Bombardement contre civils |
Alors que le pays en guerre n’est
pas membre de l’Otan, alors que plusieurs pays dont l’Albanie, la Serbie, la
Bosnie attendent depuis plusieurs années la possibilité d’adhérer, la
présidente de la commission, Ursula von der Leyen, et le président du conseil
européen se sont rendu à Kiev pour discuter de l’adhésion à l’UE ou de son «adhésion
à certains programmes».
Enfin,
l’UE fait savoir qu’elle prépare des sanctions supplémentaires à dévoiler le 24
février, date de l’invasion en Ukraine. La surenchère se mêle aux symboles.
Décidément, la guerre de l’information bat son plein. Force est de reconnaître
que l’UE a bien résisté à la pandémie globalement. La France avec le quoi
qu’il en coute notamment, mais au prix d’un endettement chaque jour plus
lourd, lié à l’augmentation des taux, lui-même en lien avec la crise
énergétique, conséquence du conflit, la fatigue des populations en Europe se
fait sentir. Nul ne connaît actuellement toutes les conséquences des mesures
prises et étendues contre la Russie qui continueront à impacter l’UE.
Où en sommes-nous ?
Convoi militaire russe pris pour cible |
Poutine n’a pas vraiment atteint
ses objectifs initiaux. Il n’a pas pris le contrôle de l’Ukraine. Avec le
soutien massif occidental, le pays résiste, et on passe d’offensives en contre
offensives, avec un prix humain élevé des deux côtés, qu’on évite de mettre en
avant. On parle de plusieurs centaines de victimes quotidiennes, tués ou
blessés. On cite volontiers les pertes russes, beaucoup moins celles de
l’Ukraine pourtant de même importance. Sur le plan militaire, les Occidentaux
n’hésitent pas à annoncer une décision puis son contraire. L’Amérique ne
fournira pas ses chars, affirmait le président Américain. Depuis on en sait
qu’on en fournira peut-être une trentaine… dans quelques mois. Les chars
doivent servir à la défense, puis à l’offensive. Finalement le chancelier
allemand vient de le déclarer : ils ne serviront qu’à la défensive.
C’est juré. On connaît la formule.
Les raisons de l’optimisme
Avec le soutien massif financier,
militaire et l’engagement actuel de l’Occident, États Unis en tête, l’Ukraine
fait preuve d’une résilience remarquable.
La Suède et la Finlande sortent de leur neutralité et veulent rejoindre
l’Otan, qui a renforcé ses positions depuis plusieurs mois. On évite d’utiliser
le concept d’encerclement de la Russie. C’est pourtant la réalité, tandis que
la Chine, grand partenaire de la Russie, reste très prudente.
s |
Victimes civiles |
Les mauvaises nouvelles
La Russie ne donne aucun signe
susceptible de mettre fin au conflit. Il en va de même de l’Ukraine. Il
convient d’y ajouter l’Occident qui veut battre Moscou sur le champ de
bataille. Sans cynisme, on doit constater que les trois acteurs prétendent
vouloir aller jusqu’au bout et obtenir une victoire militaire. Le chef d’État-major russe a annoncé la
préparation d’une contre-offensive de printemps après avoir recruté une
nouvelle tranche de 200.000 hommes. Le Tsar du Kremlin semble soutenir l’idée
que les gouvernements occidentaux et leurs sociétés se lasseront d’attendre la
fin de la guerre, que leurs opinions publiques n’accepteront pas des sacrifices
croissants et que leurs économies ne pourront plus assumer les conséquences. Il
pense qu’il a le temps pour lui. Depuis, l’Iran devient comme l’UE et les États
Unis co-belligérante avec ses drones.
Du point de vue ukrainien, la
montée progressive de sa puissance de feu est considérée comme un lourd
handicap. C’est ce qui explique la demande pressante du président Zelensky de
recevoir plus d’équipements lourds, plus offensifs, plus performants, plus de
munitions, de l’aviation, des missiles longue portée, notamment. L’Ouest
y répond mais très progressivement car aucun des pays européens n’était prêt à
envisager un conflit de haute intensité. La France qui dispose d’une force
armée réelle, pratique en opérations de projection (voir l’Afrique) de courte
durée et ne pourrait soutenir un tel conflit plus de trois semaines, dixit ses
responsables ouvertement. La dissuasion était, jusque-là, la réponse.
Préparation de tombes à l'extérieur de Kiev |
Sur le terrain
Le nombre de chars annoncé reste très
inférieur aux besoins réels de l'armée ukrainienne pour repousser les
occupants. Les chars Abrams prendront plusieurs mois pour être construits,
entraînés et déployés. Sauf changement radical de stratégie, on se dirige
vers l’enlisement du conflit. De fait, l’augmentation progressive de
l'assistance militaire et économique ne fera probablement que prolonger
indéfiniment la guerre. C’est une très mauvaise perspective pour l’Ukraine
et pour les pays européens en particulier. L’Amérique restant loin du conflit,
sauf pour ses fournitures et moyens financiers. On reste dans l’ambiguïté.
Les options
Celle que désire le président
ukrainien, un Big Bang militaire. Les États-Unis et ses alliés de l'OTAN fourniraient dès maintenant une aide
massive en armes beaucoup plus performantes, permettant à l’Ukraine de
passer à l’offensive plutôt que de camper sur ses positions et de subir les
assauts répétés russes, en particulier dans l’Est du pays. En tête de liste
devrait figurer le système de missiles ATACMS d’une portée de l’ordre de 300
kms et permettrait ainsi aux forces ukrainiennes d'attaquer les aérodromes
et les sites de munitions russes en Crimée et ailleurs, actuellement hors de
portée et qui offrent un sanctuaire aux forces russes. Ces armes, y
compris des bombes de petit diamètre lancée au sol, pourraient changer la donne
dans une offensive de printemps. L'armée ukrainienne a également besoin de
capacités aériennes offensives beaucoup plus performantes, notamment des avions
de combat MiG-29 de fabrication soviétique et des drones avancés tels que les
modèles américains Gray Eagle et Reaper. Le président Biden a déjà exclu de
livrer des F16. Mais rien ne dit que les pays européens ne seront pas forcés de
fournir des avions.
On mesure
l’ambiguïté du passage d’armes défensives à des armes offensives. De plus les
naïfs pensent qu’en échange de la fourniture de ces armes, le président
ukrainien pourrait signer un accord juridiquement contraignant (?)
interdisant d'utiliser ces armes pour frapper des cibles à l'intérieur de la
Russie. Là où cette notion devient encore plus ambiguë c’est le fait que la
Crimée et le Donbass (en partie) sont considérés comme territoire russe. Ce que
personne n’ignore. Au passage, même si cela est déjà tombé dans les oubliettes
de l’histoire, l’Ukraine avait pris des engagements dans le cadre du format de
Minsk, dont l’organisation d’élections dans l’Est du pays. Elle n’a jamais
donné suite. On constate qu’il s’agit de fournitures par paliers, chaque pays
contribuant à son tour, à son heure et avec ses moyens à l’acheminement de
telles armes ou en partie. On étalerait donc dans le temps des fournitures
disparates qui demanderont à nouveau des délais pour être mises en œuvre. Ce
qui serait tout à fait contraire à l’option Big Bang formulée par l’Ukraine. De
sorte qu’on peut légitimement s’interroger sur ce processus de livraisons-à-vue
progressif qui prolongera la guerre d’autant au profit de la Russie qui
malgré ses failles sera à l’offensive, après avoir appris de ses revers dans
l’année écoulée. Certains exégètes soutiennent que le président russe n’a plus
sa raison, mais qu’on peut exclure l’utilisation de bombes sales. On a oublié
Hiroshima.
Quelle suite ?
Alors se
pose plusieurs questions auxquelles aucun des pays co-belligérants ne veut ou
ne peut répondre. Que se passera-t-il lorsqu’il y aura une bavure sérieuse
provoquée par des armes occidentales ? Lorsqu’il y aura des militaires ou des
instructeurs occidentaux sur le front tués, blessés, ou capturés ? Les
sociétés occidentales sont confrontées à de multiples problèmes sociaux et
économiques qui mettent tous les gouvernements en difficulté. L’Allemagne
reparle ces jours-ci d’une conscription civile, voire militaire demain. C’est
inédit. Dans tous les échanges actuelles les mots paix et négociations ou
compromis sont bannis du vocabulaire diplomatique. Honte à celui qui les
utilise. Pourtant in fine il faudra bien
les réintégrer avec toutes les conséquences. Comme l’affirmait le cardinal de
Retz, on ne sortira de l’ambiguïté qu’à nos dépens. Qui en connaît aujourd’hui
le prix ?
Si les occidentaux n’avaient pas aidé l’Ukraine par les moyens que l’on connaît, rien ne dit qu’après annexion de ce pays la Russie n’aurait pas poursuivi son expansion aux états limitrophes. Valait-il mieux refaire les accords de Munich en observant d’un œil passif les ardeurs conquérantes du Maître de Moscou?
RépondreSupprimerSi les sanctions avaient été aussi importantes envers le III eme Reich qu’elles le sont aujourd’hui envers la Russie, peut-être n’aurions nous pas connu la Seconde guerre mondiale et ses conséquences.
Bien à vous.
Chere Madame Allouche,
RépondreSupprimerà la lecture de votre commentaire, il me semble que vous vous méprenez sur le sens de mon article. Je ne plaide pas en faveur de la Russie. En revanche, en suivant votre raisonnementje fais une analyse factuelle. Le probleme de la Russie avec ses voisins est bien connu des dirigeants occidentaux depuis au moins 2014. En 2015 l'annexion de la Crimée est passé sans douleur. Concernant le litige du Dombass, les parties se sont retrouvées dans ce qu'on a appelé le format de Minsk ( Russie, Ukraine, Allemand, France) le tandem franco allemand n'a fait que trainer le processus en longueur sans aucun résultat faute d'en avoir la volonté. Ca s'appelle la diplomatie, dit on. A une exception près tous les accords sur les armes, les missiles,entre Etats Unis et Russie n'ont pas été renouvelés. Dans le meme temps, l'Otan avait indiqué ne pas étendre sa présence en Europe. La suite a démontré le contraire. Au delà des visées hégémoniques russes, les racines du mal ont prospéré. Sur le conflit lui meme, on voit bien que l'escalade est en cours. Les chars de diverses origines, lorsqu'ils seront livrés leur mise en opération implique une couverture aérienne et une logistique adaptée. Il y a donc une énorme ambiguïté à feindre d'ignorer que les chars seuls sont notoirement insuffisants. C'est comme vous promettre la livraison d'un réfrigerateur et la climatisation en omettant de vous installer l'electricité.
J'ai pris la peine de reprendre les options dont celle ardemment désirée par l"Ukraine du big bang. C'est à dire des moyens autrement importants que ceux actuels qui permettent certes de résister mais pas plus. Donc, je suis d'accord avec vous sur un point: si en 1940 on avait utilisé la formule du Big Bang peut etre aurions nous éviter la suite et les dizaine de millions de victimes dont les six millions de la Shoah.
A défaut c'est l'option de l'enlisement qui deviendra réalité. Elle pourrait durer des années, au même titre que ce qui se passe depuis dix ans avec le Dombass, à quel prix ? Accessoirement les sanctions impactent également les pays européens. On en verra progressivement les effets. Pour l'instant on ne parle pas, pas encore, d'envoyer des militaires ( européens) de l'Otan sur le front, mais ca reste à suivre.
Bien cordialement,
Merci Monsieur Moritz d’avoir pris la peine de me répondre.
RépondreSupprimerConcernant les moyens actuels de chars et d’armements livrés par l’Occident, je suis bien d’accord avec vous, ils sont largement insuffisants pour venir à bout de cette guerre. Mais les informations ont évoluées depuis hier puisqu’on apprend que le premier ministre anglais pourrait envoyer des avions de chasse à l’Ukraine. Ce n’est pas pour demain puisqu’il faudra former des pilotes mais c’est une option non négligeable.
Dans cette hypothèse il est possible que le Big-bang dont vous parlez n’ait pas lieu, que Poutine abdique sans qu’il soit besoin de le contraindre à trop de sévérité ( je pense au Traité de Versailles qui a conduit à la seconde guerre mondiale), et que dans ces conditions tout rentre dans l’ordre.
Trop optimiste? L’avenir nous le dira.
Bien cordialement
Je vois plutôt une agitation qui enfle. Des axes qui se mettent doucement en place. Une montée de la guerre. Un dictateur fou à abattre, qui possède des armes nucléaires. Des opinions publiques occidentales de plus en plus anxieuses : pandémie, guerre, réchauffement climatique. Des populistes menteurs sans vergogne. Et même Israël qui se délite. Et pourtant, tant de raisons de rester optimiste.
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