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vendredi 6 novembre 2015

Les djihadistes visent le tourisme égyptien


LES DJIHADISTES VISENT LE TOURISME ÉGYPTIEN
Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps


Les boîtes noires n’ont pas encore parlé mais les thèses sur les raisons de l’explosion en vol de l’avion russe divergent. Le Caire parce que son tourisme est en jeu et Moscou parce que sa réputation est écornée ne veulent pas entendre parler d’attentat. Il sera d’ailleurs difficile d’apporter des preuves irréfutables sur les causes réelles du crash. 


Charm el-Cheikh

Mais plusieurs pays ont déjà pris des mesures préventives en «déconseillant», pour Paris, de se rendre à  Charm el-Cheikh. Air France et Lufthansa ont décidé d’interdire à leurs avions de survoler le Sinaï. Aucune certitude ne peut être avancée sur l’implication de l’État islamique dans la désintégration en vol de l’avion russe. Une certitude cependant, l’industrie touristique égyptienne, déjà mal en point, risque de pâtir des conséquences.
Il ne s’agit certainement pas d’une coïncidence, mais les terroristes djihadistes ont frappé au moment où le président Al-Sissi préparait son importante visite d’État à Londres, la première depuis son accession au pouvoir. Son arrivée n’a pas dissuadé le premier ministre britannique d’interdire à ses avions civils de survoler la station balnéaire du Sinaï, Charm-el-Cheikh. Il est difficile pour le Maréchal d’attester la thèse d’un attentat qui mettrait en doute les capacités de son régime à s’opposer au terrorisme. Il tient à garder ses trois millions de touristes, en majorité russes et ukrainiens, qui ont visité le sud-Sinaï l’an dernier alors que le tourisme occidental est à l’agonie.
Al-Sissi au Sinaï

Mais l’Égypte ne peut faire illusion ; en acceptant la participation de la Grande-Bretagne dans le contrôle des aéroports égyptiens, elle reconnaît de fait, sinon la thèse de l’attentat, au moins l’existence de failles dans le système de sécurité. D’ailleurs l’un des principaux responsables de l’aéroport de Charm-el-Cheikh a été démis de ses fonctions. La position d’Al-Sissi s’explique car il ne peut se déjuger alors qu’en tournée en tenue militaire, cet été au Sinaï, il avait affirmé : «Dire que le Sinaï est sous contrôle, ce n’est pas assez. La situation est complétement et absolument stable».

En fait, cet attentat pourrait durcir encore plus la politique du régime égyptien à l’égard des djihadistes qui ont fait du nord-Sinaï leur sanctuaire. La région est devenue une zone de non-droit en raison de la structure du terrain totalement inaccessible par voie terrestre. L’Égypte a définitivement fermé la frontière avec Gaza en établissant un no man’s land après avoir détruit des habitations et noyé à l’eau de mer tous les tunnels qui n’avaient pas été détruits. Gaza, où prospère l’organisation du djihad islamique, était un soutien logistique pour les terroristes qui ont d‘ailleurs qualifié la région de province du «califat auto-proclamé». 
Wilayat Sinay

Les premières victimes sont les Bédouins du Sinaï qui vivaient de la contrebande des produits alimentaires, du pétrole et surtout des armes en provenance des arsenaux de Libye. Par déception plutôt que par conviction, ils ont grossi les rangs du groupe djihadiste Wilayat Sayna (Province du Sinaï) dont les miliciens comptent près de 1.000 hommes dans leurs rangs. Une grande partie d’entre eux ne sont pas des locaux mais proviennent des Frères musulmans et même de pays étrangers comme la Syrie et l’Irak.

L’explosion en vol de l’avion a réussi à instiller progressivement une psychose en Égypte qui se répand auprès des touristes. L’audace des terroristes commence à inquiéter le régime. Une voiture piégée ciblant le club d'un policier dans la ville égyptienne d'El Arish a tué six personnes et blessé dix. Le groupe Province du Sinaï, filiale de Daesh, a revendiqué la responsabilité de l'attaque, décrite comme un attentat suicide. Il n’en est pas à son premier exploit puisqu’il a tué des centaines de soldats et de policiers depuis que l'armée a renversé le président islamiste Mohamed Morsi en 2013. Le président Abdel Fattah al-Sissi a reconnu que les militants islamistes représentaient une menace grave pour le pays arabe le plus peuplé parce qu’ils ont décidé de frapper la partie la plus vulnérable de l’économie égyptienne, le tourisme générant des entrées de millions de dollars et de roubles dans les caisses de l’État.
Gaza inondé


L’Égypte n’as pas d’autre solution que de durcir les mesures à l’égard des djihadistes, et du même coup contre les Frères musulmans considérés comme leurs alliés de fait. Le retour d’Al-Sissi de sa visite à Londres sera décisif. Pour l’instant les terroristes, qui se rapprochent dangereusement de la frontière israélienne, n’ont pas planifié dans leur stratégie de s’en prendre directement à l’État juif. Ils préfèrent s’attaquer aux pays faibles. Ils savent aussi qu’en cas de provocation, ils risquent de subir une riposte violente de Tsahal. Pour l’instant la fermeture hermétique entre Gaza et l’Égypte satisfait les Israéliens qui peuvent s’attendre à moins de circulation d’armes avec la frontière. Mais pour l’Égypte une longue période d’incertitude. Elle ne pourra se résoudre que dans le sang tandis que les touristes choisiront des cieux plus cléments et moins dangereux.  En effet, à défaut de vaincre par les armes, les djihadistes veulent obtenir une victoire en étouffant l'économie égyptienne. 

2 commentaires:

  1. le tourisme egyptien n est pas le premier ni le dernier objectif des djidahistes.

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  2. que l’organisation du djihad islamique de la bande de gaza sert de logistique aux actions menées dans le Sinaï, cela semble une bonne hypothèse. l’Égypte, par ses actions de protection, de sa frontière avec Gaza, commence à avoir des résultats, complique la circulation des hommes et des armes. Elle en prendra de nouvelles qui mettront à terre les organisations terroristes du Sinaï.
    le Président Sissi va développer ces mesures déjà nombreuses de lutte contre le terrorisme. Al-Sissi a des alliés qui peuvent l'aider dans les échanges de savoir-faire et de technologies sur le plan de la sécurité, lui et ses équipes ne sont pas seuls à vouloir que tous les touristes du monde entier, viennent, an avion, en car, en bateau, en taxi, à pieds, visiter la délicieuse et intelligente Égypte.

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