L'UKRAINE ALLIÉE D’ISRAËL CONTRE L’IRAN
Par Jacques BENILLOUCHE
explosion dans une usine de l'industrie militaire à Ispahan |
Dans le conflit
entre la Russie et l’Ukraine, l’Iran s’est montré très actif pour aider la
Russie en envoyant, de manière officielle, des centaines de drones qui se sont
ensuite abattus sur les villes ukrainiennes. L’Iran, isolé mondialement, a
choisi son camp pour recevoir en échange un soutien logistique, politique et
financier et même des avions militaires de dernière génération. On ne choisit pas ses amis mais ses intérêts.
De ce point de vue, l’Ukraine a donc de multiples raisons d’en vouloir aux
Iraniens qui aident à la destruction de leurs bâtiments et à la mort de centaines de
civils.
Drones iraniens |
L’Iran vient d’annoncer qu’une
attaque de drones avait été lancée contre des usines à Ispahan mais qu’il avait
réussi à la déjouer. Pourtant de nombreux incendies ont été vus à plusieurs
endroits de la province. Téhéran n’a pas attribué la responsabilité de cette
attaque mais a pointé deux coupables éventuels, soit le Mossad israélien, soit
le gouvernement ukrainien. D’autres sources pensent que l’Azerbaïdjan, qui a
une frontière commune avec l’Iran et dont l’ambassade à Téhéran a été fermée à
la suite de la montée des tensions, pourrait avoir joué un rôle aux côtés
d’Israël qui lui fournit 70% de son matériel militaire.
Les médias américains, sur la base d’informations
sécuritaires, sont convaincus qu’Israël était à l'origine de l'attaque nocturne
de drones sur un site militaire en Iran. De son côté, Téhéran a précisé que ses
défenses aériennes avaient intercepté une attaque de quadricoptères armés
visant une usine de munitions du ministère de la Défense dans la ville
d'Ispahan. L'un des drones a été abattu, tandis que les deux autres ont explosé
au-dessus de l'installation, causant des «dommages mineurs». Le ministre
iranien des Affaires étrangères, Hossein Amir Abdollahian, a qualifié
l'explosion d'attaque «lâche visant à répandre l'insécurité en Iran. De
telles actions ne peuvent pas affecter la détermination et l'intention de nos
experts pour un progrès nucléaire pacifique». L'armée israélienne n'a
pas commenté l'attaque car elle revendique rarement publiquement ses opérations. Si cette attaque israélienne contre l'Iran était confirmée, ce serait
la première action connue de ce type menée par le nouveau gouvernement Netanyahou.
Le ministre des Affaires étrangères iranien, Hossein Amir-Abdollahian, avec Bachar al-Assad |
Pour les détails, le ministère
iranien de la Défense a déclaré que trois petits drones, ou micro-véhicules
aériens (MAV), ont été utilisés pour cibler l'installation, mais que l'un a été
abattu et que deux se sont écrasés. Il a précisé que l'attaque, qui s'est produite vers 23h30,
n'a fait aucune victime et n'a causé que des «dommages mineurs» en
raison du renforcement de la sécurité du site. Des sources américaines très
informées ont déclaré de leur côté que l'attaque était «spécifique,
chirurgicale et réussie. Quatre zones différentes du bâtiment ont été ciblées
avec précision et l'objectif a été atteint».
Mais la controverse
nouvelle réside dans l’implication possible ukrainienne, fondée sur un tweet du 29
janvier d'un haut dirigeant ukrainien Mykhailo Podolyak, conseiller
politique du président ukrainien : «L'Iran, qui envisage de fournir des
missiles et des drones à la Russie, humilie de manière flagrante les
institutions des sanctions internationales. Il est important d'abandonner les
sanctions qui ne fonctionnent pas, le concept de résolutions invalides de l'ONU
et de passer à des outils plus destructeurs - liquidation d'usines, arrestation
de fournisseurs». L'intention est claire.
Mykhailo Podolyak, conseiller politique du président ukrainien |
L’Iran a
immédiatement expliqué qu'il «implique la participation de Kiev à l'action
contre l'Iran. Si le gouvernement ukrainien ne s'absout pas officiellement de
cet incident, cela entraînera de lourdes conséquences pour eux». L'attaque
d'Ispahan a eu lieu au même moment où le guide suprême, l'ayatollah Ali
Khamenei, visitait une exposition présentant les réalisations iraniennes
et où l'Azerbaïdjan commençait à évacuer son ambassade à Téhéran.
Dans ce genre
d’attaque contre des sites nucléaires et militaires iraniens
sensibles, Israël est généralement accusé mais des rapports sécuritaires affirment
qu’il n’était pas impliqué, cette fois. Alors toutes les hypothèses fusent. Les Saoudiens
ont allégué que les États-Unis et un allié «anonyme» avaient coopéré à
l'attaque qui visait une installation utilisée pour stocker des missiles
balistiques, ce que les États-Unis ont bien sûr démenti.
L’attaque d'Ispahan
s'est produite moins d'une semaine après un important exercice militaire américano-israélien destiné à signaler une volonté de confrontation avec Téhéran.
Elle a été également suivie par la visite du chef de la CIA William
Burns en Israël. Elle visait à entraver l'armement de la Russie par l'Iran
alors que Téhéran et Moscou ont connu un renforcement considérable des liens économiques et énergétiques, une
trajectoire qui a été accélérée par l'isolement occidental de Moscou sur son
invasion de l'Ukraine. Confrontée à des sanctions sévères, la Russie a renforcé
son effort de guerre en Ukraine en utilisant des drones iraniens de qualité
médiocre mais à bon marché. Mais la finalité serait d'obtenir des missiles
balistiques que l’Iran veut échanger contre des avions de guerre russes
avancés.
Quadricoptère |
L’administration Biden veut
transmettre le message que sa confrontation avec l’Iran s’intensifie. Par
ailleurs elle met en garde la Turquie et les Émirats arabes unis, principaux
partenaires commerciaux de l'Iran, contre le fait d'aider l'Iran à échapper aux
sanctions tandis que l’Ukraine cherche à retarder la livraison de missiles à
Moscou. Beaucoup d'acteurs sont donc intéressés à réduire au silence l'Iran.
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