AVIV KOHAVI EN FRANCE POUR
PARLER DE L’IRAN ET DU LIBAN
Par Jacques BENILLOUCHE
De son côté, Israël n’est pas
membre de l’Otan mais agit au mieux pour se rapprocher de l’organisation
en
offrant des innovations technologiques et des capacités de collecte de
renseignements comme base pour des liens plus solides. L'invasion russe de l'Ukraine a sapé l'ordre
sécuritaire en Europe et l'Union européenne est confrontée à une nouvelle ère
de conflit stratégique sur le continent. L'Europe et l'OTAN regardent désormais
vers l'Est. On se souvient qu’Emmanuel Macron avait averti que l’Otan souffrait
d’une «mort cérébrale».
Joe Biden envisage donc des
réformes à savoir la lutte contre les menaces
technologiques émergentes telles que la cyber et l'intelligence artificielle,
la préparation du front intérieur civil aux armes non conventionnelles et la
lutte contre la propagation du terrorisme mondial. Cela implique une
collaboration avec les industries militaires, mais aussi avec les géants du
logiciel et avec les entreprises qui produisent des technologies à double usage,
civil et militaire, dans lesquels Israël dispose d’une grande expérience.
Israël veut donc développer ses
relations avec l’Otan. L'innovation israélienne, ses
capacités dans les domaines du cyber, du renseignement, des interfaces civils
et militaires, et la capacité israélienne de s’épanouir dans la haute
technologie sont des arguments positifs pour l’Otan. Ses systèmes de défense et
son secteur privé peuvent être utiles à l’organisation.
Industries militaires israéliennes |
Israël entretient des
relations privilégiées avec l'OTAN depuis plus de trente ans et a été le
troisième pays non-membre à obtenir le statut d'alliance dès 1989. Il s’agit
d’un avantage stratégique car Israël partage les renseignements sur la question
du terrorisme iranien. C'est un excellent
moyen pour Israël de mettre en évidence les questions stratégiques qui sont
importantes pour lui.
A Paris, Kohavi a
traité du problème du Hezbollah au Liban et du dossier iranien. Le 21
septembre, il a rencontré le chef d'État-major français, le général Thierry
Burkhard, et des hauts responsables des forces armées françaises. Il s’est
ensuite entretenu le lendemain à l'Élysée avec le conseiller militaire du
président français, l'amiral Jean-Philippe Rolland : «Le renforcement
des relations entre l'armée française et Tsahal est important pour la stabilité
régionale. Nous avons présenté à nos collègues français des renseignements qui
prouvent que l'armée terroriste du Hezbollah a récemment accru ses activités
négatives, d'une manière qui crée un risque toujours croissant d’escalade,
essayant de mettre en danger Israël, mais en pratique aussi le Liban et ses
citoyens. Le Hezbollah a pris en otage les citoyens du Liban, pour ainsi dire,
en utilisant cyniquement les infrastructures civiles, les maisons et les
bâtiments résidentiels qui pourraient être attaqués par Tsahal si et quand cela
est nécessaire».
Thierry Burkhard |
Le chef de Tsahal a
appelé la communauté internationale à exiger du gouvernement libanais qu'il
exerce son contrôle sécuritaire contre le Hezbollah : «Les actions du
Hezbollah en tant qu'organisation terroriste sont un exemple de la façon dont
il empêche un changement positif au Liban, préservant à la place un système
défaillant. En pratique, cela sert les intérêts iraniens dans la région. Nous
travaillons dur contre l'implantation de l'Iran au Moyen-Orient. Les tentatives
de nuire à l'État d'Israël, dans n'importe quel domaine, se heurteront à une
réponse tranchante ou à une initiative préliminaire».
À l'Élysée, Kohavi et
Rolland ont mené un dialogue stratégique/opérationnel sur les défis auxquels le
Moyen-Orient est confronté, en particulier l'Iran, qui présente à la fois un
problème régional et mondial. Les deux hommes se sont également penchés
sur la situation sécuritaire à la frontière libanaise, et sur l'armement du
Hezbollah. Ils ont discuté de l'influence française dans la région, de la
promotion des intérêts de sécurité mutuels et de la promotion de la coopération
entre les armées. Les agences de sécurité israéliennes et françaises,
armées comprises, ont une longue histoire de liens étroits et de
coopération. Celles-ci se sont poursuivies même à des moments où les
relations diplomatiques entre Paris et Jérusalem se sont
compliquées. Paris est à l'avant-garde des efforts occidentaux pour
conclure un nouveau plan d'action global conjoint avec Téhéran. La visite
de Kohavi a permis à Israël d’expliquer à nouveau les activités nucléaires
iraniennes.
Macron Aoun |
Selon les
déclarations de Kohavi à Paris, le cœur de sa visite était le dossier
libanais. Israël est au milieu de négociations sous médiation américaine
avec le Liban sur la démarcation des frontières maritimes et la propriété de la
zone maritime où se trouve la plate-forme de gaz naturel israélienne
Karish. Des sources à Jérusalem ont estimé cette semaine que sans les blocages
du secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, pour repousser un accord,
un accord pourrait être conclu en quelques semaines. Le chef de Tsahal aussi
abordé la question préoccupante du grand arsenal de roquettes et de missiles de
précision détenus par la milice et dirigés contre des cibles civiles israéliennes.
Lapid pense que Paris pourrait jouer un rôle important à cet égard car la France
a rédigé la résolution 1701 des Nations Unis concernant la situation au Liban
et la présence des forces de maintien de la paix de la Finul
Kohavi a insisté pour
expliquer que l'armée libanaise n'assure pas la liberté de mouvement de la
FINUL dans le pays. Des faits ont prouvé que des miliciens du Hezbollah
sont entrés dans les positions de la FINUL en humiliant les soldats de la paix.
Le lien privilégié de la France avec le président Aoun pourrait jouer un rôle
important dans le rapprochement des parties. L'aide américaine et
française au Liban pourrait être conditionnée par une pression sur les
autorités libanaises pour aider le Liban à sortir de l'emprise du Hezbollah sur
le pays.
Karish |
L'influence française
au Liban s’exprime aussi par l’intermédiaire de TotalEnergies qui détient des
droits d'exploitation sur la zone maritime litigieuse. Le 6 septembre,
Aoun a déclaré que TotalEnergies pourrait aider le Liban à résoudre les
problèmes de démarcation maritime avec Israël. S'exprimant lors d'une cérémonie
militaire le 21 septembre dans le nord d'Israël, le ministre de la Défense
Benny Gantz a évoqué des informations selon lesquelles Téhéran aurait proposé
au Liban d'envoyer 600.000 tonnes de carburant au cours des cinq prochains
mois, pour atténuer la crise économique et énergétique du pays : «L'Iran,
par le biais du Hezbollah, essai d’acheter le Liban en fournissant du
carburant, en réparant le système électrique et en construisant des centrales
électriques. La dépendance énergétique du Liban vis-à-vis de l'Iran peut
éventuellement conduire à l'établissement de bases iraniennes sur le sol
libanais et à la déstabilisation de la région - et les citoyens libanais sont
ceux qui en paieront le prix». En fait, l’intérêt d’Israël est d’aider
le Liban à surmonter sa crise économique.
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