Benjamin Netanyahou serrant la main de Yariv Levin |
Atmosphère
«Que se passe-t-il en Israël ? Un putsch
“démocratique” ? Si un extra-terrestre débarquait en Israël
ces jours-ci, il aurait bien du mal à comprendre ce qui se passe. Dans la rue,
tout est calme et tranquille (si on néglige les actes de terreur palestiniens
qui font partie du paysage) au point que deux grandes manifestations ont pu se
dérouler sans encombre. Ce calme ambiant contraste cependant avec certains
discours dans lesquels des mots définitifs sont prononcés : dictature,
fascisme, peloton d’exécution, fin de la démocratie, du sang dans les rues,
pogrom…. L’adversaire est toujours portraituré dans les traits du fascisme. On
a pu voir ainsi dans ces manifestations le portait de Netanyahou et du ministre
de la Justice, Yariv Levin, en Hitler… Ce sont en effet des personnalités
considérables : des généraux, d’anciens chefs d’Etat major, une pléiade de
militaires qui se bousculent au micro : Moshe Bogie Ya’alon, Gadi
Eizenkot, Benny Gantz, Ehud Barak, Yaïr Golan, tous à la retraite cependant.
Ils appellent explicitement toutes les catégories de la population (y compris
les lycéens, les conscrits…), à la désobéissance civile, à la
sédition et à la rébellion contre l’Etat…Cet aspect de la crise ouvre sur une
autre perspective. Il faut connaître un peu d’histoire pour y accéder en se
rappelant qu’à ses origines l’Etat d’Israël, un Etat socialiste, était aux
mains du Parti travailliste et écartait jalousement du pouvoir l’autre camp,
l’ennemi de droite par excellence, les Révisionnistes, jusqu’au jour où la
venue de Begin au pouvoir renversa cette situation. … Si le pouvoir politique
avait changé de mains, majoritaire à la Knesset, en réalité les travaillistes,
l’Israël de gauche, des kibboutz, des élites conservèrent le leur dans la
culture, l’économie, l’université, la justice, les sphères d’’influence etc. … Ce
concept d’hégémonie nous conduit dans les parages d’un concept plus
contemporain, celui de Deep State qui nous aide à comprendre sociologiquement
la réalité de la configuration de la crise. Cette expression américaine désigne
un Etat dans l’Etat, ou plus exactement la collusion entre plusieurs sphères de
l’Etat afin de détenir les rennes de sa conduite, dans ses articulations les
plus importantes, en l’occurrence la Cour Suprême, et plus largement la
justice, la police, les media, cette collusion ayant pour finalité de coiffer
la Knesset et le gouvernement par des moyens réguliers mais détournés de leur
fonction légitime exacte, afin de faire passer leurs décisions politiques. [1]
Yariv Levin et Pierre Lurçat 2012 |
Une bonne explication est aussi donnée par Pierre Lurçat qui est favorable à la réforme. «En marge de la réforme judiciaire : La Cour suprême et l’identité d’Israël. Deux éléments sont essentiels à la compréhension du débat juridico-politique actuel autour de la réforme judiciaire en Israël :
– Le premier est le fait
que le système tel qu’il existe aujourd’hui repose sur une «monstruosité»
juridique (au sens d’une réalité contre-nature), à savoir une Cour suprême
exerçant le contrôle constitutionnel le plus activiste et le plus poussé du
monde occidental, en l’absence de Constitution véritable. Sous la houlette du
juge Barak, la Cour suprême a en effet accaparé les pouvoirs de la Cour de
cassation, du Conseil d’État, de la Cour des Comptes et du Conseil
constitutionnel…
– Le second élément est le
fait que la «Révolution constitutionnelle» menée par le juge Barak dans les
années 1990 a rompu le fragile statu quo instauré par David Ben Gourion en
1948, en abolissant la frontière entre droit et politique, entre décisions
judiciaires et politiques et entre les normes juridiques acceptées de tous et
les valeurs sociétales, sur lesquelles il n’existe pas de consensus en Israël.
C’est ce fragile statu quo ante que la réforme Levin s’efforce de rétablir
aujourd’hui. …Dans l’esprit des pères fondateurs du sionisme politique et des
premiers dirigeants de l’État d’Israël – au premier rang desquels David Ben
Gourion – le caractère juif de l’État n’était en effet nullement contradictoire
avec son caractère démocratique. C’est dans cet esprit qu’il a élaboré le fragile
équilibre sur lequel ont reposé l’État et ses institutions après 1948. Ben
Gourion a fait preuve à cet égard d’une volonté de compromis inhabituelle,
qu’il justifie ainsi dans ses écrits :«Sauver la nation et préserver son
indépendance et sa sécurité prime sur tout idéal religieux ou antireligieux. Il
est nécessaire, dans cette période où nous posons les fondations de l’État, que
des hommes obéissant à des préoccupations et à des principes différents
travaillent ensemble… Nous devons tous faire montre d’un sage esprit de
compromis sur tous les problèmes économiques, religieux, politiques et
constitutionnels qui peuvent supporter d’être différé ». [2]
Des Israéliens déployant une copie de la Déclaration d'Indépendance lors d'une manifestation à Tel Aviv le 18 février 2023 |
Pourtant l’opposition observe que la Déclaration d'Indépendance promet que l’État d’Israël «assurera une complète égalité de droits sociaux et politiques à tous ses habitants sans distinction de religion, de race ou de sexe ; il garantira la liberté de religion, de conscience, de langue, d’éducation et de culture…»
Yuval Noah Harari |
Manifs : Comme un printemps arabe
Manifestation à Jérusalem |
. Les Israéliens manifestent en nombre. Des membres de la classe moyenne qui demeurait à l’écart de toute action politique y participent. Des soldats de réserve, des anciens combattants, des étudiants et des enseignants ainsi que des activistes. De violentes manifestations se sont déroulées à Tel Aviv le 1er mars. Plusieurs rues et voies de circulation ont été bloquées, la police a utilisé des canons à eau et des grenades assourdissantes.
Blocage de l'autoroute Tel Aviv-Jérusalem |
Vers un printemps israélien. A
l’instar des printemps arabes, comme pour (se) prouver qu’il fait bien partie
de la région, l’État d’Israël semble suivre l’exemple de ces mouvements
populistes qui ont cru aux vertus de la rue et ont ruiné plusieurs pays arabes.
Des slogans comme «Free Israël» à
l’image du «Free Palestine», révolution, résistance montrent bien cette
proximité.
Avec aussi les slogans contre la «théocratie, le
fascisme» et les bannières comme «Ministre du crime» ou «Marre
des corrompus», alors qu'un mouvement appelle à abattre «les murs de la
dictature». Les manifestants scandent des slogans tels que «Israël n'est
pas une dictature!» ou encore «Démocratie égale dialogue». «L'État est
en danger». Le 6 mars un évènement très grave s’est produit : plusieurs dizaines de
pilotes de l'armée de l'air israélienne ont menacé de ne pas participer à un
entraînement pour protester contre le projet gouvernemental de réforme de la
justice. Ils ont été condamnés par l’ensemble de la classe politique,
Un BDS israélien
Le
projet de réforme a aussi entraîné des critiques sévères dans le secteur des
affaires israélien, mais aussi à l’étranger. Des professionnels des
technologies, des gestionnaires de fonds et des institutions financières ont
averti qu’il pourrait entraîner une fuite des cerveaux, le retrait des fonds
placés au sein de l’État juif et une baisse des investissements internationaux.
Plus d'un
tiers des Israéliens craignent la possibilité d'une guerre civile. 41% des
Israéliens soutiennent la réforme tandis que 44% s'y opposent. Et bien que 84%
des sondés pensent que le système judiciaire a besoin d'un changement, seuls
22% soutiennent la réforme dans son ensemble.
L’esprit de conciliation finira par l’emporter
Le président Isaac Herzog |
Pour le président Isaac Herzog : «La démocratie israélienne est ancienne et stable. Le monde des valeurs de la société israélienne n'est pas facile à remettre en question». Herzog estime qu’un compromis rapide sur la réforme judiciaire est possible. Cet optimisme est justifié. Le dernier compromis autour de la réforme judiciaire proposé par Daniel Friedman, ancien ministre de la Justice, Youval Elbashan, professeur en droit proche de Yaïr Lapid, Giora Eiland, général de réserve et Giora Yaron, personnalité du monde high-tech indique que le bon sens l’emportera.
[1] © Shmuel Trigano http://www.shmuel-trigano.fr 28 1 23
[2] Pierre Lurçat, Vu de Jérusalem [3 février 2023]
Ce qui est symptomatique, c'est qu'on ne sait PAS EXACTEMENT quel sera le contenu de cette réforme. Mais cela m'empêche pas l'expression outragée des passions et des débordements.
RépondreSupprimerPar ailleurs, la comparaison avec le printemps arabe n'est pas fondée.
Car celle-ci a débuté par le suicide (immolation par le feu) d'un pauvre marchand de quatre saisons dans une ville tunisienne. Or jusqu'à présent, aucun manifestant ne s'est jeté du haut d'un immeuble de Tel-Aviv pour acter son opposition à la réforme.
C’est exact pour la Tunisie. Mais il n’y a pas eu de suicide déclencheur en Égypte,en Syrie en Lybie où au Liban.
SupprimerD’une façon générale c’est la croyance que des mouvements de foule, l’usage de la violence,la haine, la répétition de slogans, l’anarchie sont des solutions. Et cela se retrouve dans les deux cas.
Le danger est aggravé pour Israël avec le risque d’un conflit avec l’Iran.
Il faut ecouter les officiers supérieurs de Tsahal. Il y va de la sécurité d'Israël. Il y aura un compromis je reste optimiste.
RépondreSupprimerLe pouvoir de la rue, qui veut remplacer une élection democratique, ressemble à celui de ceux qui avaient attaqué le Capitol de Washington. Après les printemps arabes, tous ces pays continuent à exister; Israël divisé prend des risques
RépondreSupprimerIl faut savoir que la plupart des manifestants sont cux qui n'ont pas participe aux dernieres elections. Si ils avait vote, on n'en serait pas la.
RépondreSupprimerL'actuel reforme du systeme judiciaire est mal fait et introduit par la porte arriere des enormites, par exemple, la loi sur les "dons" aux hommes politiques (ce qui permettrait au pi gre national de ne pas rembourser un pret de 250,000 dollars. Une autre loi qui fait probleme, c'est que la reforme proposee ne touche pas seulement la Cour Supreme, mais toutes les institutions judiciaires, notamment le Tribunal des Prudhommes debouchant sur l'arbitraire de l'emploi et des salaires. Par contre, omn ne touche pas aux Cours judiciaires des religieux.
En etablissant cette reforme, Yarin Levine pourra facilement ecarter Bibi de sa fonction et prendre sa place. Yarin Levine fait partie de la"Famille Combattantre", tous les anciens revisionnistes et combattants de l'Etsel et du Lehi. Yarin Levine, contrairement a beaucoup d'autres est reste fige.
Le Ministre de la Securite Interieure pourra transformer ka poliice en une milice privee et ouvrir les portes a toutes les violences dont reve le Ministre.
L'appel a la desobeissance militaire a ete supprime. Cela n'empechera pas les actuels ministres a faire du menage dans l'armee, notamment a virer tous les kibboutznikkim.
Enfin on peut s'attendre a une serie de decrets inspires par la Loi juive. Bref, Irael file un mauvais coton.