EN UKRAINE, POUTINE CHOISIT LA POLITIQUE DU CANON
Par Jacques BENILLOUCHE
En 2018 à Paris, il était le dernier, de manière ostensible, à
rejoindre ses homologues pour la commémoration de l’armistice. Il a par
ailleurs le complexe de sa taille, 1,67m, ce qui avait presque entrainé un
incident diplomatique lorsqu’un journaliste de l’AFP l’avait fait apparaître
plus petit que les personnes qui l’entouraient. Alors, il porte des chaussures à
talons pour paraître plus grand, des chaussures compensées dissimulées. Il veut
donner l’impression d’être un sportif en arborant son torse nu, un plongeur, un
pilote de jet, un cavalier alors qu’à 69 ans, il souffre de problèmes de dos. Très
myope, il refuse de porter des lunettes au point de confondre ses
interlocuteurs. Bon acteur, il joue dans la vie comme en politique.
Il est difficile de dire qu’il ait pris les Occidentaux par surprise car en juillet 2021 il avait exposé en détail sa politique : «Tout d'abord, je voudrais souligner que le mur qui s'est dressé ces dernières années entre la Russie et l'Ukraine est à mes yeux notre grand malheur et notre grande tragédie commune. Ce sont, avant tout, les conséquences de nos propres erreurs commises à différentes périodes. Mais elles sont aussi le résultat d'efforts délibérés de ces forces qui ont toujours cherché à saper notre unité. La formule qu'ils appliquent est connue depuis des temps immémoriaux : diviser pour régner. Pour mieux comprendre le présent et se projeter dans l'avenir, il faut se tourner vers l'histoire. Je me concentrerai sur les moments clés et cruciaux qu'il est important que nous nous souvenions, tant en Russie qu'en Ukraine. Les Russes, les Ukrainiens et les Biélorusses sont tous des descendants de l'ancienne Rus, qui était le plus grand État d'Europe. Les tribus slaves et autres à travers le vaste territoire - de Ladoga, Novgorod et Pskov à Kiev et Tchernigov - étaient liées par une langue (que nous appelons maintenant le vieux russe), des liens économiques, le règne des princes de la dynastie Rurik, et – après le baptême de Rus – la foi orthodoxe».
On ne peut pas
être plus clair, pour lui l’Ukraine n’existe pas. Il résume le conflit en
Ukraine en une lutte entre l’autocratie orientale et la démocratie occidentale.
Oublié l’accord de Minsk signé en 2015 qui appelait au
retrait des troupes étrangères et des mercenaires dans l'est de l'Ukraine. Il a
été signé par Poutine pour la Russie, François Hollande pour la France, Angela
Merkel pour l'Allemagne et Petro Porochenko pour l'Ukraine, mais n'a jamais été
promulgué. C’était un accord mort-né. L'opinion de
Poutine selon laquelle les Russes et les Ukrainiens forment un seul peuple et
que l'Ukraine n'est pas un pays séparé est attribuable à ses origines au
KGB.
Il est un fait
que la Russie de Poutine a perdu l’Ukraine mais refuse de l’admettre. Le
président Volodymyr Zelensky a fait preuve de beaucoup d’inexpérience face à un
Russe prêt à tout. Il aurait dû être patient en organisant avant tout sa
défense pour être capable de riposter face à un dictateur imprévisible. De nombreux pays étaient prêts à l’aider en le réarmant et en
réorganisation son armée faible ou du moins insuffisance pour s’opposer au
grand ours russe. L’aviation ukrainienne fait illusion, les tanks manquent dans
le pays et la défense antiaérienne est inexistante. Il avait évalué cette faiblesse.
D’ailleurs la seule menace permanente d’invasion a poussé les Ukrainiens à
soutenir, trop tôt, la candidature du pays à l’Otan.
Certes il était difficile
de croire à une guerre engagée par la Russie après sa défaite d'Afghanistan, pensant que Poutine ne cherchait qu’à forcer les
États-Unis et l’Europe à négocier un nouveau pacte de sécurité. Le seul moyen
de parvenir à ses fins était donc de négocier au son du canon. Il savait que la
menace nucléaire l’immunisait contre une intervention musclée des Américains. D'ailleurs dans son discours la menace a été claire. Les Européens étant inexistants, il s’agissait d’un théâtre d’ombres. Alors
tandis que Poutine montre ses lanceurs de missiles, Biden met en évidence les
transferts d’armes au gouvernement de Kiev en publiant des photos d’avions
remplis d’armes et d’équipements militaires et même des missiles Stinger.
Poutine a interprété ces actes comme une provocation qui imposait une réaction
ferme. Le «petit juif» Zelensky méritait une leçon même si la Russie risque
gros en intervenant dans des zones peuplées qui rendent l’armée vulnérable.
Matériel américain livré à l'Ukraine |
L’Occident n’est
pas à l’abri de critiques car il a ignoré les avertissements de Poutine
concernant les préoccupations de la Russie, exprimées dès la conférence de
Munich du 10 février 2007. Son discours a été interprété comme le manifeste le plus dur de tous les temps depuis
l'ère de la guerre froide : l'expansion de
l'OTAN, les problèmes de désarmement, l'érosion de l'OSCE en tant
qu'institution, le problème nucléaire iranien et la sécurité énergétique de
l'Europe. Mais personne n'a prêté une oreille attentive : «L'élargissement
de l'OTAN n'a aucun rapport avec la modernisation de l'Alliance elle-même, ni
avec la garantie de la sécurité en Europe. Au contraire, il représente une
grave provocation qui réduit le niveau de confiance mutuelle».
Poutine veut que
l’Ukraine renonce à sa candidature à l’Otan. L’Union soviétique avait
reculé en 1962 face à la menace de guerre de Kennedy qui ne supportait pas les
missiles russes installés à Cuba. Poutine souhait aujourd’hui la même reculade consistant
à éloigner les missiles de la frontière russe. Les Ukrainiens, dont le nouveau
gouvernement a été organisé par des radicaux autoproclamés, bénéficiant d'un
soutien diplomatique et politique important de l'Occident, ont été optimistes. Mais personne
ne souhaitait mourir pour l’Ukraine. Le changement radical de gouvernement a
entraîné la rupture totale des relations entre Moscou et Kiev, la perte de la
Crimée et les hostilités dans le Donbass. Poutine avait averti qu’une véritable
démocratie ne mûrit jamais dans de telles conditions.
Aujourd’hui
Poutine se lance dans une guerre coûteuse pour une économie chancelante. Il s’était préparé en augmentant la part du
matériel militaire moderne dans ses forces armées jusqu'à 71% (en 2010, le taux
n'était que de 15%), mais, comme l'a dit Poutine lui-même, Moscou est incapable
de rivaliser avec les dépenses militaires de Washington et ne voit aucune
raison de le faire.
Mais Washington a
depuis longtemps décidé de ne plus envoyer ses boys se faire tuer pour des
étrangers. Alors la seule arme qui reste est à double tranchant. Les sanctions
et le boycott auraient beaucoup plus d’impact sur l’Occident dont l’économie
est totalement imbriquée dans celle de la Russie. D’ailleurs la Bourse vient de
marquer de grands signes de faiblesse. Il n’est pas sûr que Poutine recule même
si son économie s’effondre. Il trouvera toujours des nervis prêts à se
substituer à l’Occident. La Chine, l’Iran et de nombreux pays africains sont
prêts à modifier leurs alliances pour punir ceux qui les ont ignorés pendant
longtemps.
Cette guerre d’Ukraine est importante d’enseignements pour Israël. Il sait qu’il sera toujours seul à s’opposer à ses ennemis. Il doit donc toujours être fort, ne comptant que sur Tsahal bien armé et ses soldats pour sa défense. Il doit donc disposer des meilleurs systèmes de défense et d’une technologie à toute épreuve de façon à organiser sa propre dissuasion. La leçon de Poutine est édifiante. Les petits pays de l’ancienne Urss sont voués à disparaitre pour être absorbés dans le grand empire russe reconstitué.
L’Occident est
dompté, l’Europe de la défense n'existe pas. En succombant à la menace nucléaire, il montre sa faiblesse qui avait été déjà soulevée par le général de Gaulle dans un discours ; «A un certain point de menace de la part d'un impérialisme ambitieux, tout recul a pour effet de surexciter l'agresseur». Les alliances sont vouées à être
économiques et non plus militaires tant que l’arme nucléaire brandie par les
dictateurs neutralisera toute velléité de s’interposer pour défendre les faibles.
Jacques, bonne analyse mais incomplete: que fera Poutine de l'Ukrainw? L'annexa-t-il purement et simplement ou bien y nommera-t-il un gouvernement fantoche? Et Poutine s'arretera-t-il ou bien attaquera-t-il les pays baltes, la Moldavie, la Georgie, l'Armenie, l'Azerbaidjan et peut-etre meme les anciens pays du bloc sovietique. Il ne faut pas oubliier que l'Europe est pratiquement desarmee, qu'avec la suppression de la conscription, il n'existe plus que des armees de metier, assez faibles faut-il le souligner, meme si il y existe 2 puissances nucleaires. L'efficacite de l'armee francaise est sujette a caution apres la deroute au Mali (deroute probablement construite par l'armee privee de Poutine, le groupe Wagner).
RépondreSupprimerEt de plus comme tu l'as souligne, les economies europeennes sont imbriquees a celle de la Russie. 100% de l'energie utilisee par l'Allemagne provient de Russie. Et avec l'appui de la Chine, qui, entre-temps s'empresseront de reconquerir Taiwan, il est probable que nous nous acheminons vers une 3e guerre mondiale. Bref, pas mal de soucis a se faire.
Je reste persuadé qu'il ne veut pas occupé l'Ukraine. Il cherche a la neutraliser c'est a dire en faire un pays soumis ou au pire la finlandiser. La Russie est un pays économiquement faible avec pour seule richesses son sous sol riche. Pas d'industrie ni entreprise de service ... Par contre le peuple est bien éduqué mais trop servile pour s'opposer à ce dictateur qu'est poutine. Bonne analyse de la psychologie de ce dictateur. Les Européens sauront ils s'organiser ? J'en doute , seulement intéressé par leur bien être et sous domination germanique. Israël doit être fort et ne compter que sur ces forces . Les usa sont devenus isolationnistes et plus préoccupés par la Chine que par le moyen Orient. Ils sont autosuffisants du point de vue energetique
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