RUSSIE-UKRAINE, QUI VEUT FRANCHIR LES LIGNES ROUGES
Par
Francis MORITZ
Reunion de Ramstein pour faire sortir les chars Leopard d'Allemagne |
Pour y arriver, nous dit-on, il faut fournir des
équipements lourds offensifs. L’ami américain, le soutien sans faille
financièrement et militairement, a déjà décidé de ne pas fournir ses tanks M1
Abrams, car trop consommateurs de carburant, nécessitant un entretien
important et une formation spéciale. Les
experts militaires contestent ces explications. On rappellera que les
États-Unis avaient déclaré dès le départ, ne pas engager de troupes au sol.
Ironie de l’histoire, l’Allemagne est devenue l’arsenal de l’Europe. Le
secrétaire d’état américain, Lloyd Austin enfonce le clou «L'Allemagne est un allié fiable et ce depuis
très longtemps», déclare-t-il aux
journalistes, pressé sur le rôle de Berlin. «Je crois vraiment qu'ils continueront
d'être un allié fiable à l'avenir», a-t-il ajouté. Enfin, il a précisé que
l'Allemagne était essentielle pour aider à former les soldats ukrainiens. «L'Allemagne
continue d'ouvrir les portes et de mettre à notre disposition les installations
des zones d'entraînement pour que nous puissions continuer à travailler, et
l'Allemagne entraîne également des troupes…». On ne saurait être plus
clair. Le secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg, a également déclaré
que l'Allemagne était l'un des alliés apportant le plus de soutien à
l'Ukraine.
La pression
est mise sur l’Allemagne pour lui imposer de livrer directement et autoriser la
fourniture des tanks Léopard-2 - réputés pour leur efficacité sur le plan
offensif - livrés aux voisins de la Russie (Pologne, Finlande, Lituanie). Kiev parle de 300 chars, plus de 100
chars de combat de différents modèles Léopard-1 et 2, Challenger-1 seraient
rapidement disponibles, en vue d’une offensive au printemps mais que les opérations pourraient
se prolonger au-delà de 2023.
Char Leopard allemand |
L'offensive de printemps
Selon un article du New York Times,
l’objectif d’une offensive printanière est explicite, car Kiev ne s'attend pas
à pouvoir résister indéfiniment aux attaques russes et tente d’imposer un
revirement sur le champ de bataille. De hauts responsables militaires
ukrainiens et américains se sont rencontrés en Allemagne pour planifier les
détails. Lors de la réunion des ministres de la défense à Ramstein, il
s’agissait de clarifier comment les armes pourraient être acheminées. Il
s’agirait dans un premier temps de reconquérir la région de Zaporijia – y
compris la ville de Marioupol si possible.
Un succès compliquerait sérieusement les
approvisionnements russes en Crimée. Les milieux militaires américains
affirment que depuis Kherson, qui a été reprise à l'automne, l'Ukraine pourrait
attaquer les approvisionnements destinés aux territoires conquis par la Russie
depuis la Crimée. La Crimée elle-même pourrait facilement être attaquée au
cours de l'offensive. Enfin l’article indique que Washington est prêt à
autoriser un bombardement plus étendu de la Crimée. Ce qui pourrait
constituer un franchissement des lignes rouges qui entrainerait une escalade,
pouvant même déclencher une attaque nucléaire. Hypothèse non retenue par la
Maison blanche.
Lloyd Austin secrétaire d'état et le général Mark ;A; Milley à Ramstein |
Or dans le passé, l'Occident a franchi à
plusieurs reprises les lignes rouges de la Russie - avec des conséquences
dramatiques. Dans la configuration actuelle, une éventuelle attaque
nucléaire frapperait l'Europe mais pas les Etats-Unis. Le Premier ministre
polonais a déclaré que l'approbation allemande - légalement requise - pour le
transfert de chars Leopard polonais à l'Ukraine était secondaire. Le
ministre allemand Boris Pistorius de la Défense a rencontré son homologue
américain mais n'a partagé aucune conclusion.
Il n'est pas «juste
de critiquer» l'Allemagne pour avoir pris le temps de réfléchir à
l'opportunité de donner des chars Leopard-2 à l'Ukraine, a déclaré DW Adam
Smith, qui dirige les Démocrates au sein du US House Armed Services Committee. Il
a ajouté que même si les alliés de l'Ukraine veulent la défaite de la Russie,
ils ne veulent pas non plus d'un conflit direct. La position américaine
est très ambivalente.
Lloyd Austin secretaire d'état americain |
Attaquer la Crimée ?
Selon le New York
Times, l'administration Biden est disposée à donner son feu vert à des attaques
à plus grande échelle mais sans en déterminer précisément l’envergure.
Les précédentes attaques contre des navires de guerre russes ou contre
des bases aériennes en Crimée n'ont déclenché que des réactions russes modérées,
parait-il. Cela a considérablement réduit les craintes que Moscou réponde
par une frappe nucléaire tactique. L'Amérique est donc favorable au
bombardement de la Crimée à plus grande échelle. Ce qui pourrait priver la
Russie d'une base arrière. Cependant, le président Joe Biden semble avoir
des doutes et n’est pas encore prêt à donner aux Ukrainiens des armes
telles que des missiles qui pourraient atteindre les installations russes en Crimée.
L'administration
américaine se révèle ambivalente. Elle est plutôt sceptique quant à la capacité
de l'Ukraine à reconquérir la péninsule. L’hypothèse que Moscou puisse
réagir aux tentatives de conquête par une escalade dramatique demeure actuelle.
Les stratèges de Washington n'ont pas osé formuler officiellement l’éventualité
où Moscou réagirait directement à la fourniture de matériels allemands et
français aux pays voisins de la Russie chargés de les transférer à l’Ukraine.
Que se passerait-il si la Russie envoie ses missiles en Finlande, en Lituanie
ou en Pologne ou en Allemagne ? La France qui ne dispose pas d’armes
nucléaires tactiques, contrairement à la Russie ne pourrait pas faire usage de
son arme atomique sauf en très ultime recours.
Franchir les fameuses lignes rouges
Le test du jusqu’où-on-peut-aller-sans-finalement-
franchir les lignes rouges n'est pas nouveau. L'Occident l'a déjà
fait, provoquant des réponses russes sévères. Lors de l'attaque de la Géorgie
contre l'Ossétie du Sud en août 2008, la Russie, a repoussé les troupes
géorgiennes. Un deuxième exemple est le coup d'État de Maïdan soutenu par
l’Occident en février 2014, qui avait rapproché l'Ukraine de l'UE et de
l'OTAN. Moscou avait réagi - totalement imprévu pour et par les puissances
occidentales - en soutenant la sécession de la Crimée en mars 2014 et en
l’absorbant. Il n'est pas certain qu'il aurait été possible d'éviter la
guerre en Ukraine si l'OTAN avait renoncé à son implication, mais c'est
concevable. L'Occident a préféré tester les lignes rouges de la
Russie. L'Ukraine le paie maintenant au prix fort mais jusqu’à quand,
c’est la question.
L’échéance se rapproche
Le test actuel
porte sur l’utilisation par Moscou d’armes nucléaires tactiques. Faisant
explicitement référence a ce danger très réel, l’éminent Henry Kissinger -
opposant déclaré à la politique russe - a récemment appelé à s'abstenir de
toute nouvelle escalade et à plutôt envisager un cessez-le-feu. À
Washington, son avertissement est ignoré. L'administration américaine et
le complexe militaro-industriel peuvent se le permettre : une éventuelle
réplique nucléaire russe dévasterait l'Europe, Mais pas les États-Unis –
de la même manière que la guerre économique contre la Russie a un impact très
négatif sur les pays européens, mais pas sur les États-Unis.
Chaque jour
davantage, l’Europe se trouve prise en étau sinon même en otage d’un conflit
dans lequel elle s’enfonce et qui risque à tout instant de s‘étendre dans les
pays voisins de la Russie, voire au-delà. Pourtant, Washington pousse
l’Allemagne et les Européens à s’impliquer dans cette guerre qu’elle conduit de
loin. C’est pourquoi Washington engage l’Allemagne à l’escalade. Cette
Allemagne qui refusait, encore il y a peu, de constituer une armée digne de ce nom
et qui se trouve en première ligne d’un conflit qu’elle n’a pas voulu. Seul un
cessez-le-feu et des négociations pourront mettre fin à plus de victimes, plus
de destructions et éviter que l’Europe ne connaisse en direct les affres de la
guerre et du sang versé. Mort où est ta victoire ?
On peut legitimement se poser la question si cette guerre initiee par la Russie et les Etats-Unis n'a pas pour but de reintroduire une partie de l'Europe dans le giron russe. Y a-t-il eu des accords secrets entre la Russie et les USA. Je vois tres bien a l'horizon un retrait americain (et surtout europeen) style retrait americain de l'Afghanistan.
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