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samedi 15 janvier 2022

Les Etats-Unis s'opposent aux accords d'Israël avec la Chine

 


LES ÉTATS-UNIS S’OPPOSENT AUX ACCORDS D’ISRAËL AVEC LA CHINE

 

Par Jacques BENILLOUCHE

copyright © Temps et Contretemps

Le ministre des Affaires étrangères Yair Lapid  et le secrétaire d'État américain Antony Blinken

            

          Les États-Unis ne voient pas d’un bon œil le développement des activités économiques d’Israël avec la Chine. Ils le laissent entendre et menacent Israël qui s’est engagé dorénavant à informer Washington de tout nouvel accord signé avec la Chine. La question a été soulevée avec Yaïr Lapid lors de son entrevue à Washington avec le conseiller américain à la sécurité nationale Jake Sullivan. Les Américains ont transmis au gouvernement israélien leurs réserves concernant les investissements chinois dans les projets d'infrastructure israéliens et dans l'industrie technologique du pays.



Port chinois de Haifa

            Sous l’ère Netanyahou, l’ultra libéralisme avait poussé Israël a vendre ses bijoux de famille aux Chinois en commençant par l’usine chimique Adama Adam d’Ashdod puis par Tnuva, fleuron de l’industrie laitière. Ce furent ensuite les nouveaux ports d’Ashdod et de Haïfa et une usine de dessalement de l’eau de mer. Cette introduction massive de la Chine dans les projets israéliens d’infrastructure a de quoi inquiéter les États-Unis. Pourtant les Américains restent les premiers partenaires d’Israël même si les exportations israéliennes vers la Chine sont en forte progression depuis l’ouverture des relations diplomatiques en 1992, près de 4 milliards de dollars en 2019, tandis que les importations se sont élevées à 10 milliards de dollars dans le même temps. La Chine est aujourd’hui le troisième partenaire commercial d’Israël.

Le directeur de la CIA, Bill Burns

Bill Burns, directeur de la CIA, avait fait part le 11 août de ses préoccupations au Premier ministre Naftali Bennett concernant l'augmentation des investissements et de l'implication chinoise en Israël, en particulier «l'implication de la Chine dans le métro de Tel-Aviv». Bennett s’est expliqué : «Nous avons dit aux Américains que nous accueillons les sociétés d'infrastructure américaines pour travailler sur de grands projets en Israël, mais elles n'ont pas postulé pour les appels d'offres». Au cours de son voyage en Israël, Burns a également rencontré David Barnea, directeur du Mossad et le ministre de la Défense Benny Gantz. Entre 2002 et 2020, la grande majorité des investissements, 449 sur 463 transactions, ont concerné le secteur technologique et 8 transactions au cours de la même période concernaient le secteur des infrastructures. La pression des États-Unis a conduit Israël à créer en 2019, un organisme de surveillance pour réglementer les investissements étrangers dans le pays.

Déjà l’an dernier, le secrétaire d'État, Mike Pompeo, avait exhorté les responsables israéliens à cesser les investissements et les partenariats chinois car ils «mettaient les citoyens israéliens en danger et compromettait le partage de renseignements, les communications et les problèmes de sécurité entre les États-Unis et Israël». Un chantage déguisé. L'administration Biden a confirmé que la Chine était sa «principale menace pour la sécurité nationale». Mais Israël peut difficilement accéder aux exigences américaines car il est déjà soumis au boycott de BDS ; il aura du mal à trouver des partenaires étrangers disposés à moderniser son infrastructure à rénover. Par ailleurs, il ne peut se comporter comme les Émirats qui ont récemment interrompu les travaux de construction d'un projet portuaire chinois sous l’alibi américain qu'il serait utilisé par Pékin à des fins militaires.

Le métro de Tel Aviv

Mais le risque de conflit avec Washington est tellement grand que tous les accords commerciaux majeurs entre Israël et la Chine seront dorénavant approuvés par les États-Unis. En effet, en représailles, Joe Biden pourrait adopter une approche laxiste sur les pourparlers nucléaires avec l'Iran. Pourtant le commerce avec les États-Unis n’a pas été impacté. En 2020, Israël a importé pour 7,7 milliards de dollars de marchandises de Chine et exporté 4,2 milliards de dollars, contre 8 milliards de dollars d'importations en provenance des États-Unis et 13,1 milliards de dollars d'exportations. Ces chiffres montrent un déficit commercial avec la Chine et un excédent avec les États-Unis.

Israël ne peut se passer de la Chine face au poids de BDS. D’ailleurs dès 2013, Bennett, à l'époque ministre de l'Économie, avait averti que la campagne BDS croissante contre Israël auprès des Occidentaux menaçait le commerce extérieur du pays. C’est ainsi qu’il a estimé devoir se tourner vers La Chine et l’Inde. Pour exemple, en 2014, cinq sociétés européennes ont retiré leurs offres pour le contrat de privatisation du port de Haïfa par crainte d'un boycott pour leurs activités en Israël.

drone suicide harpy

Les États-Unis ont tout fait pour contrecarrer la vente d’armement israélien aux Chinois. Ils se sont opposés en 2000 à la vente de l’avion espion Phalcon et empêché en 2005 la vente de drones israéliens suicides Harpy. Sous la pression américaine, en septembre 2020, Hutchison de Hong Kong s’est retiré de la société de télécommunications israélienne Partner, après que la société française Orange, avait annoncé qu'elle mettait fin à tous les accords commerciaux avec Israël, l'un des plus grands actes de désinvestissement depuis le lancement du mouvement BDS en 2005.

Pendant ce temps, le tramway de Tel-Aviv voit ses lignes vertes et violettes retardées car seuls les Chinois ont fait des appels d’offres, les autres groupes ont été interdits par Washington sous prétexte qu’il craignait qu'une entreprise chinoise ne pose un câble optique dans les tunnels creusés pour le tramway et l'utilise à des fins d'espionnage. Noam Gruber, l'ancien responsable de la recherche au Conseil économique national israélien, s’est élevé contre la promesse d'Israël faite aux États-Unis de restreindre le commerce avec la Chine alors que le nombre d'entreprises étrangères disposées à entreprendre des projets d'infrastructure en Israël se réduit de jours en jours : «La valeur d'Israël pour la Chine, qui est sur le point de devenir la plus grande puissance économique du monde, est plutôt faible». Les Américains ne sont pas concernés par les conséquences sur l’économie d’Israël de BDS qui empêche la remise en état d’une l'infrastructure vieillie, mettant ainsi en cause les limites du soutien américain.

 

2 commentaires:

  1. J'ignorais qu'Israël recevait ses ordres des USA. Donc si je comprend bien, Israël est aux ordres du parti terroriste Ra'am, du parti d'extrême gauche Meretz, des Frères Musulmans.
    Quand donc le benêt Benett décide seul???
    ROSA

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  2. Israel dispose d'une autonomie -traduire souveraineté -limitée depuis le début de son existence. En rappel l'expédition de Suez stoppée par les américains pour leurs propres intérets dans le monde arabe. Nul besoin de rappeler également la dépendance aux armements US lors de la guerre de 73, l'ordre non écrit à Arik Sharon d'arreter son offensive qui aurait détruite toute l'armée Egyptienne etc etc... Les pressions américaines sont toujours trés fortes quelque soit le gouvernement, de droite ou de gauche.
    Le probléme avec la Chine ajoute aux difficultés et pose la limite des intérets économiques israéliens comme Jacques Benillouche l'explicite clairement . Mais les américains ne sauraient pousser trop loin aussi l'abandon d'Israel jusqu'à un renvcersement d'alliance à peine qu'Israel, puissance technologique novatrice ne se jette entiérement dans les bras de la Chine de plus en plus incontournable.

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