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vendredi 10 février 2023

L'Ukraine alliée d'Israël contre l'Iran

 

L'UKRAINE ALLIÉE D’ISRAËL CONTRE L’IRAN 

Par Jacques BENILLOUCHE

Copyright © Temps et Contretemps

explosion dans une usine de l'industrie militaire à Ispahan


Dans le conflit entre la Russie et l’Ukraine, l’Iran s’est montré très actif pour aider la Russie en envoyant, de manière officielle, des centaines de drones qui se sont ensuite abattus sur les villes ukrainiennes. L’Iran, isolé mondialement, a choisi son camp pour recevoir en échange un soutien logistique, politique et financier et même des avions militaires de dernière génération.  On ne choisit pas ses amis mais ses intérêts. De ce point de vue, l’Ukraine a donc de multiples raisons d’en vouloir aux Iraniens qui aident à la destruction de leurs bâtiments et à la mort de centaines de civils.


Drones iraniens


            L’Iran vient d’annoncer qu’une attaque de drones avait été lancée contre des usines à Ispahan mais qu’il avait réussi à la déjouer. Pourtant de nombreux incendies ont été vus à plusieurs endroits de la province. Téhéran n’a pas attribué la responsabilité de cette attaque mais a pointé deux coupables éventuels, soit le Mossad israélien, soit le gouvernement ukrainien. D’autres sources pensent que l’Azerbaïdjan, qui a une frontière commune avec l’Iran et dont l’ambassade à Téhéran a été fermée à la suite de la montée des tensions, pourrait avoir joué un rôle aux côtés d’Israël qui lui fournit 70% de son matériel militaire.

             Les médias américains, sur la base d’informations sécuritaires, sont convaincus qu’Israël était à l'origine de l'attaque nocturne de drones sur un site militaire en Iran. De son côté, Téhéran a précisé que ses défenses aériennes avaient intercepté une attaque de quadricoptères armés visant une usine de munitions du ministère de la Défense dans la ville d'Ispahan. L'un des drones a été abattu, tandis que les deux autres ont explosé au-dessus de l'installation, causant des «dommages mineurs». Le ministre iranien des Affaires étrangères, Hossein Amir Abdollahian, a qualifié l'explosion d'attaque «lâche visant à répandre l'insécurité en Iran. De telles actions ne peuvent pas affecter la détermination et l'intention de nos experts pour un progrès nucléaire pacifique». L'armée israélienne n'a pas commenté l'attaque car elle revendique rarement publiquement ses opérations. Si cette attaque israélienne contre l'Iran était confirmée, ce serait la première action connue de ce type menée par le nouveau gouvernement Netanyahou.

Le ministre des Affaires étrangères iranien, Hossein Amir-Abdollahian, avec Bachar al-Assad 


            Pour les détails, le ministère iranien de la Défense a déclaré que trois petits drones, ou micro-véhicules aériens (MAV), ont été utilisés pour cibler l'installation, mais que l'un a été abattu et que deux se sont écrasés. Il a précisé que l'attaque, qui s'est produite vers 23h30, n'a fait aucune victime et n'a causé que des «dommages mineurs» en raison du renforcement de la sécurité du site. Des sources américaines très informées ont déclaré de leur côté que l'attaque était «spécifique, chirurgicale et réussie. Quatre zones différentes du bâtiment ont été ciblées avec précision et l'objectif a été atteint».

            Mais la controverse nouvelle réside dans l’implication possible ukrainienne, fondée sur un tweet du 29 janvier d'un haut dirigeant ukrainien Mykhailo Podolyak, conseiller politique du président ukrainien : «L'Iran, qui envisage de fournir des missiles et des drones à la Russie, humilie de manière flagrante les institutions des sanctions internationales. Il est important d'abandonner les sanctions qui ne fonctionnent pas, le concept de résolutions invalides de l'ONU et de passer à des outils plus destructeurs - liquidation d'usines, arrestation de fournisseurs». L'intention est claire.

Mykhailo Podolyak, conseiller politique du président ukrainien


L’Iran a immédiatement expliqué qu'il «implique la participation de Kiev à l'action contre l'Iran. Si le gouvernement ukrainien ne s'absout pas officiellement de cet incident, cela entraînera de lourdes conséquences pour eux». L'attaque d'Ispahan a eu lieu au même moment où le guide suprême, l'ayatollah Ali Khamenei, visitait une exposition présentant les réalisations iraniennes et où l'Azerbaïdjan commençait à évacuer son ambassade à Téhéran.



Dans ce genre d’attaque contre des sites nucléaires et militaires iraniens sensibles, Israël est généralement accusé mais des rapports sécuritaires affirment qu’il n’était pas impliqué, cette fois. Alors toutes les hypothèses fusent. Les Saoudiens ont allégué que les États-Unis et un allié «anonyme» avaient coopéré à l'attaque qui visait une installation utilisée pour stocker des missiles balistiques, ce que les États-Unis ont bien sûr démenti.

L’attaque d'Ispahan s'est produite moins d'une semaine après un important exercice militaire américano-israélien destiné à signaler une volonté de confrontation avec Téhéran. Elle a été également suivie par la visite du chef de la CIA William Burns en Israël. Elle visait à entraver l'armement de la Russie par l'Iran alors que Téhéran et Moscou ont connu un renforcement considérable des liens économiques et énergétiques, une trajectoire qui a été accélérée par l'isolement occidental de Moscou sur son invasion de l'Ukraine. Confrontée à des sanctions sévères, la Russie a renforcé son effort de guerre en Ukraine en utilisant des drones iraniens de qualité médiocre mais à bon marché. Mais la finalité serait d'obtenir des missiles balistiques que l’Iran veut échanger contre des avions de guerre russes avancés.

Quadricoptère


            L’administration Biden veut transmettre le message que sa confrontation avec l’Iran s’intensifie. Par ailleurs elle met en garde la Turquie et les Émirats arabes unis, principaux partenaires commerciaux de l'Iran, contre le fait d'aider l'Iran à échapper aux sanctions tandis que l’Ukraine cherche à retarder la livraison de missiles à Moscou. Beaucoup d'acteurs sont donc intéressés à réduire au silence l'Iran.

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