MEVLUT_CAVUSOGLU_YAIR_LAPID_MEETING_IN_ANKARA |
Poutine- Erdogan à Sotchi |
Ensuite, le président Erdogan a
rencontré Wladimir Poutine à Sotchi pour essayer d’obtenir cet accord car la
Russie est intéressée par l’achat de drones. On ne peut exclure un échange pétrole-drones-feu
vert. Bien que membre de l’Otan, le président Erdogan s’évertue à vouloir être
un courtier-médiateur vis à vis de la Russie son voisin et fournisseur d’armes.
Sans le proclamer, Téhéran considère la Turquie comme un rival qui l’empêche
d’étendre son hégémonie. Israël est l’ennemi juré qu’il faut combattre,
d’autant plus que c’est l’allié des États-Unis, l’autre grand Satan. Qui aurait
pu imaginer qu’entre deux partenaires supposés, Turquie et Iran, on aille chez
le voisin organiser des attentats et pourtant.
Les activités croissantes des milices pro-iraniennes
sont devenues une menace permanente pour les voisins arabes, pour la sécurité
d’Ankara et celle de Jérusalem. En Syrie, elles représentent un danger commun
qui se traduit par une convergence d’intérêt. De plus, Ankara n’a jamais
critiqué les frappes israéliennes durant ces dernières années. Lorsque la Turquie
a effectué sa première frappe de drone contre les milices soutenues par les
Gardiens de la révolution en Syrie en 2020 contre le régime d'Assad, Israël a
été très intéressé de connaître l’analyse stratégique d’Ankara, à l’occasion des combats contre l'unité d’élite
Radwan du Hezbollah et les forces turques dans la province d'Idlib où le
Hezbollah avait essuyé de très lourdes pertes jamais vues depuis des années.
Poutine humilie Erdogan en le faisant poireauter
Avec
la reprise des négociations sur le nucléaire, aucun des deux pays ne souhaite
être face à un Iran disposant de l’arme nucléaire. Ce qui déclencherait
inévitablement une course aux armements nucléaires avec tous les risques
nouveaux que cela entrainerait, un accord à tout prix que les Américains semblent
vouloir finaliser avant les élections de mi-mandat, renforcerait les mollahs.
Ce qui leur permettrait de poursuivre leurs visées hégémoniques, voir l’Irak. Cet
accord n’inclurait pas la production de missiles et autres drones, et
représenterait une menace inacceptable pour Israël, la Turquie et les
monarchies arabes.
Avant même la confirmation de
cette hypothèse boiteuse, l’Iran utilise de plus en plus ses milices affiliées
pour faire pression et cibler à la fois la Turquie et Israël. Téhéran a
intensifié les efforts des milices chiites irakiennes pour viser, dans le nord de
l’Irak, les postes militaires turcs combattant le Parti des travailleurs du
Kurdistan (PKK) – désigné organisation terroriste. Un rapport déclassifié du
renseignement militaire américain affirme que les milices chiites soutenues par
l'Iran en Irak se coordonnent avec le PKK contre la Turquie.
troupes syriennes à Idlib |
En juin 2022, plusieurs
informations indiquaient que l'Iran a contribué à la création d'une salle
d'opérations conjointes dans le nord de la Syrie entre les milices armées
kurdes de l'Unité de protection du peuple (YPG) et les milices armées chiites
soutenues par les Gardiens de la révolution pour contrer une éventuelle
opération turque. La Syrie et le Liban continuent de servir de rampes de
lancement pour les attaques contre Israël.
Le 2 juin, Israël a intercepté
trois drones pilotés par le Hezbollah au-dessus du champ gazier de
Karish. Récemment, l'idée de fournitures de gaz israélien vers l'Europe par
un gazoduc sous-marin via la Turquie a été évoquée à huis clos. Une telle
décision impliquerait Ankara dans un possible conflit et l’obligerait à mettre
en place une surveillance réelle des tentatives de sabotage par des milices pro
iraniennes.
Ce sont ces développements de l'implication
de Téhéran qui ont créé une convergence d'intérêts entre la Turquie et Israël. Après l’élimination de plusieurs
personnalités iraniennes, l'Iran a cherché à se venger en ciblant des citoyens
israéliens en Turquie et imaginait faire d'une pierre deux coups : se venger
d'Israël et saborder le rapprochement turco-israélien. Ces attaques pouvaient
provoquer la méfiance entre Ankara et Jérusalem et réduiraient à néant les
efforts de collaboration entre les deux pays. Le projet a provoqué un
retournement de situation.
En février 2022, le renseignement
(MIT) turc découvre un réseau iranien chargé de tuer un homme d'affaires
israélo-turc. Il informe le Mossad. Cette opération a constitué le premier
pas dans la coopération entre les deux parties et a ouvert la voie à la visite
du président israélien en Turquie. Les responsables se rencontrent. Le MIT a neutralisé
la cellule iranienne.
Le projet d'alliance régionale
de défense aérienne dirigé par les États-Unis - associant Israël à plusieurs
pays arabes du Golfe pour contrecarrer les attaques aériennes iraniennes - a
constitué un motif supplémentaire pour Téhéran d'essayer de saboter le rapprochement
turco-israélien et de dissuader Ankara d’y adhérer.
Hossein Taeb chef des renseignements iraniens |
Face aux faits, les
responsables iraniens rejettent les accusations israéliennes. Leur
porte-parole, Saeed Khatibzadeh a déclaré qu’elles étaient «sans
fondement et faisaient partie d'un complot préconçu pour détruire les relations
entre les deux pays musulmans». Cependant, la Turquie a rendu
l’opération publique. La coordination a contrecarré l'attaque et a
manifestement accéléré le processus de normalisation entre la Turquie et
Israël. Le 23 juin, Yaïr Lapid, alors ministre des Affaires étrangères et
actuel Premier ministre par intérim, s'est rendu en Turquie pour la première
fois après deux décennies. Il a salué la coopération sécuritaire avec la Turquie
et a déclaré que «la vie des citoyens israéliens a été sauvée grâce à
la coopération sécuritaire et diplomatique». Lapid a ajouté qu'Ankara «sait
comment répondre aux Iraniens» Pour sa part, le ministre turc des Affaires
étrangères, Mevlut Cavusoglu, a déclaré qu’en ce qui concerne l'Iran, «les
messages nécessaires ont déjà été transmis, et qu'ils ne permettront jamais de
telles attaques terroristes en Turquie».
À la suite de cet échec nié, le
chef de l'unité de renseignement iranienne du CGRI, Hossein Taeb, a été limogé. En
fin de compte, l'opération clandestine n'a réussi qu'à mettre en lumière la
rivalité entre Ankara et Téhéran. Depuis, Ankara a consacré plus de
ressources aux opérations de contre-espionnage tant pour déjouer les tentatives
de Téhéran de tuer des touristes que pour renforcer le rapprochement
turco-israélien, mais aussi pour sauvegarder son secteur du tourisme, qui a généré
plus de 34 milliards de dollars en devises en 2019 alors que le pays subit
une crise économique sans précédent.
La menace iranienne a été écartée
temporairement, mais Téhéran poursuivra les mêmes politiques régionales qui ont
contribué à rapprocher Ankara et Jérusalem. À l'avenir, l'action iranienne
pourrait même créer un terrain d'entente et un intérêt partagé pour que
davantage de pays de la région se rapprochent les uns des autres et élargissent
leur coopération face, pour contrer l’hégémonie iranienne. Une fois de plus les
grandes règles de la réal politique s’appliquent : les pays n’ont pas d’amis
ils n’ont que des intérêts et en politique, souvent, l’ennemi de mes ennemis
devient mon ami.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire