ITAMAR BEN GVIR OU LA REVANCHE
D’UN PESTIFÉRÉ
Par Jacques BENILLOUCHE
Itamar Ben-Gvir, Michael Ben-Ari, Benzi Gopstein et Baruch Marzel |
Il doit sa réputation aux médias
qui ont martelé son opposition au parti Raam de Mansour Abbas, soutien de la
coalition actuelle. Il a tout fait pour
attirer l’attention sur lui en s’installant en pleine rue pour soutenir
l’expulsion de familles palestiniennes de Cheikh Jarrah, en s’introduisant de
force dans la chambre d’hôpital d’un gréviste de la faim arabe, et en
provoquant une altercation avec le chef de la liste arabe Ayman Odeh. C’est un
spécialiste politique qui veut faire parler de lui au moyen de provocations en
arborant son idéologie d’extrême-droite. Il avait fait incursion sur
l’esplanade de la mosquée al-Aqsa, certes sous haute protection policière
israélienne : «Ma visite comporte un message simple, qui est que je ne
me soumets pas et ne recule pas».
Bureau temporaire à Cheikh Jarrah
Il a profité des manifestations
arabes dans les villes israéliennes mixtes pour s’afficher en défenseur des
Juifs, des militaires et des jeunes ultra-orthodoxes pour qui il est devenu un
symbole. Il a réussi à supplanter Bezalel Smotrich qui a perdu son rôle de chef
incontesté de la droite sioniste religieuse. Ben Gvir est d’ailleurs devenu exigeant
sur le contenu des listes électorales aux prochaines élections en imposant la
moitié des places pour ses amis. Il n’est pas loin de vouloir prendre la tête
d’une liste commune en écartant Smotrich qui a senti le danger et qui n’est pas prêt à se
soumettre aux diktats de son concurrent, quitte à se présenter seul sur une
liste séparée. Cela ne ferait pas l’affaire du Likoud qui compte sur une liste
unifiée pour servir de strapontin à une coalition sous l’égide de Netanyahou.
Expulsé de la Knesset pour insultes au président de séance
Pressé par les dirigeants du
Likoud, Smotrich hésite et finasse car il sait que son avenir politique est en
jeu. Il ne veut pas subir le sort réservé à Bennett : «L'union de nos
deux partis est importante pour nous par rapport à nos valeurs, mais aussi pour
des raisons très pratiques. Nous n'avons qu'un seul objectif : amener le bloc
nationaliste à la victoire, si Dieu le veut, lors des prochaines élections, et
établir un gouvernement juif, sioniste et nationaliste en Israël».
Pour Gantz et Lapid, Ben Gvir est
du pain béni car ils vont axer leur campagne sur le risque d’un trublion pareil
dans un gouvernement qui n’aurait de cesse que de se mettre à mal avec les pays
arabes. Netanyahou avait longtemps gardé à distance cet extrémiste qui donnait
une vilaine image de la droite et il avait tout fait pour lui interdire la
Knesset en refusant de lui faire la courte
échelle pour un poste de député. Mais aujourd’hui la situation est différente
et il a besoin de lui pour revenir au pouvoir même s’il risque de perdre des
voix de la droite modérée qui trouveraient refuge auprès de Gideon Saar. C'était Ben Gvir ou la liste arabe;
Clash avec Ayman Odeh
Ben Gvir est de la lignée du
rabbin Meir Kahane dont les options racistes ont été toujours combattues en
Israël. Meir
David HaKohen Kahane, né à Brooklyn le 1er août 1932, a été assassiné à
Manhattan le 5 novembre 1990. Il prônait une ligne nationaliste favorable au
Grand Israël et au transfert hors du pays de tous les Palestiniens de
Cisjordanie en incluant les Arabes vivant en Israël. Fondateur de la Ligue de
défense juive puis de Kach, parti politique israélien d'extrême droite, il
devint député à la Knesset lors des élections de 1984. Il a été exclu du
parlement après que Kach a été déclaré parti raciste par le gouvernement
israélien puis interdit en Israël.
Itamar Ben Gvir vu tenant l'emblème de la voiture du Premier ministre Yitzhak Rabin,
Ben Gvir est soupçonné d’avoir
été l’inspirateur de l’assassinat du premier ministre Rabin. En effet il avait
été filmé en train d’arracher l’emblème de sa Cadillac : «Nous sommes
arrivés à sa voiture. Nous le rejoindrons aussi». Quelques semaines plus
tard, Rabin avait été assassiné par un extrémiste illuminé tandis que Ben Gvir
s’était paré du symbole de la tragédie nationale d'Israël.
Smotrich et Ben Gvir représentent
tous deux une nouvelle génération de politiciens israéliens ayant supplanté
Naftali Bennett qui, pour eux, s’était déplacé vers le centre après avoir formé
la coalition actuelle. Netanyahou n’aurait pas d’autre choix que de les inclure
dans son éventuelle coalition en cas de victoire aux prochaines élections. Ben
Gvir a déjà prévenu : «Si je deviens ministre, je ferais la promotion
d'une loi qui impose la peine de mort à tous les terroristes palestiniens, et
une autre qui accorde l'immunité à tous les soldats israéliens». Les
Israéliens sont prévenus.
Cependant, avoir le vent en poupe
dans les sondages n’est pas forcément une fatalité. Zemmour était aussi au
firmament mais il s'est effondré au final. L’électeur israélien réfléchit à deux fois avant de mettre son
bulletin de vote dans l’urne. Israël n’a pas l’habitude des extrêmes qui ne servent
que de repoussoirs pour les mettre dans le droit chemin.
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