points importants en plus:
RépondreSupprimer1) JStreet et JVP (Jewish Voice for Peace) sont les deux organisations qui sont devenues de plus en plus importantes et actives sur les campus ces 5 dernieres annees. Elles rejettent le qualificatif d'anti-sioniste mais elles le sont dans les faits
2) Elles attirent les jeunes juifs non sensibilises au probleme Israelo-Palestinien (la grande majorite) en parlant de justice sociale, d'egalite, de droits de l'homme et meme d'amour. Qui serait contre? Ce sont de jeunes hipsters ou bobos, "qui font cool" et qui alors exercent un fort pouvoir d'attraction.
Regardez les photos de militants sur leur site; trop cool les looks. Ca attire beaucoup cette attitude branchee.
https://jewishvoiceforpeace.org/
https://jewishvoiceforpeace.org/people/
3) C'est la meme jeunesse qui est derriere Bernie Sanders, et qui rejette les lobbys en tout genre (dont AIPAC fait partie). D'ailleurs Sanders n'est pas alle a AIPAC pour cela. rejet des lobbys en bloc.
4) Derriere ce discours cool sur la justice sociale se cache une ideologie radicalement anti-sioniste, par exemple: retrait de Jerusalem Est dans sa totalite, droit au retour des refugies palestiniens, suspension de l'aide americaine a Israel, et BDS bien entendu. C'est sur le site de JVP.
5) Ces deux organisations JStreet et JVP ont noyautees les campus de la cote ouest (Californie) traditionellement tres liberaux. Les organisations juives sionistes type AIPAC et NORDPAC sont encore bien influentes sur la cote Est, mais doivent maintenant se battre plus seulement contre des organisations arabes mais aussi contre des groupes juifs anti-sionistes tres organises, et qui en plus font cool.
Michael depuis New-York
Beaucoup de Juifs sont mal à l'aise avec des accusations, d'autres, qui découvrent un antisémitisme violent et injuste, voient dans Israël la justification du sionisme ou retrouvent leur identité laïque ou religieuse. Ces Juifs antisionistes ne restent que des Juifs utilisés par les propagandistes
RépondreSupprimerLa situation est très dangereuse à moyen terme. Israël est obligé de veiller à son image et à celle de son armée. Ce qu'il est commun d'appeler la fachosphére juive joue contre son camp et menace la sécurité d'Israël bien plus qu'un palestinien fanatisé
RépondreSupprimerCe n'est pas d'aujourd'hui que la communication est mauvaise,mais ce n'est pas une raison d'attaquer en permanence l'état,car enfin les israéliens ont voter et pas forcément pour cette gauche-là.
RépondreSupprimerLa question à ce poser c'est pourquoi les juifs de gauche sont à ce point à coté de la plaque,c'est la même chose en France.
L'ennemi c'est quand-même le monde Arabo-Musulman et ce n'est pas parce que le père d'une personne est un ancien général que le fils a raison.
Il me semble que les U.S.A sont en partie responsable de tout ce cirque.